Justice au Singulier

Blog officiel de Philippe Bilger, Magistrat honoraire et Président de l'Institut de la Parole

Obscur pour le pouvoir mais clair pour le citoyen !

Je ne suis pas suffisamment compétent pour contredire les spécialistes qui en grande majorité prévoient une catastrophe financière, économique et sociale. En revanche sur le plan régalien, je dois constater que les préoccupations fondamentales des Français seront au mieux négligées, au pire méprisées. Dans le programme du NFP sur ce plan, seules les violences policières sont ciblées. Immigration, justice, autorité, identité, ordre, soutien aux forces de l’ordre, impartialité des instances de décision, autant de problématiques et d’exigences dont je crains qu’elles ne soient laissées à l’abandon puisque, contrairement à ce qu’elles prétendent, gauche et extrême gauche en sont encore restées à cette double aberration : la société est coupable et il faut plutôt comprendre les transgresseurs que les sanctionner. Le Syndicat de la magistrature et le NFP, même combat, même politique !

Juste avant l’inconnu…

Si la machine médiatique et politique anti-RN a rempli sa fonction, aidée aussi par les variations et fluctuations du couple Marine Le Pen-Jordan Bardella aussi bien dans le fond que dans la forme, il n’en demeure pas moins qu’au regard de ce qui paraît se dessiner pour le 7 juillet, une part substantielle de la France de droite, conservatrice, pourra avoir le sentiment de s’être fait voler la plénitude de sa victoire parce que les arrangements ont été préférés à la transparence de la démocratie. Que le peuple aura été grondé pour n’avoir pas été discipliné et qu’on aura tout fait pour redresser la barre.

Lire, est-ce vivre ?

Le livre est un formidable gain de temps. Il ne nous dispense évidemment pas d’appréhender le cours de notre destin et d’affronter concrètement, physiquement, les aléas, les hasards auxquels il va nous confronter. La lecture ne nous détourne pas de vivre mais, par exemple quand on plonge dans la géniale Recherche du Temps perdu, elle nous offre un extraordinaire tableau de « la vie réellement vécue » avant que nous appréhendions, ainsi lestés, de manière tangible sa réalité. La lecture nous prépare à partager l’humanité des autres ou nous fait mieux comprendre la nôtre. Lire, c’est vivre, lire, c’est agir.

Tous fous à lier… sauf le peuple !

Je ne parle pas des tribunes, des collectifs, des groupuscules, des cénacles inconnus mais ne gagnant pas à être connus, des associations et des clans militants se ruant dans l’espace médiatique pour exprimer – c’est original ! – leur hostilité à l’encontre du RN. Je n’aurai garde d’oublier les artistes qui ont toujours estimé qu’ils étaient programmés pour n’être pas seulement sur la scène ou sur les écrans mais dans nos têtes trop futiles pour comprendre. À considérer l’ensemble de ces folies à lier – ces minorités sortant de leur rôle et nous dictant avec arrogance notre conduite civique -, on ne peut qu’être effrayé par une démocratie qui se délite et demeure pourtant, dans ses hautes sphères, fière d’elle. Des millions d’électeurs par ce matraquage hémiplégique sont rejetés dans les coulisses de la République. Tous ces citoyens auxquels j’ai rendu hommage vont voter le 7 juillet et je parie qu’ils feront comme bon leur semble et ce sera tant mieux.

La Macronie : sauver sa peau ou être digne ?

Surtout, qu’on vienne nous expliquer, au lieu de ressasser « les valeurs de la République » contre le RN, alors que beaucoup reconnaissent avec bonne foi qu’il a changé, pourquoi il conviendrait que nous acceptions cette alliance contre-nature entre une macronie molle et une extrême gauche qui refuse les exigences d’un peuple attaché à la sécurité, à la Justice, à l’autorité et aux forces de l’ordre.

La gauche est-elle propriétaire de la culture ?

Court, en filigrane, ce refrain condescendant que la gauche est propriétaire de la culture, que le simple fait, pour l’extrême droite, de venir s’en mêler serait une usurpation et qu’il s’agit d’activités trop nobles et élevées pour être confiées à ces « ploucs ». À suivre à la lettre cette pente, on a le droit, voire le devoir, de se demander alors si la droite et, peut-être, son extrême droite ne devraient pas chercher à créer un art pour le peuple, une culture accessible à tous, dans le genre qu’affectionnait Jean Vilar – un élitisme populaire -, évidemment aux antipodes de quelque endoctrinement que ce soit.

Flash-back sur une dissolution désinvolte…

Tout ce qui est normal, comme l’expression d’une opinion et d’un bon sens partagés par beaucoup, est radicalement étranger au Président. J’étonne et je déroute donc je suis. Ainsi cette dissolution survenant comme un bouleversement absolu sur tous les plans et tétanisant même ses soutiens les plus inconditionnels, a-t-elle procuré à Emmanuel Macron ce dont il raffole le plus : stupéfier son entourage, reprendre la main fût-ce par une absurdité tactique.

Contre le RN : les incendiaires de luxe ou bas de gamme…

Cette troupe qui surgit, individuellement ou en masse, dans les temps de crise effervescents, est composée de ceux que je nomme les incendiaires bas de gamme. Ils jettent leur huile sur un feu dont on finit par se demander s’il ne les réjouit pas. Mais il y a aussi des incendiaires de luxe qui, certains de leur importance, emblèmes médiatiques contestables mais perçus irremplaçables, projettent sur une réalité qu’ils divisent, les lumières pour leur camp, les ombres contre le RN, un soufre dévastateur.

Il faut diminuer les droits de la défense !

Alors que pour les nations, et au premier plan la France, les exigences de sécurité, d’identité, d’autorité et de justice sont devenues dominantes et que l’aspiration à la tranquillité publique, à la sauvegarde des personnes et des biens est essentielle pour tous, c’est le moment que choisissent des instances déconnectées du bruit, de la fureur et de la violence de nos pays pour élaborer des règles dont la finalité faussement humaniste est de rendre encore plus difficile, voire impossible, la mission de nos forces de l’ordre.

Le président : génial ou insensé ?

Le mélange d’un mandat profondément bousculé, d’un président à la personnalité décriée, en tout cas questionnée, d’un entourage sans allure, d’une Assemblée nationale peut-être ingouvernable, d’un État dans l’angoisse de ce qui l’attend, de sondages qui, tous, placent la majorité présidentielle derrière le NFP et surtout le RN associé à Éric Ciotti, crée un crépuscule républicain, une démocratie délétère, morose, un paysage présidentiel informe et inédit.

Emmanuel Macron paie la note…

Je ne peux m’empêcher d’être troublé par cette atmosphère d’apocalypse depuis le soir du 9 juin, par ce climat shakespearien où, d’un coup, un vent de désastre soufflait, où Jupiter égaré, incertain, disposé à la politique du pire, au pire de la politique, avait perdu de sa superbe, devenait, en tout cas à mes yeux, presque pitoyable. Comme une sorte de roi Lear sur sa lande élyséenne. Comme s’il avait fallu ces intenses et dramatiques péripéties politiques pour que, enfin, il se dégonflât de lui-même, étonné de n’être plus qu’un président ordinaire, conscient d’un futur qui allait rétrécir encore davantage son champ d’action.

Gagner dans les urnes, perdre dans la rue…

Ce deux poids deux mesures l’accable systématiquement, quand l’alliance précipitée de la gauche avec l’extrême gauche accusée d’antisémitisme depuis le 7 octobre et de complaisance avec le Hamas n’est jamais stigmatisée, pas plus que certaines investitures étranges ou sulfureuses données par LFI ou le scandale du programme du NFP mettant à bas, avec radicalité, tout ce qu’un macronisme déjà guère fiable avait mis en oeuvre sur le plan économique, social et régalien.

Qui est moral dans la politique française ?

Cette absence de morale aujourd’hui est explicable par des ambitions personnelles ou par le lassant refrain, à gauche, que tout est permis contre l’extrême droite, y compris le pire. Quand on constate le projet sur lequel le NFP s’est accordé en quatre nuits, on est effaré par le désastre qui en résulterait sur les plans économique, financier et régalien : la seule obsession étant de lutter « contre les violences policières ». On supprime tout ce qui était de nature à assurer la sûreté publique et à lutter, même imparfaitement, contre la délinquance et la criminalité. Seule ennemie : la police.