Pierre Goldman : un drôle d’innocent !

Pour les plus jeunes, cet
homme, cette destinée fulgurante, criminelle et tragique ne signifieront plus
rien
.

Mais, pour les autres, je
suis sûr que le nom de Pierre Goldman, français, fils de résistants juifs, révolutionnaire
agité et violent, « braqueur » de pharmacies, accusé condamné
puis acquitté des meurtres qui lui étaient reprochés au mois de mars 1975,
écrivain de talent, idole de la classe intellectuelle et subversive, héros des
idéologues en chambre, à la dérive à sa sortie de prison, assassiné
probablement à la suite d’un trafic d’armes mal négocié, demi-frère du chanteur
Jean-Jacques Goldman, veut dire beaucoup.
Sur l’époque, sur le
climat intellectuel, sur les complaisances coupables et les scandales judiciaires.

Il ne serait pas revenu
s’installer dans ma tête si je n’avais lu un roman (tellement à clés qu’il
s’apparente à une biographie) qui place Pierre Goldman à nouveau dans
l’actualité. « Patria o muerte » de Dominique Perrut est un livre qui
n’a pas fait l’objet, comme il l’aurait mérité, de nombreux comptes-rendus.
Mais à sa lecture, on comprend vite pourquoi une certaine critique littéraire
de gauche n’a même pas daigné lui consacrer une ligne tant ce roman bouleverse
les idées reçues, dénonce les supercheries et révèle à quel point la justice
criminelle a pu être instrumentalisée et manipulée grâce à l’action conjointe
de la peopolisation bien-pensante et de médias égarés. Ce livre, certes, n’est
pas sans défaut. Il est long, prolixe et sans doute trop compliqué dans sa
construction mais sur l’essentiel il est redoutable.

Il met en exergue la
manière dont Pierre Goldman est devenu un criminel – dans le récit les
pharmacies sont remplacées par des épiceries – et a bénéficié, à la suite d’une
cassation opportune, d’un second procès où une mansuétude choquante a créé un
véritable déni de justice.

Dominique Perrut, avec ce
qui ressemble plus au courage d’un penseur libre et d’un polémiste clairvoyant
qu’à l’habileté d’un romancier, démontre comment les éléments factuels, la
psychologie de Goldman et le faux alibi qui lui a été littéralement offert (par
une personne ayant avoué par la suite qu’elle avait menti) ne laissent guère
planer de doute sur la culpabilité de Goldman.

Il était nécessaire de
fabriquer une icône et de poursuivre le culte, même au détriment de la vérité.
On a abandonné sur le bord de la route judiciaire des détresses et des
douleurs, des morts qui n’avaient pas la chance d’avoir le label
révolutionnaire. Trop ordinaires. A négliger. Une mère et sa fille froidement
exécutées dans la précipitation d’un crime ayant mal tourné.
Il était inconcevable, pour la cause, que Pierre Goldman ait pu accomplir cela, être un homme capable de cela !


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  1. Jean-Dominique Reffait

    J’ignore presque tout de Pierre Goldman. Je m’étonne de cette hypothèse exclusive que vous privilégiez quant à son assassinat sans évoquer les barbouzes de la police d’alors, notamment les honorables justiciers du GAL. Et si l’on prétend démystifier un épisode de cette époque, il convient également de faire un sort aux collusions d’alors entre police secrète et milieu dans ce qui était, heureusement à une bien plus faible proportion qu’en Italie, la tentative de barrer la route à l’hydre communiste par tous les moyens du crime et de la crapulerie. On ne corrige pas un déséquilibre par un autre déséquilibre.
    Je ne suis pas tenté pour autant de défendre Pierre Goldman, pas davantage que plus tard, Knobelspiess. J’étais adolescent à l’époque, je pouvais me mobiliser contre l’extradition de Klaus Croissant, en raison de son statut d’avocat de Baader, mais je ne me suis jamais senti solidaire de ces héros aux mains sales. Je n’ai aucun avis sur sa culpabilité et m’astreint, pour lui comme pour tous, à ne pas transformer mon ignorance en vindicte. Je ne lirais pas le livre de Dominique Perrut parce que le sujet ne m’intéresse pas du tout. Il y avait tant à faire, à gauche à l’époque, plutôt que braquer des commerces. La gauche a toujours recherché son Robin des Bois, sans jamais le trouver.

  2. @PB
    « On a abandonné sur le bord de la route judiciaire des détresses et des douleurs, des morts qui n’avaient pas la chance d’avoir le label révolutionnaire. « 
    Alors quelqu’un s’est arrogé le droit de remettre sur la route un semblant de justice en exécutant cet homme.
    Il n’est pas sûr que la clarté nécessaire à la vérité s’en soit trouvée améliorée. Peut-on combattre l’injustice par une autre injustice ? Peut-on se substituer à la justice en devenant exécutant des basses oeuvres ?
    http://www.dailymotion.com/video/xc0j4o_extrait-comment-j-ai-tue-pierre-gol_news
    extrait de l’émission « spécial investigation » rediffusée ce dimanche 25/07 sur C+
    Cordialement
    Pierre-Antoine

  3. Vous avez décidément entrepris d’occuper ce mois de juillet avec des questions fort épineuses mais qui ne sauraient qu’inciter à la réflexion ainsi qu’à la plus grande prudence…!

  4. Patrick Handicap expatrié

    Faut-il justifier pour autant la vengeance avec un crime d’officine comme moyen de rendre le « droit » ? Est-ce faire « honneur » à la police ? Pas à la justice en tous cas qui s’est avérée impuissante, volontairement ou non, pour châtier les coupables et instigateurs de ce crime. Il aura fallu attendre Auriol ???

  5. Alex paulista

    Je suis jeune, mais près des Pyrénées on se souvient que des salauds torturaient encore à quelques kilomètres, de l’autre côté de la frontière. Cette lutte n’était pas que du romantisme, et avait aussi ses victimes innocentes.
    Et les bourreaux y ont aujourd’hui une belle retraite de la Police espagnole.
    Il faudrait demander à Charles Pasqua, l’un des derniers dinosaures de cette époque troublée, si la mansuétude envers les réseaux pro-ETA (anciennement résistants) était seulement un effet de la peopolisation bien-pensante de gauche.

  6. Votre mémoire se distrait dans la chaleur estivale Monsieur Bilger. Mais que de gravité dans ce billet plongé dans les années 1975. J’ai souvent pensé à ces horribles crimes et à ces deux pharmaciennes victimes innocentes d’un tueur fou. La presse ne s’attarda pas sur elles. L’affaire fut ailleurs. Le meilleur et le pire dans le communautarisme de l’époque, encore et toujours bien vivant ! Vous avez rendu un hommage à ces deux femmes aujourd’hui Monsieur Bilger ! Merci à vous.

  7. Le choix d’un sujet assez risque pour une fin de mois de juillet !
    En effet, il ne s’agit pas d’un fait divers ordinaire, comme certains seraient tentes de le penser, mais bien d’un evenement revelateur d’une epoque revolue et il est necessaire pour le comprendre de le replacer dans le contexte historique post-soixantehuitard.
    J’ai bien aime le texte reference ci-dessous
    http://www.causeur.fr/pierre-goldman-encore-et-toujours,3683
    Ma batterie va me lacher donc j’arrete la et puis les barbouzes…

  8. Aïssa Lacheb-Boukachache

    C’est étonnant tout de même ou plutôt non mais désolant … Il suffit qu’à trente ans de distance, quelqu’un se dévoile et dit avoir été l’auteur de l’assassinat de Pierre Goldman et hop! toute une flopée de livres apparaissent comme par enchantement, chacun livrant, bien sûr, LA Vérité … Ce serait drôle si cette affaire n’avait été pour ces deux pharmaciennes autant que pour Goldman, tragique de bout en bout …
    Je ne serais pas intervenu à cet endroit si dans votre commentaire de ce livre de Perrut, cher PB, il ne s’y trouvait pas une chose qui m’a arrêté … C’est de vous lire écrire que Goldman est coupable. Coupable parce que vous venez de le lire dans le livre de ce type … Dans le même temps, l’air de rien, vous donnez le change en faisant semblant de ne vous en tenir qu’à une banale critique de livre. Or, ce n’est pas cela que vous faites et on ne saurait tenir pour secondaire votre propos … Là, je ne vous passerai pas cela, cher, même par gentillesse car le sujet est par trop délicat … Ainsi,vous qui n’avez eu de cesse d’appeler ici même et partout au respect de l’institution judiciaire, au respect de ses décisions en jugement et arrêt, au respect du jury populaire, au respect de l’intime conviction judiciaire, à la considération que la vérité judiciaire clôt toute polémique, au respect de la loi en somme, des principes également, ne vous trouve-t-on pas aujourd’hui en flagrant délit de piétinement public de toutes ces choses de ce seul fait subjectif et insignifiant en vérité, que la littérature d’un romancier «maladroit» (je vous cite) dit a contrario de l’institution judiciaire en sa cour d’assises d’Amiens que Pierre Goldman est coupable! Quel reniement de tout ce que vous professez depuis longtemps!… La cour d’assises d’Amiens, du vent! Le jury populaire de cette cour ce jour-là, du flan! un ramassis d’ânes! des abrutis! L’intime conviction, des cacahuètes! La cour de Cassation, du pipi de sansonnet! La vérité, c’est Perrut et son «malhabile» (je vous cite encore) roman. Rien autre! Est-ce que vous vous rendez compte de la portée de tels écrits émanant de vous? Et si oui, je vous pose la question essentielle: pourquoi l’avez-vous fait?
    Ce commentaire que vous avez produit aujourd’hui marque de manière incontestable un tournant radical dans votre conception de la chose judiciaire. Par dessus elle, vous avez placé et le journalisme d’investigation et la spéculation intellectuelle, littéraire et fictionnelle … Par terre les juges donc et tout ce qu’ils font et ont fait! Quel est la cause de ce formidable désamour? C’est extraordinaire!….
    Aïssa.

  9. Vous êtes étonnant M. Bilger, vous regrettez un déni de justice pour des faits commis en 1975 alors qu’il y a quelque temps vous demandiez que l’on abandonne les poursuites contre un violeur d’enfant célèbre qui n’a fait que 42 jours de prison pour des faits commis en 1977.
    Vous avez une drôle d’idée de l’injustice je trouve…

  10. Il se trouve que, comme vous visiblement, j’ai vu cette enquête diffusée ce dimanche par Canal + concernant Pierre Goldman, que je ne connaissais pas jusqu’alors.
    Il est expliqué, témoignages à l’appui, y compris d’un ministre, que cette affaire remonterait jusqu’en haut de l’État.
    Lorsque vous dites « assassiné probablement à la suite d’un trafic d’armes mal négocié », cela semble, et pour le moins, un peu léger. La lecture de Wikipédia le confirme d’ailleurs.
    Mais bon ! Je n’y étais pas, tout comme vous d’ailleurs.
    Par delà le fond, ce qui me surprend, c’est le manque de respect de la seconde cour d’assises ou celui des morts, l’intéressé ne pouvant se défendre.
    Mais vous allez encore me dire que j’ai la volupté d’être désagréable…

  11. Denis Monod-Broca

    « Il était inconcevable, pour la cause, que Pierre Goldman ait pu accomplir cela, être un homme capable de cela ! »
    Toujours cette tentation de séparer l’humanité en 2 parties, les bons d’un côté, les mauvais de l’autre.
    Ce sont les actes qui faut distinguer, bonnes actions d’un côté, crimes et délits de l’autre. Mais, tous autant que nous sommes, nous sommes capables des uns comme des autres, nous ne sommes ni intrinsèquement bons ni intrinsèquement mauvais.

  12. Véronique Raffeneau

    Extrait d’un entretien entre Pierre Goldman et Régis Debray paru dans Libération en 1979
    « Si tu n’avais pas écrit le livre, crois-tu que tu aurais été absous, à Amiens, du chef d’accusation principal ?
    Non. Je crois que si je n’avais pas écrit ce livre, le verdict n’aurait pas été cassé. Et si par hasard, le verdict avait été cassé, j’aurais été condamné à nouveau (…). »
    Je suis d’accord avec vous pour dire que la mobilisation intellectuelle et médiatique de l’époque autour de « la cause » Pierre Goldman est un véritable marqueur du climat et de l’ambiance des années 70.
    Sur wikipédia, j’ai noté à votre attention ceci :
    « En prison, Pierre Goldman écrit « Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France », qui obtient un succès critique et populaire (plus de 60 000 exemplaires vendus). Maître Arnaud Lyon-Caen, son avocat devant la Cour de cassation en fait même distribuer un exemplaire à chaque membre de la Cour avant son procès en révision »
    Et puis, au fond qu’est devenue cette génération super militante ?
    Me Kiejman, un des avocats de Pierre Goldman est devenu garde des Sceaux de François Mitterrand. Aujourd’hui il est l’avocat de… Mme Bettencourt.
    Je pense que Pierre Goldman a été plus utilisé que lui n’a utilisé.
    Pour vos lecteurs il est intéressant de se reporter au dossier que le site de J.J. Goldman consacre à P. Goldman.
    Il y a tout un assortiment d’articles que Libération, Le Monde, Les Temps modernes ont publiés pour défendre leur « cause ». A leur lecture, on se rend compte vraiment de l’ambiance de l’époque et de cette drôle de justice agissant sous pression médiatique et idéologique.

  13. Eh bien quoi ? N’avez-vous pas l’habitude que la gauche bien-pensante se caricature elle-même dans la pire abjection ?
    Devant, on se réclame des «valeurs», on dénie aux autres le droit d’en avoir, on les traite de salauds. Mais, derrière, on fait ses petites affaires et ses grosses magouilles.
    La «cause» justifie toutes les « saloperies ». Et ils sont toujours aussi blancs à leurs propres yeux. Et ils continuent à nous tympaniser de leurs leçons.

  14. « Il était inconcevable, pour la cause, que Pierre Goldman ait pu accomplir cela, être un homme capable de cela ! »
    Je ne sais pas de quelle « cause » vous parlez, mais il est certain que lorsqu’on connaît J-J Goldman, son talent et son investissement dans les causes humanitaires, on a du mal à imaginer que son frère puisque être capable de telles ignominies.
    Alors le fait d’avoir eu un père résistant (juif ou pas, cela n’a pas vraiment d’importance… enfin je suppose) est-il un sauf-conduit délivré par le microcosme intellectuel français, permettant de commettre toutes les turpitudes ?
    Sincèrement je m’interroge.

  15. @Véronique Raffeneau
    « A leur lecture, on se rend compte vraiment de l’ambiance de l’époque et de cette drôle de justice agissant sous pression médiatique et idéologique. « 
    Ouf, heureusement que ce n’est plus le cas aujourd’hui.
    De quoi ? que dites-vous ? non… cela ne peut pas être ! Impossible, pas dans une démocratie du XXIème siècle, encore moins avec la qualité des médias que nous avons !
    Cordialement
    Pierre-Antoine

  16. @Denis Monod-Broca
    « nous ne sommes ni intrinsèquement bons ni intrinsèquement mauvais. »
    Si seulement c’était vrai !
    J’imagine qu’un peu de levain faisant lever toute la pâte, il ne faut pas grand-chose dans le coeur de l’homme, malgré ses « bonnes intentions » à le rendre mauvais.
    Comme le disait l’apôtre Paul « Je sais que le bien n’habite pas en moi, c’est-à-dire en l’être faible que je suis. Certes, le désir de faire le bien existe en moi, mais non la capacité de l’accomplir. En effet, je ne fais pas le bien que je veux et je fais le mal que je ne veux pas… » (Lettre aux Romains ch7:18,19)
    Je reprendrai ce que vous avez écrit en conclusion en disant : « Nous sommes intrinsèquement bons dans l’intention et hélas mauvais dans les résultats ».
    Mais il y a de l’espoir !
    Cordialement
    Pierre-Antoine

  17. Contrairement à ce que tente ici de faire croire le nommé Bilger le (très mauvais livre) de ce Perrut n’est qu’un poussif remake de celui commis par une merdignoble nommée Anissimov peu auparavant : on voit donc mal pourquoi la critique… littéraire lui aurait accordé la moindre attention. Mais bon, puisque la « critique littéraire » intéresse tellement le nommé Bilger : je lui envoie copie de celle que j’avais en son temps adressée c/o Les Temps modernes à Claude Lanzmann, qui se garda bien de la publier, et même, d’accuser réception…
    L. Nemeth, Docteur en Histoire contemporaine
    – copie au Monde
    – copie à Jean-Jacques Goldman, bien cordialement
    – copie et pour sa honte au « Musée d’art et d’histoire du judaïsme », qui dans sa boutique, diffuse le livre de la merdignoble Anissimov
    * * * *
    – Myriam ANISSIMOV, Vie et mort de Samuel Rozowski, Denoël, 2007
    L’auteur s’était déjà signalée pour avoir procédé, dans sa biographie de Primo Levi, à des emprunts mal signalés, et pour y avoir commis des bourdes qui témoignaient de surprenantes lacunes sur le plan historien. Mais c’est à un comportement d’une toute autre gravité qu’il nous est ici donné d’assister avec un ouvrage dont c’est jusqu’au titre, qui atteste le caractère louche. Sachant que la mort occupe ici moins d’une page (pp. 226-227) elle n’est présentée que comme étant la conséquence logique, d’une « vie », elle-même présentée d’une manière qui appelle peu de commentaires. Pour l’essentiel en effet on est ici devant un florilège des deux précédents ouvrages hostiles à Pierre Goldman (Prazan, Casubolo) ; à ceci près, que là où leurs auteurs faisaient mine de garder quelque « ‘dignité' », madame Anissimov bave en toute insanité. Tout au plus lui concèdera-t-on la semi-franchise avec laquelle elle se présente, p. 226, comme une amoureuse éconduite. D’où les incongruités qui en découlent : ainsi la pharmacie où eut lieu le double crime imputé à Pierre Goldman devient-elle, p. 71, un… magasin de lingerie (la volonté de nuisance, se fait ici volonté de nuisette) ; quant à l’épouse de Pierre elle n’est évoquée, p. 143, que sous un angle gynécologique, ordurier, et dont on aimerait être sûr qu’il est dépourvu de toute considération ethnique (rappelons que Pierre avait épousé une originaire de la Guadeloupe).
    L’existence d’un contentieux affectif n’est pas seule en cause toutefois dans ce ricanement, qui en page 214 prend même des accents céliniens (« Il s’en sortait toujours d’une façon ou d’une autre par une pirouette, Rozowski »), et dans lequel -même si madame Anissimov devait s’en défendre avec la dernière énergie- les antisémites feront leur miel de plus d’un passage : celui (pp. 146-150) où cette ânissime se pose en bienfaitrice-mal-récompensée de la mère de Pierre, est à cet égard un modèle du genre. Mais hélas force est de constater que ce livre exprime assez fidèlement l’idéologie qui est aujourd’hui de mise dans un certain milieu juif où l’on n’hésite pas à faire cause commune avec la pire réaction, du moment qu’il y a moyen de brûler ce que l’on avait adoré, et de virer sans cesse plus à droite -à la limite de la déréliction. Incroyable, mais vrai : il n’y a pas une seule page consacrée à l’engagement politique de Pierre, dans ce livre qui est supposé nous parler de lui. Mais à la limite, ici peu importe, car très vite apparaît que c’est avec son propre passé, que l’auteur tente ici de régler un mauvais compte. Un passé, où être de gauche voire d’extrême gauche impliquait moins une critique radicale de l’ordre existant (mai 1968 aura clairement à cet égard marqué un tournant) que l’adhésion à des « causes », qui furent autant d’événements-fondateurs. Le soutien à Pierre Goldman (qui même s’il date d’après 1968, héritait de cette culture de l’avant) ayant été, ô combien, l’une de ces causes : ce serait providentiel, pour Anissimov et consorts, si Pierre pouvait nous avoir trompés -et nous, nous être dramatiquement trompés ! Le plus affligeant est que madame Anissimov est sûrement très persuadée de faire oeuvre originale là où elle ne fait en réalité qu’emboîter le pas à ce qui se pratique depuis maintenant des décennies dans ces mêmes milieux aux Etats-Unis vis-à-vis de l’affaire Sacco et Vanzetti, des époux Rosenberg, voire de la guerre d’Espagne.
    Si originalité il y a, ce n’est pas du côté de Guignol, où risquait de nous entraîner l’enfance lyonnaise de l’auteur, mais bel et bien du côté du grand-guignol. Car enfin on peine à garder son sérieux, p. 242, là où il est question de l’inhumation définitive de Pierre : « François Lalou, se penchant vers moi, murmura avec une sorte d’amusement : « Décidément il nous aura fait marcher jusqu’au bout » (si tant est que la mémoire de Pierre est au-dessus de ces p…attes de mouche on se prend tout de même à penser que les histoires juives ne sont décidément pas très drôles, par les temps qui courent). Encore aimerait-on être sûrs que la judéité ici mise en avant s’appuie sur des convictions et ne vise pas à caresser dans le sens du poil une certaine catégorie de lecteurs, comme en p. 214 où l’on apprend que Pierre aurait déclaré à un juge, en prison, être favorable à des résolutions de l’ONU qui alors « pleuvaient sur Israël ». Rien de trop grave en vérité quand on sait (mais madame Anissimov omet de le préciser) que ces résolutions condamnaient une Occupation qui en Palestine dure depuis maintenant quarante ans. Mais ce n’en est pas moins une présentation malhonnête quand on sait les homériques discussions qui toujours opposèrent Pierre aux membres de la rédaction de « Libération », chaque fois qu’il était question du Moyen-Orient.
    Incidemment aussi on est amené à constater que la bourgeoisie a depuis longtemps cessé de respecter, vis-à-vis de l’extrême gauche, les plus élémentaires règles de loyauté, et les lois qui sanctionnent la diffamation. Car enfin s’il s’était agi d’un militant d’extrême droite les éditions Denoël, outre qu’elles auraient refusé ce (très médiocre) manuscrit, n’auraient pas publié une phrase telle que celle-ci, p. 210, concernant Pierre Goldman en prison : « Il aurait voulu être un Juif profondément pieux le vendredi soir, et un tueur impitoyable le reste de la semaine ». Madame Anissimov a bien de la chance de pouvoir lire ainsi dans le cerveau des gens…. (que soit permis de rappeler, et en s’appuyant sur les deux livres hostiles déjà ici mentionnés : 1) que Pierre n’a jamais tué qui que ce soit ; 2) et que, outre qu’il n’avait pas l’âme d’un mercenaire, sa conception de la délinquance l’opposait en tous points, au grand banditisme). Mais on ne se débarrassera pas si facilement de ce qui suit. Celles et ceux qui connurent Pierre, même si ce fut en d’autres lieux et en d’autres circonstances, peuvent attester qu’avec lui ce n’était pas seulement « le vendredi soir » mais toute la semaine qu’ils avaient tout à craindre, ces nazillons qui firent par la suite une belle carrière ministérielle ; que même une ancienne déportée trouva très fréquentables, sitôt qu’ils firent partie de ses amis politiques ; et auxquels on ose au moins espérer que madame Anissimov refuserait, le cas échéant, de tendre une patte molle.
    Pour le reste on s’étonne d’avoir à rappeler que Pierre Goldman avait aussi ses défauts. Parmi ceux-ci figurait sans doute un tic de comportement très répandu dans le milieu des « organisations politiques » (trotskistes, mais pas seulement) et qui consiste à vouloir ne rien devoir à personne. Que madame Anissimov ait été sincèrement éprouvée, par ce qu’elle aura interprété comme un comportement d’ingratitude, on veut bien le croire. Mais cela ne saurait en aucun cas justifier, ce qu’il faut bien appeler : une basse besogne.

  18. thierry bruno

    Encore à côté de la plaque, Aïssa. Il ne me semble pas que P. Bilger dise que Goldman est coupable après avoir lu ce roman mais qu’après cette lecture, cela lui permet de rappeler quelque chose qui donne une image peu reluisante de la justice : avec un excellent tapage médiatique, on peut influencer une cour dans un sens ou dans l’autre. Selon P. Bilger, Goldman était coupable, toutes les preuves étaient là et pourtant il a été innocenté. Pour avoir vu des reportages sur ces faits, j’avais aussi de sérieux doutes sur l’innocence de cet individu, mais ce n’est qu’une impression personnelle. Je pense que P. Bilger est suffisamment expert de la chose judiciaire pour que son propos nous interpelle sans polémique et surtout sans vos lourdes diatribes habituelles qui tournent en rond.

  19. Quelle idée bizarre de nous balancer Pierre Goldman en amuse-gueule !
    Pourquoi pas la bande à Bonnot ?
    Ou Cartouche ?
    Pour nous faire oublier la bonne Liliane et ses prédateurs ?
    Il est vrai qu’elle inspire moins la pitié que les deux pharmaciennes. Ou que Pierre G. assassiné (par des truands dites-vous, que l’on n’a pas identifiés ? Comme Boulin s’est suicidé ?).
    Mais jugé innocent. JUGÉ, M. Bilger, jugé.
    Il est vrai aussi que la grande Liliane n’a pas besoin de P38 (même spécial) pour extorquer de la petite monnaie au bon peuple : il lui suffit de planquer ses revenus et ses biens, avec l’aide de spécialistes et de la législation – qui est très bonne fille (et que l’on peut toujours améliorer : la fiducie est maintenant accessible aux personnes physiques – lisez le blog de M. G. Moréas). Merci qui ?
    Au bon peuple, cet infâme profiteur avec ses prétendus avantages acquis – peut-on imaginer une telle outrecuidance ?, de se colleter avec le fameux déficit. L’huile première pression à froid est la meilleure. Mais on peut faire une deuxième pression – et chauffer les résidus si nécessaire : c’est encore un corps gras qui sourd.
    Allons, on peut ainsi encore poursuivre la partie de poker entre amis : les découverts seront comblés par un petit tour de vis sur le dos du petit personnel.
    En attendant amusons-le avec l’ignoble Pierre Goldman, coupable bien qu’innocenté.

  20. Véronique Raffeneau

    @ Pierre-Antoine
    Honnêtement, je pense que pour qui prend la peine de lire les articles de presse que j’ai mentionnés dans mon post il est évident que l’enjeu des procès de Pierre Goldman allait bien au-delà de celui de la manifestation de la vérité.
    Quand je parle d’une génération je crois qu’on peut également y inclure celle d’une magistrature post 68.
    Si vous le pouvez, lisez les pages que Pierre Goldman consacre à son procès dans « Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France » (p.261 – p.311).
    Je veux bien trente ans plus tard n’être qu’une lectrice orientée par le billet de Philippe, mais bon je « ressens » quand même l’empathie – appuyée – du président Braunchweig et de l’avocat général Langlois pour l’accusé Pierre Goldman.
    Sans parler de la présence de Simone Signoret rejouant dans la cour d’assises la scène de Casque d’or spectatrice muette de l’exécution de Manda…
    Sans parler du défaut de procédure ayant entraîné la cassation du premier procès : l’absence d’une date sur un PV ayant trait aux débats lors du premier procès d’assises…
    Et puis, pour le médiatiquement et l’intellectuellement dominant du moment – Libération, Le Monde – des jurés assassins en première instance, des jurés justes en second procès…
    Enfin, dans ma série « que sont-ils devenus ? » je ne résiste pas à mentionner pour Philippe Bilger l’extrait du chapitre que la Commissaire Leclerc – policier chargé de l’affaire du boulevard Richard-Lenoir – consacre à Pierre Goldman dans son livre de souvenirs « De l’Antigang à la Criminelle » :
    « Je retiens de ce jour (les obsèques de Pierre Goldman) l’émotion sincère de deux qui l’aimaient, la dignité de ceux qui le croyaient coupable malgré tout, et l’épitaphe que lui avait ciselé Bernard Kouchner avant la cérémonie : « Pierre tu étais dans notre génération et au-devant d’elle, et tu le demeureras ». Le voyou était devenu un objet de culte. »
    B. Kouchner est devenu ministre de… Nicolas Sarkozy.
    Maintenant, en rapport avec votre observation.
    En rapide, ce qui aujourd’hui pourrait distinguer à mon avis un avocat général Langlois d’un procureur Courroye ce pourrait être chez le second une notion assez floue du sens de l’honneur, et une aptitude assez développée à une forme de cynisme. En ce sens le label procureur Courroye est aussi pour moi le produit d’une génération. Celle des années 80.

  21. Denis Monod-Broca

    @ Pierre-Antoine
    Merci pour la citation de St-Paul. Elle se vérifie malheureusement tous les jours. Nous faisons le mal avec les meilleures intentions du monde. C’est désespérant mais ce n’est pas une raison pour perdre espoir.

  22. Catherine JACOB@Luc Nemeth

    @ Luc Nemeth | 29 juillet 2010 à 12:46
    «ainsi la pharmacie où eut lieu le double crime imputé à Pierre Goldman devient-elle, p. 71, un… magasin de lingerie (la volonté de nuisance, se fait ici volonté de nuisette);»
    Hum ! Pour que la substitution puisse jouer il conviendrait sans doute qu’il y ait une volonté de nuire délibérée qui tenterait de se présenter de façon atténuée, j’imagine. Ceci étant, la lingerie ne se compose pas que de nuisettes…
    «et auxquels on ose au moins espérer que madame Anissimov refuserait, le cas échéant, de tendre une patte molle.»
    Une pâte molle? Quelle horreur ! Blague à part c’est vrai qu’une poignée de main sans énergie laisse une impression assez désagréable et, peut-être à tort, de manque de franchise. Personnellement, je préfère toutefois l’inclinaison de tête qui ne présente pas le même risque de contamination par toutes sortes de bactéries…
    «Pour le reste on s’étonne d’avoir à rappeler que Pierre Goldman avait aussi ses défauts. Parmi ceux-ci figurait sans doute un tic de comportement très répandu dans le milieu des « organisations politiques » (trotskistes, mais pas seulement) et qui consiste à vouloir ne rien devoir à personne.»
    Donc, pas le même profil que Banier auquel un don important aurait été fait dans la foulée du décès d’André Bettencourt par, incontestablement, une épouse en deuil, ce qui est une vulnérabilité intrinsèque, et à propos duquel on a appris ce matin qu’il serait notamment bénéficiaire de deux assurances-Vie de 200 millions d’euros chacune.

  23. @thierry bruno
    Votre remarque selon laquelle celle d’Aïssa donnerait « une image peu reluisante de la justice », et ce au motif que cette dernière est sensible à ce que vous appelez « le tapage médiatique », me paraît prisonnière du mythe de l’impossible impartialité.
    Laissons de côté, par égard envers celui qui a affiché ci-dessous mon commentaire, tout ce qui peut concerner la partialité délibérée des magistrats, pour peu que la raison d’Etat soit en jeu…
    Mais il y a aussi quelque chose de plus simple – et qui me paraît avoir été assez parfaitement exposé par Sébastien Faure (que je cite de mémoire) en… 1899, lorsque se trouva posée la question de la cassation du procès Dreyfus, et que nombreux étaient ceux qui restaient muets à attendre la décision qui allait être prise : « les juges de cassation ne sont pas, ils ne peuvent pas être indifférents aux bruits du dehors ».

  24. Philippe Bilger

    Quels étranges commentaires, pour la plupart !
    Suis-je obligé de justifier le choix de mes sujets ? Le livre de Dominique Perrut, quoique imparfait, est excellent et éclaire bien Pierre Goldman sous le jour judiciaire.
    Après une condamnation en première instance, PG a bénéficié d’une grande mansuétude lors du second procès, se voyant exonéré des meurtres qui lui étaient reprochés.
    Le processus mis en oeuvre a été l’inverse de celui habituellement constaté. En effet on n’est pas passé de l’affirmation judiciaire d’une culpabilité à sa remise en cause mais d’une indulgence judiciaire surprenante à sa remise en cause grâce aux débats très denses et argumentés qui ont suivi.
    On connaît les conditions dans lesquelles le second arrêt est intervenu, obtenu au forceps après une intense pression politique, médiatique et judiciaire. Elle a payé puis a été fortement critiquée.
    Je suis d’autant plus à l’aise pour soupçonner cet arrêt qu’il s’est fondé essentiellement, pour disculper PG des meurtres, sur un alibi dont celui qui l’a offert a reconnu par la suite qu’il était faux.
    Pour conclure, la justice criminelle a été égarée et instrumentalisée et les victimes de ces meurtres n’ont pas trouvé la réparation qui était due à leur mémoire et à leur innocence.

  25. @Philippe Bilger
    Vous n’êtes évidemment pas obligé de justifier le choix de vos sujets (d’autant que votre argumentaire annonce en fait assez clairement ce qui vous amène) mais vous êtes, comme tout un chacun, tenu de justifier la pertinence de vos propos. Or vous parlez ici de ce dont vous ignorez manifestement tout – ou bien faites mine de l’ignorer. Contrairement à vos dires en effet les questions d’alibi avaient tenu fort peu d’importance dans la défense de Pierre. Veuillez vous reporter à la presse d’époque : la défense se basait essentiellement sur le grotesque de l’accusation.

  26. @Véronique Raffeneau
    J’avais bien compris le sens de votre intervention.
    Bien que volontairement empreint d’une ironie toute socratique, je me voulais généraliste dans mon commentaire.
    Que ce soit la génération 68, 80 ou 2000, quand l’éthique, l’intégrité et l’honneur dû à la charge ne sont pas présents, il y a obligatoirement un sentiment d’injustice qui peut pousser certains à se substituer à elle, comme je l’ai déploré dans mon premier billet (28 juillet 14:16).
    D’où l’exécution de Pierre Goldman sur un simple trottoir suite à une décision prise que j’ose croire au moins dans un cabinet noir (pour espérer avoir un jour accès à des archives) et non à l’angle d’un couloir ou dans l’arrière-salle d’un bistrot. Ce qui est loin, bien loin des débats publics et contradictoires nécessaires à toute vérité, ne fut-elle que judiciaire.
    Cordialement
    Pierre-Antoine

  27. jeanpaul de la mata

    Rendre justice à deux femmes comme le dit untel ou batifoler entre internautes de ceci ou de cela en supposant le contraire, n’apporte aucun élément nouveau qui permet de dire que Goldman fût assassiné par des voyous pour telle ou telle raison ou par décision d’un cabinet noir comme le dit un autre… ce qui voudrait dire que la démocratie chez nous, c’est du vent, étant donné que les gens en cours de certains services spéciaux ou autres ersatz, quel que soit le pouvoir en place, font ce qu’ils veulent, assassinat compris ?
    Et les magistrats comme vous… ils font quoi cher monsieur ?

  28. thierry bruno

    @Luc Nemeth
    Je crois bien que les propos de M. Bilger montrent aussi que la justice est effectivement capable d’être très sensible à l’ambiance qui peut entourer un procès. Entre une justice totalement déconnectée de la vie réelle et une justice qui y serait trop sensible, quel est le moindre mal ? (l’avis de M. Bilger serait intéressant à connaître).
    Concernant le grotesque de l’accusation, je me souviens que l’avocat de Goldman a rappelé lors du témoignage dans un reportage sur l’affaire « qu’en droit français, il ne s’agit pas à la défense de faire la preuve de l’innocence de son client mais à l’accusation de faire la démonstration de sa culpabilité » et qu’il s’était donc employer à démolir tous les arguments de la défense. Avec un faux-témoignage comme alibi, l’accusation est déjà mal partie et la défense a la belle vie, reconnaissez-le.

  29. Aïssa Lacheb-Boukachache

    Avec votre autorisation, je poste le courriel que vous m’avez fait suite à mon commentaire et la réponse que je vous ai faite…
    ________________________________
    Je ne pense pas. On pourrait imaginer l’inverse, à savoir tout un « branle et une redistribution des cartes » de la part de ce milieu médiatico-politico-judiciaire qui, suite à l’acquittement d’Amiens, aurait crié à la culpabilité. Croyez-vous qu’alors, on aurait eu la quasi certitude de son innocence? J’en doute. Je pense plutôt qu’en cette affaire comme en d’autres, c’est d’autres mécanismes sociologiques (et même de la psychologie humaine) qui sont cause de tel ou tel parti pris … Prenez Patrick Dils par exemple … Combien -et les familles des victimes plus que tous- jurent qu’il est coupable … Quelles pressions médiatico-politico-judiciaires à cet endroit, dans un sens comme dans l’autre? Encore, Richard Roman … Qui dans cette région de Provence le croit réellement et totalement innocent, malgré l’acquittement? Pourtant, s’il n’y a pas eu dans ces deux affaires aussi retentissantes que celle de Goldman des PRESSIONS médiatico-politico-judiciaires; il n’y en eut pas moins cependant mille et une interventions médiatiques de politiques, de journalistes, de juges et avocats … Pour dire quoi justement? Exactement que dans ces deux affaires, les arrêts des dernières cours d’assises les ayant jugés et acquittés étaient des arrêts conformes à leur innocence. Malgré cela et plus on le martelait, plus la population était -et jusqu’aujourd’hui encore pour sa grande majorité- convaincue qu’il n’en est rien et qu’ils sont coupables. Si on retient votre thèse, dans l’affaire Goldman, ce serait à cause du tapage (pression) médiatiques et autres qui affirmait l’innocence de cet homme, que l’on serait persuadé que l’arrêt de la première cour d’assises était le bon; dans les affaires Dills et Roman, ce serait a contrario ce tapage affirmant l’innocence de ces hommes qui persuaderait que les arrêts des premières cours d’assises étaient les bons … C’est très délicat comme position et en vérité ce n’est pas aussi simple et tranché que cela. Dans le cas Goldman, je crois que son livre a plaidé pour lui et obtenu l’acquittement, y compris dans l’esprit des gens, son livre uniquement; son assassinat ensuite a signé dans l’esprit de ces mêmes gens sa culpabilité. Sans pression aucune d’aucune part … Au sens grec du terme, l’histoire de cet homme est une tragédie. Et cette tragédie, elle est de bout en bout sa création exclusive. On pourrait en discuter des jours et des jours … Aïssa.
    > Message du 29/07/10 10:32
    > De : « Philippe BILGER »
    > A : lacheb.aissa@orange.fr
    > Copie à :
    > Objet :
    >
    > Ce qui est interessant dans l’histoire judiciaire pour Goldman c’est que le processus s’est inversé. Au lieu que la condamnation entraîne une focalisation sur l’innocence réelle ou prétendue dans des débats interminables, c’est l’acquittement inspiré par des pressions médiatico-politico-judiciaires qui a mis en branle une véritable redistribution des cartes et conduit à une quasi-certitude de sa culpabilité pour les faits les plus graves qui lui étaient reprochés.
    ______________________________
    Aïssa.

  30. Alex paulista

    @ jeanpaul de la mata
    J’imagine qu’ils batifolent comme tout le monde au sujet d’un livre, d’un peintre, avant de se replonger dans leur travail.
    Einstein s’amusait à tirer la langue.
    Vous devriez aller batifoler un peu.

  31. Véronique Raffeneau

    @ Aïssa
    « Dans le cas Goldman, je crois que son livre a plaidé pour lui et obtenu l’acquittement, y compris dans l’esprit des gens, son livre uniquement »
    Ayant lu ces derniers jours, suite au billet, « Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France « , il me semble que la rédaction de ce livre peut être aussi comprise comme la tentative pour Pierre Goldman de se persuader et de se convaincre, lui en premier, de son innocence.
    Ses souvenirs obscurs ne sont peut-être qu’une réponse au réquisitoire de l’avocat général Langlois faisant valoir un aspect quasi accidentel du double assassinat. Pierre Goldman aurait voulu se défendre du geste d’un client de la pharmacie lui tendant une pièce de cinq francs. PG aurait compris ce geste comme une tentative de le désarmer. Une sorte de réflexe de combattant qui va le transformer en tueur coupable de la tragédie insupportable d’avoir dû supprimer deux témoins.
    « J’eus, un bref instant, le désir d’être coupable, de mériter ce réquisitoire génial qui me fascinait parce qu’il me proposait une impossible image qui, quelque part, obscurément, m’avait fasciné en 1969, me fascinait encore. Mais j’étais innocent. »
    Il est bien entendu que se contenter d’extraire un paragraphe de six lignes d’un livre qui fait 312 pages (édition de poche) ne suffit absolument pas pour vouloir démontrer quoi que ce soit.
    Mais je pense qu’on ne s’interroge pas suffisamment sur le titre à mon sens énigmatique et ambigu du livre de Pierre Goldman. Sur l’aspect… obscurément obscur de son souvenir.

  32. Yves Maillard

    Ce billet fait froid dans le dos. Le délire révolutionnaire du microcosme « intellectuel et médiatique » parisien, qui constitue pourtant une classe de privilégiés, n’a pas de limite. Il lui fait légitimer le crime, le mensonge, le déni de justice. Son pouvoir est inquiétant, puisqu’il parvient à manipuler et corrompre au profit de l’idéologie qui l’anime et au détriment de la vérité et du droit une des institutions essentielles de la République, l’appareil judiciaire, avec une cour d’appel et la Cour de Cassation. Ce n’est pas moi qui le dit, mais un haut magistrat en exercice.
    Cela n’a en fait pas véritablement changé depuis 1975.
    Ces gens-là, qui sont aujourd’hui les impitoyables et arrogants dictateurs de la « pensée unique politiquement correcte », feraient bien de se méfier du peuple français qu’ils ne représentent pas et qui ne leur doit rien, le vrai, celui qui travaille, a du mal à joindre les deux bouts, élève ses enfants avec peine, craint pour son emploi et redoute le chômage, vit chichement de sa retraite. Attention au retour de manivelle… Il arrivera tôt ou tard et pas forcément là où on l’attend.
    A propos de la Cour de Cassation. Décidément le mythe de « clef de voûte » de notre appareil judiciaire, tel que nous l’avons appris en droit, en prend un nouveau coup, qui ne me surprend pas.
    Nous en avons, personnellement, il y a quelques années, fait l’amère expérience.
    Après un jugement sain et bien construit en droit de première instance, confirmé en cour d’appel par une autre décision tout aussi bien bâtie, la Cour de Cassation a fait droit à des allégations mensongères, n’a pas lu nos conclusions, a ignoré sa propre jurisprudence, et renversé la procédure en cours. Une « décision opportune », pourrait-on dire.
    L’affaire, depuis maintenant bientôt trois ans, est devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
    Nous avons, au cours de son instruction, découvert que les pratiques de la Cour de Cassation, en matière de partialité, étaient, disons, discutables.
    Il y a quelques semaines, la CEDH vient justement de condamner la France en raison de la partialité constatée des juges de cette cour, dans des conditions qui rappellent étrangement les nôtres.
    Nous ne nous battons pas que pour nous.
    Mais les citoyens lambdas que nous sommes n’auraient sans doute pas du avoir à le faire si d’autres que nous n’avaient pas préalablement pourri le système comme il en a été fait été dans ce billet.

  33. @thierry bruno
    Je crois surtout que M. Bilger se livre ici à une confusion qui pourrait se concevoir, venant d’un profane, mais qui est inacceptable – venant d’un magistrat – entre la cassation, d’une part, et l’appel, d’autre part…
    1) en ce qui concerne la cassation il n’y a pas lieu de revenir sur ce que Pierre a pu rappeler à Régis Debray, et qui relève de l’évidence : le premier verdict n’aurait pas été cassé s’il n’avait pas écrit ce livre. Pour le reste, chacun en ce monde défend son bifteck… Le procureur Bilger n’a aucune envie, et on le comprend, de voir des verdicts cassés. Mais moi en tant que justiciable je dis que Pierre a ici écrit une très belle page dans le combat pour nos libertés à tous, en obtenant la cassation, grâce à ce livre. Tout comme plus récemment les inculpés de Tarnac ont écrit une très belle page en obtenant leur remise en liberté à la force de leur plume : et ce face à une certaine France liberticide encore bien représentée, hélas, dans le milieu de la magistrature.
    2) en ce qui concerne le procès en appel qui eut lieu à Amiens : M. Bilger a cru pouvoir utiliser le terme de… mansuétude. Mais il est un « détail » qu’il omet de préciser : c’est que parmi les (mauvais) livres qui se sont succédés depuis 2005 et qui se voyaient déjà victorieusement faire croire que nous aurions défendu une mauvaise cause il en est un qui a donné, sinon le nom de l’auteur du double crime du boulevard Richard-Lenoir, du moins, son identité – et ce en des termes qui excluent totalement qu’il s’agisse de Pierre.
    C’est donc pour les hold-up qu’il avait reconnus, et qui avaient été commis sans effusion de sang, qu’il fut condamné à douze ans de prison, en appel. M. Bilger est sans doute mieux placé que moi pour apprécier tout ce qui concerne le montant des peines mais je n’estime pas que l’on puisse, de bonne foi, ici utiliser le mot « mansuétude ».
    Au total il y a ici de la part de M. Bilger non seulement confusion entre cassation et appel, mais, à l’intérieur même de l’appel, confusion des chefs d’accusation : cela commence tout de même à faire, un peu beaucoup.

  34. @ Messieurs Bilger et Lacheb-Boukachache
    Eh bien je vois qu’on fait salon !
    Aïssa, vous avez fait tomber votre e-mail…
    Monsieur Bilger, je suis ravie d’apprendre qu’il vous arrive de venir alimenter votre propos dans le débat !
    Les médias sont tels le gaufrier. Lorsque la pâte est prête, ils la dirigent dans les interstices d’un moule préétabli et la cuisent jusqu’à solidification complète, si possible jusqu’à acquisition d’une belle couleur mordorée.
    Nous sommes donc tous des gaufres, plus ou moins dorées.
    Pour autant comme pour toute recette, il ne faut pas négliger la préparation de la pâte : liant et repos nécessaires. A défaut, elle s’échappe, dégouline et refuse de se laisser mouler, encore moins griller.
    Je ne sais rien du dossier Goldman mais peut-être que l’insistance des médias pour consacrer leur thèse s’est montrée trop brutale, à moins qu’elle n’ait été précédée de messages contraires afin, dans un premier temps, de satisfaire les impératifs du fait divers licencieux, tellement capable d’attirer l’attention collective.
    Comme lors du référendum sur le traité constitutionnel de 2007, les médias (pourtant ostensiblement acquis au « oui ») ne sont pas parvenus à gaufrer l’opinion publique.
    On ne peut pas gagner à tous les coups.

  35. Aïssa,
    Votre « focalisation sur l’innocence réelle ou prétendue dans des débats interminables » n’est-elle pas « l’acquittement inspiré par des pressions médiatico-politico-judiciaires » ?
    Cordialement.

  36. Jean-Dominique Reffait

    Philippe, la passion ancienne semble ressurgir en vous. Grâce à vous j’ai potassé les articles de presse sur le sujet. La recherche est vite faite : Le Monde, Libération, La Croix pour la presse quotidienne, Esprits et Les Temps Modernes pour les revues.
    Pas de quoi exciter beaucoup un jury populaire à Amiens, au coeur d’une France sans internet où les trois chaînes de télévision sont aux mains de l’Etat, où la presse régionale est entre les mains des chrétiens-démocrates à l’Ouest (Ouest-France), des radicaux au sud (La Dépêche) et du groupe Hersant pour le reste, aussi peu suspects les uns et les autres d’être des relais du tapage médiatique gauchiste bien modeste pour un jury d’Amiens composé de quatre agriculteurs, deux représentants de commerce, un directeur d’école, un commerçant et un artisan mécanicien (Le Monde, 6 mai 1976).
    Idem pour l’arrêt de cassation. Livre de Goldman ou pas distribué aux magistrats, le procès-verbal du premier procès n’était pas daté. C’est amplement suffisant pour casser, d’autant plus que vous savez très bien que la Cour de Cassation casse lorsque les conditions d’un procès apparaissent inéquitables. Par ailleurs la Cour de Cassation a autorisé les parties civiles, normalement désintéressées au premier procès, à revenir au second procès, créant une jurisprudence encore active aujourd’hui pour satisfaire le principal témoin à charge contre Goldman, à savoir le policier Guinet qui était intervenu dans la pharmacie. Peu de complaisance donc de ce côté-là.
    En vérité la magistrature semble s’être pris une sérieuse claque médiatique à cette occasion, avec une remise en cause brutale inédite alors, que le jeune magistrat que vous étiez n’a pas forcément bien vécu. L’idée que ces contestataires de l’ordre puissent avoir gain de cause sur l’institution, à une époque où les clivages étaient bien nets (et disons-le, gonflés de haine pour l’autre camp), cette idée vous était insupportable. N’est-ce pas même cette opposition frontale qui vous a amené au Parquet, histoire d’en découdre à votre façon avec ceux qui, pour vous, sapaient les bases de la société ? Je m’avance, bien que cette supposition n’aurait rien de désobligeante.
    La fausseté d’un alibi confirmerait pour vous la culpabilité de Goldman. Il en faut plus, me semble-t-il et ce n’est pas un faux alibi qui fait un vrai coupable. Le faux alibi ne démontre qu’une chose : la volonté de Goldman de s’en sortir. Innocent ou coupable, c’est égal. Et si je devais être accusé d’un meurtre que je n’aurais pas commis, croyez bien que j’userais de tout pour m’en tirer, y compris du faux témoignage si l’occasion m’en était donnée. En voilà une drôle d’idée que d’exiger de l’accusé qu’il respecte les règles d’un système qui tend à l’enfoncer ! L’accusé défend sa peau, la morale publique n’est pas de son ressort. L’alibi en question était fourni par un noir, un antillais fêtard parisien, bien éloigné sur tous les points du mode de vie et de pensée des jurés et qui ne devait pas, pour ces gens-là, offrir toutes les garanties de crédibilité.
    Dans votre réponse à Aïssa, vous suggérez que l’évolution du cas Goldman suit une trajectoire inverse à celle habituellement constatée. Dans ce cas, on rechercherait depuis les preuves de la culpabilité de Goldman comme pour détruire le mythe né de cette affaire. Cela est justement dû au fossé qui sépare le milieu intellectuel parisien qui a soutenu voire sanctifié Goldman après son assassinat d’une France exclue de ces connivences. La France de Guy Lux n’a pas de sympathie pour les intellos soixante-huitards de Libération ou de Télérama qui le lui rendent trop bien par ailleurs.
    Très tôt il semble que Goldman ait agacé ses propres soutiens et que le mouvement de doute à son endroit soit venu de ses anciens thuriféraires telle Simone Signoret, après la publication de son deuxième livre où il se décrivait comme un tueur de magistrats ou de policiers. L’icône vacille, pour reprendre une de vos expressions récentes, d’autant plus facilement qu’elle vacille du côté de ceux qui ont fabriqué l’icône.
    Toutefois, je rapproche l’arrêt d’Amiens de celui du procès Fofana, excusez ce rapprochement qui me saute aux yeux. Un jury populaire fait abstraction des pressions policières ou médiatiques pour dire sa conviction, fondée sur des journées d’audiences et non pas seulement sur un alibi fragile qui apparaissait bien trop opportunément pour être accepté aveuglément. Dans l’un et l’autre cas, le jury populaire fait mentir les collusions mentales qu’on imagine ordinairement. Mais le Bilger d’alors ne voit plus les mêmes choses à la même place qu’aujourd’hui. Hier les intellos de gauche réclamaient l’acquittement, le Parquet exigeait la condamnation, aujourd’hui les mêmes intellos de gauche exigent la condamnation quand l’avocat général (je n’ose dire le Parquet dans le cas Fofana…) requiert l’acquittement. Inversion, effectivement.
    Au final, il m’apparaît que ce billet nous en apprend beaucoup sur vous et sur la généalogie de vos motivations à agir au sein de la Justice.

  37. Véronique Raffeneau

    @ Jean-Dominique
    « Pas de quoi exciter beaucoup un jury populaire à Amiens, au coeur d’une France sans internet où les trois chaînes de télévision sont aux mains de l’Etat (…) tapage médiatique gauchiste bien modeste pour un jury d’Amiens composé de quatre agriculteurs, deux représentants de commerce, un directeur d’école, un commerçant et un artisan mécanicien (Le Monde, 6 mai 1976). »
    Permettez-moi, Jean-Dominique, d’opposer à votre commentaire ces éléments :
    « Cet ouvrage connaît un grand succès, non seulement chez les intellectuels de gauche, qui depuis longtemps ont adopté le bonhomme, mais également à droite. Dans Le Figaro, Claude Mauriac s’indigne qu’on ait jeté « un philosophe en prison ». Goldman est pressenti pour le Goncourt. Devant la pression, la justice cède. La cour de cassation décide la révision du procès. Goldman est rejugé en 1976. Avant le procès, Mitterrand déclare : « Je ne crois pas qu’il soit l’assassin ».  » (blog  » Police et cetera  » – Georges Moréas(ancien policier))
    Ajoutez Jean Dutourd mentionné par Me Kiejman dans un documentaire consacré à Pierre Goldman.
    Permettez-moi également de vous rappeler que c’est un jury populaire issu selon votre expression de « La France de Guy Lux » qui en 1977 décidera de la perpétuité contre la peine de mort pour Patrick Henry.
    Tout cela pour vous dire que je pense qu’un jury populaire peut être lui aussi traversé par mille et une forces contradictoires, et que dans le cas de Pierre Goldman il y avait eu presque une unanimité non pas seulement dans Le Monde, Libé, Les Temps modernes, mais également dans la presse de droite. Pour ne pas dire dans l’ensemble de la presse.
    Enfin, je pense qu’il serait très intéressant de retrouver par exemple les chroniques d’Europe 1 que Frédéric Pottecher, chronique judiciaire populaire s’il en fut, a consacrées, je suppose, aux deux procès Goldman.
    « Idem pour l’arrêt de cassation (…) C’est amplement suffisant pour casser ».
    Disons que l’absence de la date sur le PV, pour reprendre la terminologie du procureur Courroye était « juridiquement inattaquable ». Mais il n’était que cela.
    Et la plupart des juristes vont diront que de mémoire de Cour de cassation c’est bien la première fois qu’un jugement a été cassé pour un tel motif…
    « La fausseté d’un alibi confirmerait pour vous la culpabilité de Goldman. »
    Non.
    Si le sujet de Philippe Bilger avait été la culpabilité de P. Goldman, il aurait repris l’ensemble des arguments de l’accusation qui ne se limitent pas à l’alibi discutable produit par P. Goldman, et que celui-ci développe longuement dans « Souvenirs d’un juif polonais né en France ». Sachant que ce livre est un mémoire de défense en tous points pensé et détaillé comme une réplique à l’acte d’accusation.
    Par ailleurs, reportez-vous si vous en avez la possibilité à la partie alibi des mémoires de P. Goldman. Cet alibi trouve sa source dans les tous premiers jours qui ont suivi le double assassinat.
    Il s’agit alors en premier pour P. Goldman de convaincre des relations très proches du milieu qu’il fréquente – mélange de voyous et d’indics – de sa non implication à la tragédie du boulevard Richard-Lenoir.
    En gros, P. Goldman va « travailler » sept ans durant à construire, étage par étage, son alibi (1969, date du double crime – 1975 publication de son livre).

  38. Véronique Raffeneau

    @ Jean-Dominique (suite)
    Je ne saisis pas le rapprochement que vous opérez entre les décisions des cours d’assises des procès Goldman et Fofana.
    Ce qui est en cause dans le procès Goldman est l’innocence ou la culpabilité de P. Goldman.
    Dans le procès Fofana ce qui a été contesté par le GDS est le réquisitoire de Philippe Bilger en raison du fait qu’il n’a pas repris en tous points l’analyse « sociétale » défendue par la partie civile, et en raison du fait qu’il n’a pas requis des perpétuités avec période de sûreté incompressible pour les co-accusés de Y. Fofana.
    D’autre part, la volonté du Parquet de Paris était de ne pas faire appel du verdict du procès Fofana.
    La parole d’un magistrat du parquet engage celle du parquet général.
    J’imagine mal un avocat général comme Philippe Bilger n’engageant que lui-même dans ses interventions médiatisées au lendemain du verdict.
    L’appel, et vous le savez fort bien, a été à l’initiative du GDS agissant sous la pression du CRIF et de Me Szpiner, GDS qui a tordu la position et la volonté du Parquet.

  39. Jean-Dominique Reffait

    Véronique,
    L’expression « France de Guy Lux » est un titre d’hebdomadaire de l’époque (je ne saurais vous dire lequel) qui établissait assez bien l’immense fossé de mépris entre la France populaire provinciale et les élites cultivées parisiennes. Le Goncourt, Claude Mauriac, François Mitterrand ou Jean Dutourd dans ce contexte, tout cela n’a que peu d’influence voire une influence négative dans une France rurale qui vient d’élire Giscard. C’est la France de Bruay-en-Artois, qui s’excite sur la mise en cause d’un notable accusé de crime. Vous citez le procès de Patrick Henry, mais ce n’est pas un contexte général qui a sauvé la tête d’Henry, c’est la plaidoirie de Badinter et son « homme coupé en deux ». Deux hommes furent guillotinés après le procès Henry sans soulever d’émotion dans un pays très majoritairement favorable à la peine de mort.
    Sur les motifs de cassation, il faut inverser la logique ordinairement admise. Quand la Cour de cassation veut casser un procès, elle trouve un moyen. Ce n’est pas le vice de procédure qui crée la cassation, c’est la volonté de cassation qui permet de trouver un moyen. D’autre part il convient de savoir que la Cour de cassation n’utilise qu’un seul motif pour casser, même si elle dispose de plusieurs vices de procédure dans un procès. Les gens sont toujours surpris que l’on casse pour un simple vice de procédure alors que dans un procès d’assises cassé, il y en a souvent une petite dizaine identifiés de gravité variable, l’ensemble reconstituant l’ambiance d’un procès inéquitable. La cour retient celui qui lui semble le plus déterminant d’un point de vue juridique. A contrario, un procès équitable aboutissant à une condamnation logique ne sera pas cassé, même s’il manque une date à un PV (éventuellement cassation partielle).
    Enfin ce qui me saute aux yeux dans le rapprochement entre le verdict Fofana et celui visant Goldman est le décalage entre la réalité d’un jury et ce qu’on imagine de sa faible capacité de résistance à l’ambiance générale surchauffée.

  40. Drôle de pays la France, celui ou lorsqu’une personne se dit d’extrême droite on lui fait des procès d’intention, on le traite de nazi, par contre lorsqu’on est d’extrême gauche, on leur prête des airs de révolutionnaires gentils, un président se permet même de les accueillir sur le territoire – Mitterrand.
    La France a hélas en son sein une sorte d’anarchie toujours prête à bondir, toujours envieuse de révolutions. Extrême gauche c’est bien, extrême droite c’est pas bien.
    Certains oublient que le communisme a fait plus de morts que le nazisme, et on voit de beaux restes en Corée du nord, à Cuba…
    Regardons tous ceux qui se disent ouvertement d’extrême gauche, à la télé, dans leurs écrits… Personne, personne ne critique. Normal d’être un révolutionnaire en puissance.
    Dites que vous êtes d’extrême droite et c’est l’opprobre assurée.
    On ne s’étonne pas que ce pays ait tant de mal à avancer.
    Cela dit, j’aime vos posts Philippe Bilger, c’est réconfortant d’avoir une voix libre au sein du monde judiciaire.
    PS : pour les gens de gauche, je ne suis pas d’extrême droite. J’analyse.

  41. Alex paulista

    @ kris
    Vous avez raison, c’est totalement injuste. Mettre Cuba et l’Allemagne nazie sur le même plan, que n’y ai-je pas pensé plus tôt !
    Notez quand même que les capitalistes ont moins d’appréhension à visiter les villes et les plages cubaines que les juifs à faire du tourisme dans l’Allemagne du IIIème Reich. Pourtant ils avaient prévu des camps. Ces salauds d’intellectuels de gauche ont réussi à en saper la réputation.
    Et cette vague assourdissante de solidarité envers la Corée du Nord. Insupportable. Certains les ont même trouvés fair play au foot.
    Les fachos sont nos amis, il faut les aimer aussi.

  42. Véronique Raffeneau

    @ Jean-Dominique
    Quand vous reprenez les comptes rendus de presse relatant le second procès de P. Goldman vous vous rendez compte qu’en réalité la président de la cour d’assises est quasi absent des débats et que l’avocat général a fait de son mieux pour temporiser les éléments indiscutablement accablants de son dossier d’accusation.
    En somme nous avons eu des jurés populaires laissés en roue libre dont l’intime conviction a dû se construire avec les éléments débattus entre les avocats de la partie civile, les avocats de la défense, l’accusé et les jurés. Tous « suppléant » les défaillances d’un président en réalité pas concerné par son procès et celles d’un avocat général inexistant.
    Le déni de justice dont parle Philippe dans son billet trouve son origine pour moi dans ce retrait des magistrats au sein d’une cour d’assises amputée d’une présidence et d’une accusation dignes de ce nom.
    Alors je veux bien que dans ces conditions les jurés populaires aient su faire preuve d’une résistance à toute épreuve vis-à-vis des pressions, mais il me semble que la pagaille invraisemblable des débats a pu tout de même les faire douter de la fiabilité du dossier d’accusation.
    « Quand la Cour de cassation veut casser un procès, elle trouve un moyen. »
    J’imagine qu’en 1976 lorsque le Parquet + le Siège, ensemble, voulaient acquitter ils ont su trouver le moyen de se rendre transparents et de se positionner hors champ des débats.
    Ambiance…
    « La présence de quatre cars de la gendarmerie mobile dans la cour du Palais de justice, de nombreux policiers en civil qui contrôlent l’accès à la salle d’audience, des étudiants en droit – non grévistes – dont les services ont été requis pour placer le public, le président de la cour tenant à s’assurer lui-même de l’installation de quelque soixante journalistes : tout cela révélait lundi 26 avril, à Amiens, l’importance donnée au nouveau procès Goldman, renvoyé devant la cour d’assises de la Somme après que la cour de cassation eut annulé, le 29 novembre dernier, pour un vice de procédure, l’arrêt rendu un an plus tôt par la cour d’assises de Paris. Le 14 décembre 1974, Pierre Goldman avait été condamné à la réclusion criminelle à vie pour trois agressions à main armée – qu’il avait reconnues – et deux meurtres – dont il se déclare innocent – commis dans une pharmacie parisienne, boulevard Richard-Lenoir, le 19 décembre 1969. » (Le Monde, 28 avril 1976)

  43. Jean-Yves Bouchicot

    En admettant que l’alibi soit faux, construit ou enjolivé, cela ne constitue pas la culpabilité. Je n’ai aucune sympathie pour Pierre Goldman et ses fascinations pour la violence, les armes, la flambe, les « élites » maoïstes de salon et le goût de l’autodestruction. Mais je me souviens parfaitement, à cette occasion et à celle du « suicide » de Andreas Baader, avoir dessiné deux affiches à l’Ecole des Beaux-Arts, sur la confiance que l’on pouvait accorder à une justice de caste toujours aux ordres, sans grand contre-pouvoir dans la presse à part le jeune « Libération ».Grâce à Internet et Mediapart, la part lui est faite un peu moins belle.
    Mais même malgré des gens comme vous, cher Philippe, je n’ai toujours pas confiance dans la justice de mon pays. Le problème soulevé par la police sur les gardes à vue (Libération, hier) le confirme : un magistrat ne se dérange pas le soir ou aux abords d’un week-end… Donc, GAV. C’est aussi ce mépris de caste qui n’inspire plus confiance. Comme pour la plupart des fonctionnaires, il va falloir un jour se mettre au travail.

  44. P. Bilger a raison de revenir sur ce chaos intellectuel lamentable.
    Mais ce fut également un K.O. intellectuel pour la droite française.
    Les « Hussards de la Droite » étaient tous devenus académiciens, ou membres de l’Institut… (Ah ! La bonne soupe !)
    Dès lors, la gauche a triomphé sans peine, le boulevard était vide et les intellos de droite planqués derrière les platanes de Saint-Germain des Prés.
    Sans vouloir excéder M. Bilger, je lui rappelle que Régis Debray a soutenu dans son livre « Les rendez-vous manqués » (1975) que P. Goldman était totalement innocent du meurtre des deux pharmaciennes.
    D’où ma consternation lorsque vous lui avez tressé des couronnes, ici, il y a quelques semaines…

  45. Ah bon ? alors comme ça, Savonarole (3 août à 17:47), les intellos de droite étaient « planqués derrière les platanes de Saint-Germain des Prés » ? Sauf erreur de ma part ils sont aujourd’hui planqués derrière leur clavier ! Les taons ne s’améliorent pas…
    Pour le reste on voit mal où est « le problème » dans le fait que Régis Debray, quoi que l’on puisse penser de l’intéressé, ait écrit que Pierre était innocent du meurtre des deux pharmaciennes du boulevard Richard-Lenoir.
    C’est là d’ailleurs un point dont vous auriez connaissance si avant de vous précipiter sur votre clavier vous aviez pris connaissance des ouvrages parus sur la question. Et si, avec toute l’infamie dont peuvent être capables les gens-de-droite, vous ne tentiez ici à votre tour de vous abriter derrière une procédure, pour régler des comptes de nature purement politique.

  46. @Luc Nemeth (4 août 11H31)
    Et si c’est Luc Rosensweig qui le dit, me croiras-tu ?
    « Pierre Goldman, encore et toujours »
    « Tuer et être tué, those are the questions »
    Publié le 29 janvier 2010.
    «  » On notera, pour l’anecdote, que Régis Debray avait, en 1975, publié un livre à la gloire de Pierre Goldman, Les rendez-vous manqués, où il défendait la thèse de l’innocence dans l’affaire des pharmaciennes. Sa conversion au cynisme le plus débridé ne choqua personne, à l’époque, et on doit à Dominique Perrut d’avoir sauvé de la critique rongeuse des souris ce morceau d’anthologie.
    ses articles » »
    Luc Rosensweig (Journaliste).

  47. Véronique Raffeneau

    @ Savonarole et M. Nemeth
    « Sans vouloir excéder M. Bilger, je lui rappelle que Régis Debray a soutenu dans son livre « Les rendez-vous manqués » (1975) que P. Goldman était totalement innocent du meurtre des deux pharmaciennes. »
    « Pour le reste on voit mal où est « le problème » dans le fait que Régis Debray, quoi que l’on puisse penser de l’intéressé, ait écrit que Pierre était innocent du meurtre des deux pharmaciennes du boulevard Richard-Lenoir. »
    En fait, l’un et l’autre vous vous trompez.
    Régis Debray a fini par écrire en 1992 (Les Masques) :
    « Quand on s’est rêvé Manouchian, on ne peut se voir affubler la peau d’un petit malfrat butant deux pharmaciennes pour piquer dans la caisse, sans se faire porter absent. Goldman ne pouvait pas plus se supporter coupable que disculpé. Auprès du public, il avait été sauvé par l’holocauste comme moi par la guerre d’Espagne : à quelques-uns malheur est bon. En France, l’affaire Dreyfus nous garantit un bon siècle de mauvaise conscience. Quant à l’intelligentsia, à laquelle je dois beaucoup, rien de plus aisé que de la faire marcher comme un seul homme quand on est derrière les barreaux et qu’on a un brin de plume. Elle se sent tellement coupable de ses mains blanches qu’un faux innocent aux mains sales fera toujours un martyr adorable. »
    Je pense que sa phrase « Goldman ne pouvait pas plus se supporter coupable que disculpé. » est juste.

  48. @ Veronique Raffeneau
    Votre arbitrage est excellent, j’en conviens.
    Il m’avait échappé que Régis Debray s’était encore une fois repenti.
    Et comme dit mon curé : « à pécheur repenti, Miséricorde ! »…

  49. Savonarole me demande, le 4 août à 18:56 : « Et si c’est Luc Rosenweig qui me dis, me croiras-tu ? »
    1°) dans son principe même la question est déjà un peu… surprenante puisque ce Luc Rosenzweig est connu pour ses opinions, très-à-la-droite-de-la-droite, et que, pour aussi loin que je puisse remonter : je n’ai jamais eu la moindre sympathie de ce côté-là.
    2°) dans le cas précis Savonarole est très, très mal tombé : il se trouve en effet que j’ai eu l’occasion de dire sur http://www.marianne2.fr, le 05/02/2010 à 18:45, ce qu’à mon sens il convenait de penser, du pestilentiel article qu’il se voit déjà brandir triomphalement.
    PS. Véronique Raffeneau vous m’attribuez sans objet une position par rapport à Régis Debray (je n’ai fait que reprendre ce qu’en disait Savonarole).

  50. Véronique Raffeneau

    @ Savonarole
    Pourquoi « repenti » ?
    Je vois plus dans la position de Régis Debray en 1992 l’expression de sa liberté intellectuelle.
    Il y a pu avoir chez Régis Debray beaucoup de déchirement intime à décrire un P. Goldman sans plus aucune liberté, sous le joug d’une réalité et d’une responsabilité insupportables à affronter, investi par tous les autres d’une mission d’innocence qui le dépassait.

  51. Véronique Raffeneau

    @ Luc
    J’ai bien compris ce que vous avez écrit à Savonarole concernant Régis Debray.
    Il m’a semblé important de mentionner la position de Régis Debray dix-sept ans après la parution en 1975 de son plaidoyer :
    « Les Rendez-vous manqués : (pour Pierre Goldman) »
    « Pour le reste on voit mal où est « le problème » dans le fait que Régis Debray, quoi que l’on puisse penser de l’intéressé, ait écrit que Pierre était innocent du meurtre des deux pharmaciennes du boulevard Richard-Lenoir. » (votre post)
    « Le problème » est que Régis Debray, s’il n’écrit pas explicitement en 1992 que selon lui Pierre Goldman était coupable, n’écrit plus en 1992 que Pierre Goldman était innocent.
    J’ai trouvé simplement surprenant que Savonarole et vous-même s’engageant dans une dispute autour de Régis Debray ne mentionniez pas l’évolution de Régis Debray au sujet de P. Goldman.
    Cette évolution, quel que soit le côté où l’on se place, n’est pas rien.

  52. @Véronique Raffeneau
    Vous ne sauriez mieux dire : je me désintéresse totalement de l’évolution-sic de… Régis Debray, que ce soit en général, ou sur le point précis. D’autre part je m’interdis de parler d’innocence et de culpabilité (encore que ce n’était pas le problème qui se posait, à celles et ceux qui -de toute couleur politique- dénonçaient ce procès), avec autant de légèreté que vous le faites. Cela dit, il n’y a pas de sujet tabou. Et sans avoir fait partie des intimes de Pierre je crois pouvoir vous dire que si d’aventure il avait été l’auteur de ce double meurtre (mais je vous renvoie sur ce point à la documentation disponible) ce n’est pas à… Régis Debray qu’il en aurait fait la confidence.

  53. « Dans le cas Goldman, je crois que son livre a plaidé pour lui et obtenu l’acquittement, y compris dans l’esprit des gens, son livre uniquement; son assassinat ensuite a signé dans l’esprit de ces mêmes gens sa culpabilité. Sans pression aucune d’aucune part … »
    Aïssa
    Taratata, n’importe quoi.
    Son assassinat avait au contraire été revendiqué par un « honneur de la police » qui radicalisa l’opinion de ses soutiens quant au fascisme rampant que ceux-là croyaient voir partout (probablement à raison en des cas très épars). Il accréditait leur thèse, ce n’est que bien plus tard que la piste mêlant grand banditisme et terrorisme espagnol vint éclairer différemment le crime de la place AGH.
    Son second bouquin fut le levier du malaise qui saisit les moins stupides et aveuglés de ses soutiens.
    Beaucoup de pourtant beaux esprits furent tentés de céder à une radicalisation de la contestation qui fantasmait ses adversaires, les gonflant à loisir de vilenies extrêmes qui n’étaient leurs, par exaltation pour être de luttes dignes de celles de leurs pères, quand ceux-là avaient déjà triomphé de ceux méritant telle détermination. Lire, Tigre de papier de Rolin, aussi toute l’ironie dont fait preuve le très estimable Debray quant à ses jeunes années.
    Indépendamment de la confusion que la judéité exacerbée de Goldman (pas au sens religieux, au sens historique) amena dans ce cas précis, il est toujours troublant de voir que se trouvent toujours de bons samaritains capables de mentir de bonne foi pour soustraire un type qui a leur sympathie, d’un ressenti personnel ou idéologique, à ce que ses actes lui ont pourtant fait mériter.
    L’affaire des fiancés de Fontainebleau est à ce titre, tout aussi sidérante.
    AO

  54. Véronique Raffeneau

    @ Luc
    Je ne peux pas accepter votre mot de légèreté me concernant.
    « (…) Cette décision [ la constitution du brigadier Quinet comme partie civile] chèvre-chou est à l’image d’une présidence craintivement exercée. Me Georges Klejman ira jusqu’à tancer le président, M. Guy Tabardel, indécis et souriant, incertain de son dossier au point de reconnaître par deux fois son examen insuffisant de l’affaire : l’avocat lui reprochera vivement des généralisations aussi aventurées que répétées. » – (Le Monde – 28 avril 1976).
    Une magistrature craintive et dépassée.
    Un président de la cour d’assises qui déclare à l’audience à un avocat de la défense qu’en réalité il n’a pas examiné vraiment son dossier…
    Quelque chose me dit que quand un président de cour d’assises ne tient pas plus que ça à la manifestation de la vérité, eh bien, il lui suffit simplement de renoncer à présider son procès.
    Idem pour l’accusation.
    Un autre article du Monde décrira l’avocat d’une partie civile, Me Floriot, comme le suppléant d’un avocat général visiblement inscrit aux abonnés absents.
    Nous pouvons ainsi envisager l’idée que dans de telles conditions, les jurés populaires aient TOUTES les réticences à reconnaître coupable un accusé et à le condamner.
    Par ailleurs, suite au billet de Philippe, le seul livre que j’ai eu vraiment envie de lire a été celui de Pierre Goldman.
    Pour l’écouter lui.
    Mais je ne peux pas m’empêcher de dire que si j’ai lu dans « Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France » des pages déchirantes de douleur et de vérité, j’y ai aussi lu la tentative désespérée d’un homme aux prises avec une réalité pour lui insupportable à affronter.
    Et puis, voyez-vous, pour être au plus près de ce que cette affaire m’inspire, si l’autobiographie de Pierre Goldman était un roman, je dirais que pour moi, oui il est tout à fait plausible qu’un homme qui souffre épouvantablement d’une rage de dents, qui est armé en vue de commettre des attaques à main armée, puisse pénétrer dans une pharmacie pour simplement y trouver de quoi soulager sa douleur.
    Et que les désordres, les accélérations et les obscurités de la vie peuvent transformer cet épisode en une tragédie.

  55. « Impostures intellectuelles » de Sokal & Bricmont. Editions Odile Jacob.
    Il n’est pas interdit de se taper sur les cuisses en lisant les quatre pages que ces auteurs consacrent à Régis Debray qui s’était mis en tête d’utiliser le théorème de Gödel et sa théorie des ensembles pour l’appliquer aux masses laborieuses.
    Comme d’habitude, cinq ans après, Régis revenait sur ses énormités en se confessant, avec un brin d’humour : « La gödelite est une maladie répandue »…
    (Alan Sokal est professeur de physique à l’université de New York et Jean Bricmont est professeur de physique théorique à l’université de Louvain.)

  56. @Véronique Raffeneau (7 août à 08:31)
    Avec un vif intérêt j’ai pris connaissance de votre phrase : « je dirais que pour moi, oui il est tout à fait plausible qu’un homme qui souffre épouvantablement d’une rage de dents, qui est armé en vue de commettre des attaques à main armée, puisse pénétrer dans une pharmacie pour simplement y trouver de quoi soulager sa douleur ».
    Les esprits cartésiens observeront qu’il y a tout de même une petite différence entre le fait de pénétrer alors dans une pharmacie pour se procurer des médicaments, et celui de tirer sur les personnes qui sont supposées vous les procurer.
    Les esprits chagrins (espèce dont le nombre ne cesse d’augmenter, à ce qu’il paraît…) objecteront qu’ils n’aimeraient pas vous trouver un jour face à eux dans un jury d’assises.
    Mais moi en tant que chercheur, c’est sans arrière-pensée que je vous dis sincèrement un grand merci pour nous avoir, à l’insu de votre gré, et par cette seule phrase, rappelé si parfaitement ce que fut le premier procès de Pierre Goldman !

  57. Véronique Raffeneau

    @ Luc
    « Les esprits cartésiens observeront qu’il y a tout de même une petite différence entre le fait de pénétrer alors dans une pharmacie pour se procurer des médicaments, et celui de tirer sur les personnes qui sont supposées vous les procurer. »
    La petite différence pourrait être selon moi ce que l’avocat général Langlois – avocat général du premier procès Goldman – a appelé « les imprécisions de la vie ».
    Par ailleurs, que ce soit dans le livre de P. Goldman ou dans les différents commentaires dont j’ai pris connaissance au sujet de cette affaire, je n’ai pas lu de lien opéré entre la rage de dents – avérée – dont souffrait P. Goldman et le fait que le lieu du double meurtre était une pharmacie.
    Je vous l’ai écrit :
    « si l’autobiographie de Pierre Goldman était un roman, je dirais que pour moi… »

  58. @Véronique
    Je ne peux que saluer le talent avec lequel, interpellée, vous avez aussitôt botté en touche du côté de l’avocat général Langlois : car si ce monsieur fondait ses réquisitoires sur les « imprécisions de la vie » alors c’est clairement du côté de la Cour – et non de la composition du jury – que tout citoyen est amené à se poser d’inquiétantes questions.
    Mais elles ne font chaque jour, que se renouveler…
    Ainsi par exemple je découvre sur Internet que le nommé Hortefeux a « présumé coupable » un inculpé. Certes l’inculpé en question est un personnage pour lequel nul n’est forcé d’éprouver de sympathie ; et je n’insiste pas sur ce point. Mais, sauf à vouloir pratiquer le mélange des genres : c’est de la justice, qu’il s’agit. Et on ose espérer qu’il se trouvera, parmi les bonnes âmes qui se revendiquent bruyamment de « l’Etat de Droit », des voix autorisées pour rappeler au nommé Hortefeux que tout inculpé est au contraire présumé innocent, jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable.

  59. Véronique Raffeneau

    @ Luc
    « Langlois se leva. Je le regardai. Il me regarda. Je le regardais. Il me regardait.
    Une partie importante de son réquisitoire me fut exclusivement adressée. J’en compris le sens. Il m’arriva de sourire à la somptuosité de son argumentation.
    Il commença par éliminer toute référence politique : iI allait seulement parler des faits criminels qui m’étaient imputés.
    Les hold-up que j’avais reconnus : une solution lamentable à des problèmes « tragiques ». Il le signifiait par cette expression (tragiques), qu’il ne « m’accusait pas », au fond de les avoir perpétrés : je n’en étais pas vraiment responsable, j’avais subi une « tragédie » que j’avais résolue dans le vol à main armée.
    Il se livra ensuite à une appréciation des témoignages. C’est à ce moment qu’il dit que l’imprécision était le signe de la vie, de l’authenticité. (…)
    Il me sembla aussi que dans ma relation muette à l’avocat général, j’avais côtoyé quelque chose de sublime. »
    Extrait de « Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France. »
    ps: les guillemets sont pour marquer ce qui est en italique dans le texte de P. Goldman.
    A lire P. Goldman, il me semble, Luc, que ce n’est pas botter en touche que de mentionner l’avocat général Langlois.
    Quant à votre comparaison Hortefeux, ben, en fait, je ne sais pas quoi dire. Tant il m’apparaît totalement évident que nous sommes là à des années lumière d’un début d’un commencement du sublime…

  60. @Véronique
    J’ai comme l’impression que nous n’avons pas fait tout à fait la même lecture… En tout cas lorsque j’avais lu cette phrase, le sens m’était paru clair. Ce que Pierre (dont on imagine aisément ce qu’il pouvait penser de cet avocat général Langlois) avait côtoyé de sublime -sans guillemets-, en cet instant : c’est le fossé, qui peut séparer des bipèdes dont on nous assure qu’ils appartiennent à la même espèce.
    En ce qui concerne en revanche Hortefeux, je vous concède qu’il n’a rien de sublime. Et rien qu’à regarder sa photo on ne m’enlèvera pas de l’idée que dans une vie antérieure il devait jouer des rôles interlopes dans des films du genre « Cabaret ».

  61. Tiens, au fait, j’ai oublié de le mentionner, VR et JDR, il est un parallèle plus évident que celui que cite JDR (PB n’a pas fait acquitter Fofana à ce que je sache même si d’aucuns lui ont reproché « un manque de sévérité », gloups) « le Parquet exigeait la condamnation, aujourd’hui les mêmes intellos de gauche exigent la condamnation quand l’avocat général (je n’ose dire le Parquet dans le cas Fofana…) requiert l’acquittement. Inversion, effectivement. »
    « Inversion » due à un agissement communautaire, une mauvaise conscience du reste de la population à laver dans les deux cas, celui de Goldman et celui que vais rapidement rappeler.
    Le parallèle qui me paraît plus vertigineux en ce que l’un éclaire l’autre donc de l’extérieur et permet donc de le considérer sans en subir les blocages névrotiques, est celui, manifeste, sidérant, qui lie à travers 25 ans l’affaire Goldman à celle du meurtre de la femme d’OJ Simpson et de son amant très certainement par celui qui y avait passionnel intérêt et qui écrivit quelques années plus loin, « If I did it », sorte de Rapoport people, sans la culture les tourments et l’intelligence suraiguë, avec juste le même cynisme de qui se sait derrière un mur de bien-pensance, achetant une factice innocence au prix du sang versé sans raison par ceux de sa race.
    Si je m’abuse, le « If » pas kiplinguien de OJ a été interdit de publication car jugé provocateur, celui de PG est toujours lisible, sorte d’aveux éternels.
    Extraordinaire parallèle, jusque dans l’après, l’un mort, l’autre emprisonné à vie que d’avoir fini par tomber le masque.
    AO

  62. Jean-Yves Bouchicot

    @ Oursivi
    Vous avez tout à fait raison, je trouve que Jean-Jacques aurait dû rendre hommage aux deux pharmaciennes dans sa célèbre chanson dédiée à son demi-frère, lui qui a teellleeeement de Coeur pour les restos du même nom… Ce qui me conforte dans ma méfiance pour les émotions médiatiquement rentables c’est que, quoique jeune à l’époque, je me souviens parfaitement du nom de l’assassin de Pierre Overney : Jean-Antoine Tramoni. Ah, dirait Alex Paulista, ces prénoms composés ! Pourquoi pas Jean-Edern ou Bernard-Henri, tant qu’on y est ? Je crois que désormais je signerai Yves tout court.

  63. Véronique Raffeneau

    @ Luc
    Si vous le permettez, je ne trouve pas du tout clair le sens que vous donnez à la phrase de P. Goldman.
    Je n’ai pas le temps de développer ce matin plus avant notre discussion.
    Dès que possible, je le ferai.
    @ oursivi
    C’est vrai que l’identité des deux femmes tuées dans la pharmacie du boulevard Richard-Lenoir est très, très peu mentionnée pour qui recherche des informations sur cette tragédie.
    Elles sont « les victimes ». Voilà tout.
    Il me semble que le Commissaire Leclerc mentionne leurs noms dans le chapitre qu’il consacre à Pierre Goldman.
    Dès que j’ai à nouveau ce livre en main, je vous dirai par l’intermédiaire du blog de Philippe.

  64. Véronique Raffeneau

    @ Oursivi
    Me référant à « De l’Antigang à la Criminelle » Commissaire Leclerc: éditions Plon – 2000
    Les victimes du double meurtre du boulevard Richard-Lenoir se nommaient Simone Delaunay, une pharmacienne de soixante ans et Jeanine Aubert, préparatrice en pharmacie, qui était une jeune femme mère d’une petite fille de vingt-huit mois.
    Raymond Trocard, un cadre commercial, client de la pharmacie sera grièvement blessé. Il décèdera accidentellement avant le premier procès Goldman.
    Le gardien de la Paix Gérard Quinet sera blessé alors qu’il poursuivait le tireur.
    Maintenant, concernant la difficulté à trouver le nom des victimes dans les articles de presse de l’époque – on retrouve très aisément le nom du gardien de la Paix -, je pense qu’il faut aussi comprendre cette abstention par rapport à l’époque et à l’histoire judiciaire.
    A cette époque un procès d’assises était encore considéré comme le lieu et le moment judiciaires où la société par le biais de la justice jugeait un accusé.
    Ce n’est que plus tard que la victime prendra une place de plus en plus essentielle, en tous les cas incontournable, dans le procès d’assises.
    « On a abandonné sur le bord de la route judiciaire des détresses et des douleurs, des morts qui n’avaient pas la chance d’avoir le label révolutionnaire. Trop ordinaires. A négliger. » (le billet)
    Si nous considérons la phrase de Philippe dans le contexte judiciaire et de la chronique judiciaire du début des années 70, je ne suis pas certaine que l’observation de Philippe soit totalement appropriée et juste.
    Et puis dans le cas de Pierre Goldman, ce qui a été investi sur la personnalité de l’accusé a totalement occulté les victimes.

  65. Rédigé par : Jean-Yves Bouchicot | 10 août 2010 à 21:37
    Oui, non seulement il a une voix atroce (chantant, parlant je ne me souviens plus), mais pense avec.
    JL Murat au talent d’une autre trempe, a dit avec raison que des années quatre-vingt, il n’y avait à peu près rien à sauver.
    « Musicalement », s’entend. Plus que s’écoute, d’ailleurs.
    Je souscris aujourd’hui des deux mains.
    Notons toutefois Bashung et Les Rita, plus quelques rares autres que le torrent vilain de la FM avait lâchés.
    Maintenant, on a le mauvais rap, tout aussi niais, et ne se donnant même pas la peine de chercher une mélodie, même médiocre.
    Retournons au Jazz, à Léo Ferré, à Frank Zappa, ou au groupe des six, tiens.
    Il y a trois semaines, je tenais à montrer à ma douce quelques « jolies » tombes du cimetière de Montparnasse.
    Je ne vais pas tout raconter on y a passé pas loin de deux heures, de Delphine Seyrig à Reiser si près de Gainsbourg et si proche de lui dans l’esprit, aussi à la tombe si désertée là où celle de Lucien est si sacralisée…
    Mais deux rapides choses.
    Un vieux monsieur qui vient échanger deux trois bricoles sur Reiser quand trouvons enfin sa tombe (à chaque fois j’oublie sa place) et qui retrouvé un quart d’heure plus loin me désigne la tombe désuète et oubliée de Georges Auric, me signalant comme pour me l’apprendre son appartenance aux fameux six. Pour toute réponse je lui siffle une petite valse enjouée, celle qu’Auric composa pour Oury et sa si justement célèbre vadrouille.
    Un peu plus loin, nous trouvons la tombe de Poincaré, collée au mur qui jouxte la rue Froidevaux, incroyablement modeste pour un des plus grands génies scientifique de tous les temps… dessus, une petite foule de tickets de métro coincés par des cailloux, et sur l’un d’eux qu’avons l’impudente curiosité d’examiner : « It has been proved ».
    Sublime !
    AO

  66. Véronique Raffeneau

    @ Luc
    J’ai beau m’interroger, je ne saisis toujours pas le sens que vous donnez à la phrase de P. Goldman concernant l’avocat général Langlois.
    Peut-être faut-il ne voir dans ces pages qu’une forme littéraire destinée à apporter une densité dramatique à la conclusion du livre de P. Goldman.
    Ce sont pour moi les pages d’un condamné scénarisant en quelque sorte le réquisitoire qui l’a fait condamner.
    Pardon de dire les choses de cette façon, à vous qui semblez éprouvez une affection profonde pour Pierre Goldman mais je pense – c’est ma lecture – que P. Golman a reconnu dans les paroles de l’avocat général quelque chose de décisif qui le réconciliait avec lui-même.

  67. @Véronique
    Me croirez-vous ? Je ne me pose en fait aucune question concernant le sens caché d’un livre qui, tel qu’il se présente, me convient parfaitement. Cela dit on voit mal où serait le problème si Pierre avait voulu, comme vous le dites, « apporter une densité dramatique » à la conclusion de son livre : on… dramatiserait à moins.
    J’irais même jusqu’à dire avec vous que cela le « réconciliait avec lui-même », d’être traité en accusé : si tant est qu’il y a toujours un profond malaise, à être traité avec sympathie, par les représentants d’une société que l’on combat.
    Mais de là à insinuer (et là je ne peux au contraire que m’interroger profondément, sur le sens à peine caché de votre discours) que cela l’aurait un tant soit peu réconcilié, avec ce qui amenait ici l’avocat général Langlois : cela me semblerait peu raisonnable.

  68. Véronique Raffeneau

    @ Luc
    « Me croirez-vous ? Je ne me pose en fait aucune question concernant le sens caché d’un livre qui, tel qu’il se présente, me convient parfaitement. »
    Je ne veux pas laisser votre question sans réponse.
    Je vous crois.
    Mais je ne partage pas votre satisfaction à la lecture du livre de P. Goldman.
    Philippe a raison quand il écrit qu’aujourd’hui concernant P. Goldman les choses se renversent pour atteindre et mettre à jour la part la plus obscure de ce fait divers catastrophique.
    Mais à ceux qui n’ont voulu voir en Pierre Goldman qu’un innocent succèdent ceux qui ne veulent voir en lui qu’un coupable.
    Dans les deux cas une tragédie est utilisée, Pierre Goldman est utilisé.
    Cependant je pense que l’avocat général Langlois avait raison en 1974.
    Voilà.

  69. @Véronique Raffeneau
    En aucune façon je ne vous demande de partager ma satisfaction à la lecture de ce livre, que je tiens pour un grand livre, et que je ne manque jamais de recommander à celles et ceux qui ne le connaissent pas. Mais vous m’obligez ici à citer Lénine, qui disait que « les faits sont têtus » (le reste n’est que… littérature). Or de ce point de vue il n’y a pas de place au doute – et je laisse de côté le fait qu’en droit le doute profite à l’accusé – :
    les hold-up qui valurent à Pierre d’être condamné à la lourde peine de douze ans de prison, là où il n’y avait pas eu effusion de sang, ont été reconnus par lui-même.
    Et on connaît l’auteur du double crime qui lui valu d’être condamné à la prison à vie, au terme d’un procès sorti d’un autre âge.
    Vous poursuivez ici des buts politiques, activistes, en vous abritant derrière le judiciaire et le… littéraire : c’est sur un site politique que je répondrai à vos « déductions », si j’estimais qu’elles en valent la peine. Tel n’est pas le cas, toutefois, et c’est bien volontiers que je vous laisse continuer de vous faire à vous-même les questions et les réponses.

  70. Véronique Raffeneau

    @ Luc
    Alors comme ça, ainsi que vous l’écriviez le 06 août dernier « il n’y a pas de sujet tabou », mais quand on vous lit neuf jours plus tard la culpabilité de Pierre Goldman serait interdite d’expression !
    Cette culpabilité ne peut être qu’une construction littéraire abusive, fruit d’activistes dont on se demande bien ce qu’ils auraient de si important à faire valoir ici, alors que jusqu’à ce billet le nom de Pierre Goldman n’évoquait que quelque chose de très nébuleux que j’aurais eu toutes les difficultés du monde à associer à des faits et à un moment précis de notre histoire collective.
    La brutalité de votre propos nous dit tout des tabous sous lesquels vous vous abritez encore et toujours.
    Je peux comprendre que vous ayez été bouleversé à vie par le livre de Pierre Goldman.
    Je l’ai été.
    Mais en 2005, dans le livre et dans le documentaire de Michaël Prazan – documentaire que j’ai regardé trois fois – Joël Lautric – l’alibi qui structure la défense de Pierre Goldman – dit clairement que Pierre Goldman n’était pas chez lui au moment où deux femmes ont été assassinées boulevard Richard-Lenoir.
    Dans son livre P. Goldman écrit que ce soir-là il était à dix minutes de la pharmacie, qu’il était armé et que son projet était de commettre un hold-up.

  71. Quel dommage que l’auteur du commentaire du 15 août à 11:24 n’ait lu que ce qui l’arrange… Si en effet il est exact que Joël Lautric (qui n’eut rien à voir avec cette activité illégale) a fourni cette précision il en aura également dit suffisamment, par ailleurs.
    Sur un point en revanche, et sur lequel je souhaite insister compte tenu de l’hospitalité qui m’est ici offerte, cette personne a partiellement raison. Ce point concerne ce livre dont Pierre se trouvait placé dans la quasi-obligation de l’écrire mais dont peu, en pareille situation, auraient trouvé la force. Il est exact qu’à sa lecture j’ai été, sinon « bouleversé à vie », sic (je l’ai été, par le sort qui fut le sien, et non, par son livre), du moins, très profondément marqué. Car j’ai compris que je venais de lire un livre qui avait, comme jamais on ne l’avait fait jusque-là, et comme jamais on ne l’a fait par la suite, exposé :
    – comment, en France comme ailleurs, LA JUSTICE NE FAIT JAMAIS QUE JUGER CEUX QUE LA POLICE LUI REMET. Et comment, pour peu que l’accusé fasse partie de ceux auxquels les flics sont bien décidés à « tailler un costard » (j’utilise ici bien sûr à dessein la terminologie-maison…), et pour peu que le relais soit pris par des magistrats qui ne sauraient qu’instruire à charge, alors on en arrive à des insanités, comme ce que fut ce premier procès-farce : quiconque refuserait de me croire sur parole se reportera utilement à la presse d’époque.
    Et c’est bien d’avoir procédé à cette démonstration, qui aura valu à Pierre la haine sans fin du milieu de la magistrature. Car pour ce qui est de la police en revanche, c’était déjà chose faite… Mais cela fait partie des choses sur lesquelles les ouvrages qui de temps à autre tentent de faire l’argent avec le nom de Pierre Goldman, sont vraiment trop discrets.

  72. Je partage votre commentaire et surtout le titre « Un drôle d’innocent ». J’ai toutefois une question à poser au brillant avocat général que vous avez été : ne vous êtes-vous jamais trompé ?
    Cordialement

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