Justice au Singulier

Blog officiel de Philippe Bilger, Magistrat honoraire et Président de l'Institut de la Parole

Une victoire « qui l’oblige »

Cette victoire sans joie est comme le signe d’une France pour laquelle la République n’est plus un acquis mais un trésor menacé à préserver au quotidien.

Delphine Wespiser, une héroïne de la démocratie….

J’éprouve du respect pour cette femme : elle a eu du cran parce que ce qui aurait dû apparaître comme l’évidence d’un choix libre lui a été retourné tel un boomerang par des totalitaires ne supportant qu’une adhésion : celle qu’ils ont décrétée. Elle est vraiment une héroïne de la démocratie. Modeste mais incontestable.

Une démocratie bien propre sur elle ?

Une démocratie propre sur elle n’est pas forcément élégante et respectueuse. Il est clair que le macronisme, réélu, aura encore d’énormes efforts à accomplir sur ce plan.

Il ne l’a pas écrasée, elle n’a pas gagné !

EM ne l’a pas écrasé, elle n’a pas gagné et le premier sera réélu le 24 avril. Il sera ainsi le seul à bénéficier d’une telle victoire hors cohabitation. MLP, abandonnant la joute présidentielle, ne sera plus dans la course en 2027. Après une campagne sans la moindre équité démocratique, elle aura gagné son pari. Mais pour rien. Elle aura effacé 2017, en quelque sorte plus pour son honneur que pour la politique.

Constat accablé avant l’heure…

Emmanuel Macron (EM) sera réélu, j’en fais le pari, et il ne me viendra pas à l’esprit de contester sa légitimité, quelle qu’ait été ma décision finale. En revanche, depuis le 10 avril, je ne peux me défaire du sentiment qu’on n’a pas assisté à une compétition républicaine qui sauvegarderait au moins en principe l’égalité politique et médiatique entre les deux candidats mais à une véritable « chasse à la femme », résumée par le contraste entre le populisme qu’elle incarnerait et la démocratie dont EM serait le dépositaire.

État de droit : un intouchable ?

La sanctification des instances européennes, de leurs « valeurs et principes », n’est pas un devoir républicain parce qu’il n’est pas indécent de les juger bien abstraites et désincarnées par rapport au bruit, à la fureur et à l’insécurité de notre territoire national. Elles donnent parfois l’impression de s’abandonner à un humanisme confortable parce que lointain, qui laissera au tapis les Français et leurs angoisses légitimes.

Marre des maîtres à voter…

Qu’on nous laisse penser seuls. Arbitrer seuls. Face à notre conscience et à notre savoir. À nos désirs. À notre vision de nous-mêmes, de notre pays. Continuer à s’arroger le droit de nous gouverner aurait pour effet le contraire de ce que à quoi toutes ces belles âmes aspirent. Nous ne sommes plus des enfants. La démocratie n’est pas une nursery.

Emmanuel Macron, le roi de la frime…

Il y a quelque chose dans la personnalité de Macron qui n’est pas authentique à hauteur sans doute de son aptitude à plaire, de son obsession de circonvenir pour mieux embrasser. Comme s’il lui était impossible, dans une joute où il va tout faire pour l’emporter, de ne pas « en même temps » feindre de respecter ceux qu’il a battus et celle qu’il s’apprête, croit-il, à dominer.

Ecoeuré !

Parce qu’il y a trop d’abstentionnistes, qu’il y a trop d’extrême gauche, trop d’envie de droite autoritaire et sans coeur, trop de citoyens explicitement ou implicitement en dissidence, en rupture. Ecoeuré parce que la France est trop précieuse pour être ainsi reléguée à cause d’une République confisquée par les uns et déniée aux autres.

Qui ?

Il faut voter pour n’importe quel candidat mais il faut voter. L’abstention dans le meilleur des cas n’est jamais qu’un immobilisme protestataire, dans le pire qu’une indifférence coupable, un souci de ne pas être dérangé dans son quotidien. Quand on dispose d’un tel luxe – une démocratie imparfaite sans doute mais incontestable -, on ne fait pas la fine bouche devant les droits qu’elle donne, les devoirs qu’elle impose. Bonheur d’être citoyen et d’avoir mis sa petite pierre dans le champ républicain. Qui, le 10 avril au soir ?

Nicolas Sarkozy : Valérie Pécresse est masochiste…

Le parti LR ainsi que la candidate victorieuse au Congrès, sont profondément masochistes puisqu’ils ont éprouvé le besoin de rendre des hommages indus à Nicolas Sarkozy pour lui faire oublier l’affront de ces manifestations hostiles. C’est un comble alors que, si on sentait le risque de coups fourrés, on n’osait pas penser qu’il pousserait la provocation jusqu’à obstinément se taire publiquement, tout en la « débinant » en privé.

Attention aux Français !

Jean-Luc Mélenchon a raison : tout est possible. Même de voir le quasiment réélu mordre la poussière démocratique. Oui, attention aux Français !

Eric Zemmour finit-il par lasser ?

La campagne peut encore être inventive mais le sort d’EZ pour le second tour semble scellé. MLP ne sera pas aussi largement battue qu’en 2017, même si le plafond de verre s’est beaucoup ébréché et que la gauche n’est plus disposée à jouer le pompier républicain de service. Et si on rêvait d’une Valérie Pécresse déjouant tous les pronostics et présente au second tour, empêchant la réélection du sortant ?