Justice au Singulier

Blog officiel de Philippe Bilger, Magistrat honoraire et Président de l'Institut de la Parole

Zineb et Steve : deux fautes du pouvoir ?

On a des ministres qui tels des perroquets zélés jouent les donneurs de leçons auprès de Nadine Morano et reçoivent en retour ce qu’ils méritent mais pas un seul – et je n’évoque pas seulement Christophe Castaner – ne lève le petit doigt éthique et politique pour rappeler que l’état de droit n’est pas un pur formalisme qui consacre l’impuissance mais se devrait d’être une honorable machine de guerre au service de la vérité, quelle qu’elle soit.

Encore Nadine Morano : c’est vrai ou c’est raciste ?

Cette polémique à la fois dérisoire mais éclairante, bien significative de notre actualité où des imparfaits prétendent s’ériger en juges et en censeurs d’une imparfaite, m’apparaît centrale en raison de la question suivante : ce avec quoi on n’est pas d’accord et qui demeure encore dans une conception heureusement extensive de la liberté doit-il être forcément vilipendé, voire, demain, condamné ?

Le président Macron devrait lire l’écrivain Mari !

Le président Macron aurait dû lire l’écrivain Mari. Peut-être le fera-t-il ? Il n’est jamais trop tard pour que la voix d’une formidable et libre irresponsabilité – tenue par rien, elle voit juste et loin – donne des leçons à un pouvoir qui en aurait eu bien besoin et devrait s’en inspirer pour son avenir de trois ans.

Ai-je été un lyncheur ?

Aussi je ne crois pas avoir été un lyncheur. Mais je ne voudrais pas hurler avec les loups, n’être pas capable d’attendre, ne pas plonger avec volupté dans la présomption de culpabilité des politiques. Je voudrais ne pas appeler à des démissions contrairement à ce dont je rêve : être un citoyen qui ne soit ni un Fouquier Tinville ni un juge. Mais un honnête homme capable de comprendre et de blâmer. Mais sans tomber alors dans un sale lynchage.

Hervé Temime est même bon après !

Pourquoi suis-je ces derniers mois si sensible au talent et à la personnalité de quelques avocats qui peuvent être par ailleurs des amis ? Je songe notamment à Jean-Yves Le Borgne, Pierre Haïk et Jacqueline Laffont, Frank Berton et aujourd’hui Hervé Temime. Parce qu’ils se distinguent à tous points de vue de la masse du barreau et qu’ayant quitté la magistrature, je connais moins bien celle-ci. Si je tente de la défendre autant qu’elle le mérite, il est clair cependant qu’elle m’offre moins d’opportunités de billets élogieux.

Le président doit-il encore ouvrir la bouche ?

Et le syndicalisme ? Le droit de grève ? Celui-ci est une conquête sociale et même si nous sommes dans un pays où il faut toujours donner l’impression qu’on a arraché à l’Etat ce que ce dernier vous aurait octroyé tôt ou tard, il serait abusif de mettre en cause cette épée de Damoclès qui menace et parfois convainc. Mais ne pourrait-on pas purger ces luttes de ce qui les rend intolérables : elles sont subies par des usagers pour lesquels on prétend combattre. Par des lycéens pour lesquels on affirme lutter mais qui sont les premières victimes. A constater le degré de mauvaise foi de notre République, on a le droit de s’interroger : le président doit-il encore ouvrir la bouche ?

Peut-on encore sauver certains métiers du naufrage ?

Privés de l’estime publique pour toujours alors, sans rémission ? Pour remonter la pente, une oeuvre de longue haleine en tout cas qui exigera d’abord de ces métiers, pour les sauver du naufrage, un sursaut commun.

Général de Villiers : une redite

Certes le général de Villiers campe sur la même ligne mais une redite n’est pas grave si elle enfonce dans la tête d’un pays ce qui lui manque. Ce dont il aurait besoin.