Le Figaro consacre une série passionnante à Antoine Blondin (AB) et la plume de Bertrand de Saint Vincent est si brillante qu’elle semble celle de l’auteur du Singe en hiver lui-même.
AB, derrière son style éblouissant, ses mots d’esprit et ses calembours subtils, offre une véritable philosophie de la vie, qui me touche parce qu’elle peut se dispenser de toute une part agaçante tenant à la bimbeloterie des Hussards même si leurs appétences, telles que décrites par Bernard Frank – les femmes, les voitures, la vitesse, l’alcool, la plaisanterie – peuvent n’être pas récusées en bloc.
Mais j’avoue avoir été frappé en plein coeur quand AB, écrivant sur Roger Nimier, l’ami, le frère avec lequel, durant treize ans, il a été en complicité constante, lui reconnaissait « l’art de ne pas faire de la vie quotidienne une vie de tous les jours ».
Il y a là comme une réponse aussi au poète Jules Lafforgue se plaignant : »Ah! que la vie est quotidienne »!
Pour AB, c’est tout à fait cela, cette envie qui tenaille non pas forcément d’un exotisme superficiel mais d’une existence vous offrant un mouvement perpétuel à partir du plus simple, une révolution constante fondée sur la métamorphose de l’ordinaire en aventure intime.
J’ai tenté maladroitement d’exprimer cette aspiration quand je soutenais, contre beaucoup d’avis négatifs, que la passion n’était pas forcément provisoire, intense mais limitée. Elle pouvait au contraire apporter à l’amour sa flamme, son refus de la coulée trop paisible du temps, son incandescence et cette fabuleuse épopée quotidienne d’une histoire ni tout à fait la même ni tout à fait une autre… Maintenir la passion dans l’amour, c’est comme passer sans cesse la cinquième vitesse de la vie…
Je comprends si bien cette pensée d’AB, qui à tout âge nous incite à ne pas nous laisser enliser dans le cours des jours mais de nous révolter dès que le médiocre visage de l’acquis, de l’habitude et de cette tranquillité prise trop souvent pour une chance alors qu’elle est mortifère, se pointe.
Ce quotidien devenant insupportable s’il se confond avec la vie de tous les jours ne sort de sa triste routine que si l’exaltation, le romantisme, l’excès, l’enthousiasme, les extrémités du coeur et de l’esprit, la stimulante angoisse de n’être pas assez aimé, l’envie de ne jamais céder un pouce à la monotonie du repos de l’âme, l’irriguent. Tenter de faire de son existence au moins un poème en prose…
Je devine comme cette obligation d’effervescence peut être considérée avec condescendance, avec une sorte d’ironie supérieure par ce qu’il est convenu d’appeler l’âge adulte. Pourtant je la crois infiniment positive à quelque moment d’une destinée que ce soit, elle n’est pas ridicule sur le tard et en tout cas la jeunesse qui s’en prive manquera de l’essentiel.
Nul besoin de partir loin, de boire comme un trou, de s’y connaître en voitures ou de se moquer d’autrui pour toucher cet idéal que Nimier, selon AB, a atteint. Au contraire, il m’est toujours apparu que rien n’était plus conformiste que les pratiques ostentatoires, narcissiquement singulières, où qu’elles se placent et quoi qu’elles concernent.
La leçon d’AB nous murmure, presque de manière fraternelle – lui qui savait admirer les vrais maîtres – qu’il y a des révolutions et des voyages se déroulant dans le champ clos de soi, en mettant le feu aux idées, aux sentiments, aux matins et aux soirs.
Deux de choses l’une, soit j’ai oublié l’existence de M. Antoine Blondin, soit je n’avais jamais entendu parler de cet écrivain germanopratin. Une brève lecture de la page Wikipédia, une deuxième lecture du texte de M. Bilger et la photographie de la séance de signature me confirment que je suis passé complètement à côté du mouvement intellectuel des hussards.
Messieurs Blondin et Nimier n’étaient pas au programme de français de l’Education nationale, ensuite il a fallu travailler pour gagner ma vie et les journées étaient trop courtes pour aller faire la révolution.
Une vie passe vite, c’est trente mille jours environ. C’est le réveil, le café qui refroidit, que l’on oublie parce qu’il faut partir pour ne pas rater le train de 7h23. Le soir est déjà là, le café est intact sauf qu’il est froid.
J’aurais pu avoir comme modèle M. Blondin, mais cela ne s’est pas fait. Peu importe, la vie est faite de répétitions, de bonheurs fugaces petits ou grands ; mais les défis personnels, les objectifs à courts, moyens ou longs termes valent le coup d’être relevés.
Dans la vie, il y a les gens qui regardent par la fenêtre en préférant rester dans leur zone de confort et puis il existe une autre catégorie qui pousse la porte et va voir ailleurs, encore plus loin, toujours plus loin… ailleurs.
L’essentiel n’est pas de ne pas boire comme un trou. Il est, exercice délicat lorsqu’on aime l’alcool, de savoir se tenir.
Les vacances vous réussissent.
@ Herman Kerhost
« L’essentiel n’est pas de ne pas boire comme un trou. Il est, exercice délicat lorsqu’on aime l’alcool, de savoir se tenir. »
Autrement dit, la cuite triste et le vin mesquin.
Si la manière de faire la corrida est propre à chacun, amusant de commenter un article sur un tel sujet en se plaçant dans le rôle de celui qui se proclame « encore capable de tenir le litre sans se prendre pour Dieu le Père ».
Une bien agréable leçon de philosophie sur l’art de vivre, en conservant un enthousiasme juvénile, si tant est que l’enthousiasme et le goût de la vie soient des privilèges de la jeunesse.
Ils sont surtout un état d’esprit. Relève-t-il de l’acquis ou de l’inné ? Difficile de le dire.
Certains sont heureux de naissance et d’autres malheureux depuis toujours, indépendamment des conditions matérielles.
Jacques Brel avait résumé cette philosophie, en amour, avec la merveilleuse chanson des « Vieux Amants » dont il convient de retenir les vers suivants :
« Finalement, finalement
Il nous fallut bien du talent
Pour être vieux sans être adultes »
https://www.youtube.com/watch?v=dU-OD5_Dxrs
@ Vamonos
Nous sommes encore nombreux à être passés par ce tunnel du travail long de dix heures où rien ne pouvait pousser hormis les soucis professionnels, les remontrances données et reçues, et une immense lassitude sous la douche vespérale. Qui avait le temps d’entrer dans un roman ?
Les sœurs Semtob seraient encore parmi nous qu’elles rappelleraient au romantisme adolescent de notre hôte les mannes de Denis de Rougemont :
« Le désir triangulaire est un. On part de Don Quichotte et l’on aboutit à Pavel Pavlovitch. Ou l’on part de Tristan et Iseult, comme le fait Denis de Rougemont dans L’Amour et l’Occident, et l’on aboutit bien vite à cette « psychologie de la jalousie qui envahit nos analyses ». En définissant cette psychologie comme une « profanation du mythe » qui s’incarne dans le poème de Tristan, Rougemont reconnaît, explicitement, le lien qui unit les formes les plus « nobles » de la passion à la jalousie morbide, telle que nous la décrivent un Proust et un Dostoïevski : « Jalousie désirée, provoquée, sournoisement favorisée », observe très justement Rougemont : « On en vient à désirer que l’être aimé soit infidèle, pour qu’on puisse de nouveau le poursuivre et “ressentir l’amour en soi” ».
On n’aimera passionnément que ce qui nous échappe, et le rival ennemi, selon Proust, est notre bienfaiteur, car il ravive les flammes de la passion :
« La passion romantique est donc exactement l’inverse de ce qu’elle prétend être. Elle n’est pas abandon à l’Autre mais guerre implacable que se font deux vanités rivales. L’amour égoïste de Tristan et Iseult, premiers héros romantiques, annonce un avenir de discorde. Denis de Rougemont analyse le mythe avec une rigueur extrême et parvient à la vérité que cache le poète : la vérité des romanciers. Tristan et Iseult « s’entr’aiment, mais chacun n’aime l’autre qu’à partir de soi, non de l’autre. Leur malheur prend ainsi sa source dans une fausse réciprocité, masque d’un double narcissisme. À tel point qu’à certains moments, on sent percer dans l’excès de leur passion une espèce de haine de l’aimé » . »
Mensonge romantique et vérité romanesque, René Girard.
C’est effectivement à se perdre à la hussarde quand on se rend compte que soi n’est qu’un miroir de l’autre, que, sans modèle divin, les hommes deviennent des dieux les uns pour les autres, que les brûlures de la passion permettent d’accéder à la révélation de l’infini.
https://journals.openedition.org/edl/1880#tocto1n2
https://www.unige.ch/rougemont/medias/paroles-damis-et-dexperts/henri-guillemin-parle-de-lamour-et-loccident-1968-2
@ Marcel | 19 août 2022 à 08:24
« Autrement dit, la cuite triste et le vin mesquin. »
Non, vous vous trompez. Pas du tout. Chacun son style, dans la tenue. Le poivrot qui titube peut aussi avoir de l’allure. C’est dans la tristesse que ça déraille souvent…
« Le goût de la nuit où les différences s’estompent, où les conflits se résolvent dans l’anonymat des bistrots… La nuit ce n’est pas seulement la rue, la marche dans le noir, la fuite devant la panique d’avoir à ranger sa vie dans une boîte, ne serait-ce que durant quelques heures (ah ! la vie rangée…), c’est aussi la lumière de rencontres, les sociétés soudaines qui s’improvisent autour des comptoirs… » (Alcools de nuit)
Un grand philosophe, Antoine Blondin.
Joli marronnier de l’été que nous offre Philippe Bilger en ce mois d’août caniculaire.
Voilà qui devrait apaiser, au moins pour un temps, les esprits échauffés de ce blog.
D’Antoine Blondin je ne connais pas grand-chose. J’ai regardé, comme sans doute tout le monde ici, le film d’Henri Verneuil « Un singe en hiver » avec les deux monstres sacrés du cinéma des années soixante, Jean Gabin et J-P Belmondo et ça s’arrête là.
Je sais aussi que c’était un fan de cyclisme et qu’il avait tendance à se laisser aller à la boisson.
Mais les écrivains et artistes alcooliques sont loin d’être des exceptions. Ernest Hemingway, Serge Gainsbourg et quelques autres étaient de vrais pochtrons et ils nous ont laissé des œuvres admirables dont l’inspiration provenait souvent de l’alcool…
Un bien beau billet.
Cher Philippe Bilger,
En cette mi-août, décidément votre plume, reflet d’une âme en effervescence, se veut résolument romantique.
Elle s’élève vers le ciel de tous les possibles ; elle atteint – pardon de me répéter – des sommets enivrants et régénérants ; elle retrouve une fraîche jeunesse : probablement l’air d’Annecy et de son lac, ou celui du Bourget où le temps reste suspendu.
Je ne peux que vous rejoindre sur les pratiques ostentatoires et narcissiques qui permettraient de se sublimer.
Elles se manifestent notamment par la mise en scène continue de sa personne et de sa progéniture : pas un plongeon dans la piscine sans que le parent ne filme la scène, pas un col atteint à bicyclette sans l’obligatoire selfie diffusé immédiatement sur les réseaux sociaux (devenu désormais déversoir de son pipicacadodo).
À ces pratiques, j’ajouterai le bruit, élément indispensable pour combler le vide d’une réflexion tarie par 40 années de déculturation : pas un joggeur sans oreillettes, pas une simple fête de village sans basses assourdissantes. Et même plus une cathédrale sans musique religieuse de fond.
Dans ces conditions, comment voulez-vous que l’âme exulte ?
Bien à vous.
P.-S.: je déplore une fois encore l’organisation des commentaires de ce blog, qui fait la part trop belle aux commentaires sur les commentaires, décourageant le lecteur de lire ceux qui concernent directement votre propos, qui est après tout le sujet qui nous intéresse. L’organisation des commentaires du Figaro (où l’on peut d’un clic consulter les réactions à un commentaire) me semble plus rationnelle.
« Antoine Blondin, derrière son style éblouissant, ses mots d’esprit et ses calembours subtils, offre une véritable philosophie de la vie… » (PB)
Un de mes amis octogénaire l’a très bien connu durant plus de trente ans alors qu’AB habitait Quai Voltaire.
Il a rassemblé en une vingtaine de pages ses souvenirs de beuverie et d’amitié avec lui sans oublier ses aphorismes talentueux:
Au journaliste Michel Droit qu’il croise au stade de Colombes : « Alors, con : toujours aussi droit ? »
Et à son ami Albert Vidalie lui annonçant qu’il venait de subir une gastrectomie : « De toute façon, t’as jamais eu d’estomac ! »
Un autre également amusant: dans une carte postale de Mont-de-Marsan où Antoine faisait la fête en compagnie des frères Boniface « Je viendrais bien te voir si je n’étais hélas retenu par mes Basques. »
Blondin, un homme qu’on regrette de ne pas avoir connu !
Je ne devrais pas intervenir sur ce billet, et je dirais même mieux, je devrais me taire…
Pourtant, ce que j’ai à déclarer n’est pas inintéressant, enfin, pas aussi inintéressant qu’il n’y paraît…
Avant tout, je dois dire que je n’ai pas lu Blondin, je peux donc en dire le meilleur, et pour ce faire je vais m’appuyer sur l’extrait donné par Giuseppe.
« Le goût de la nuit où les différences s’estompent, où les conflits se résolvent dans l’anonymat des bistrots… La nuit ce n’est pas seulement la rue, la marche dans le noir, la fuite devant la panique d’avoir à ranger sa vie dans une boîte, ne serait-ce que durant quelques heures (ah ! la vie rangée…), c’est aussi la lumière de rencontres, les sociétés soudaines qui s’improvisent autour des comptoirs… » (Alcools de nuit)
Il faut sortir du couvent des oiseaux pour gober une ânerie selon laquelle « les conflits se résolvent dans l’anonymat des bistrots », quel mensonge éhonté !
La nuit, dans les bistrots, se regroupent les plus égarés des êtres, ils sont égarés mais aussi remplis d’amertume.
Malgré la vinasse, l’alcool, la couleur verte de l’absinthe, oui malgré ce vert scintillant et tendre, malgré le noir de la nuit, malgré tout, reste collé à leur derrière ce chien galeux, oui, leur désespoir, il est là présent, le sourire aux lèvres pendantes et écumeuses, comme le nez au milieu de la figure !
La nuit, dans les bistrots, les odeurs âcres pénètrent dans les narines et brûlent ce qui reste de dignité, de respect de soi.
La nuit alcoolisée, dans les bistrots, la vue se trouble avant même d’avoir assez bu, elle se trouble pour permettre à l’homoncule dans son froc trop large, et à la pétasse dans sa robe trop étroite, de sourire à l’inconnu dont la splendeur n’a d’égal que l’ignoble mensonge qu’est sa vie.
Cet inconnu de la nuit, lorsque l’alcool aura fait son œuvre, prendra l’apparence du beau et du pur, mais oui du beau et du pur !
Ce beau et ce pur sans existence, va permettre de hurler toute sa haine à la tête de celui inquiet qui est resté dans le lit froid, les yeux grands ouverts sur le vide, imaginant dans les ombres du plafond tous les accidents affreux que l’autre là-bas, avec ses amis de bamboche, couvre du rire bruyant de l’insensible et suintant ego !
Il va, l’égaré, chercher ailleurs, dans le dérangement de la nuit, qui elle aussi est bien rangée, sans qu’il le sache, sa vengeance… Il se venge de l’autre, et il veut une chose contraire à son désir, une chose que cet autre ne peut porter, ni voir, ni aimer, ni pardonner.
La nuit, dans les bistrots, il y a des alcoolos, des soûlots, des boit-sans-soif…
Celui que j’ai entendu cette nuit au bord de la mer disait dans la langue pâteuse, de sa voix de théâtre :
– Vas-y Patrick ! Pète-lui la gueule à cette salope !
Elle est où ? Elle est où ? Connaaaaassse ! Viens ici !
Vas-y Patrick ! Elle est derrière la bagnole !
Viens ici, ch’te dis ! Viens ici, putain que je t’écrive sur la figure un poème !
La nuit, c’est comme le jour, il suffit d’ouvrir les yeux pour le voir !
Buvons le jour ! Pour qu’il soit le témoin de nos faiblesses, pour qu’à cette lumière pure on ne puisse pas se cacher la vérité sur nous-même…
D’ailleurs, pendant ma partie de manivelles, je pensais que je ne pourrais que conseiller à notre imposteur national – Malraux raté – de relire Antoine Blondin.
Les récits de notre philosophe mondain et creux, ses positions, ses pensées, auraient au moins l’odeur de la poussière, de la gorge sèche, de la vérité, et non pas celle des hôtels pour philosophe de pacotille, sous effluves artificielles au travers de diffuseurs dans des pièces ouatées.
Il se reconnaîtra notre psittaciste qu’il est devenu, à force de fouler les tapis et soirées loin de tout, loin du vrai, mais très loin.
Combien Blondin aurait apprécié de rencontrer Patrice Charoulet !
Du vice, oui, mais de la tenue…
@ caroff
On disait aussi de lui que c’était le seul homme qui soufflait sur son gâteau d’anniversaire pour allumer les bougies…
@ duvent
Mieux que Blondin !
@ duvent 19 août 14h01
Madame,
Vous déclarez ne pas être mon amie. Je vous ai répondu que je vous estimais. Mon estime ne cesse pas. Dans ce nouveau texte, vous dites notamment avoir entendu la nuit d’avant ceci :
« Vas-y Patrick ! Pète-lui la gueule à cette salope !
Elle est où ? Elle est où ? Connaaaaassse ! Viens ici !
Vas-y Patrick ! Elle est derrière la bagnole !
Viens ici, ch’te dis ! Viens ici, putain que je t’écrive sur la figure un poème ! »
Vous conjecturez que ces propos ont été tenus sous l’empire d’une boisson alcoolisée.
Seul, triste et pitoyable buveur d’eau de ce blog, en butte à des plaisanteries périodiques d’une vingtaine de confrères, compte non tenu de tous ceux qui n’ont rien dit mais n’en pensent pas moins, je trouve bien téméraire votre supposition. Je reconnais tout à fait ce que je pourrais dire, un soir de colère, après avoir ingurgité follement mon litron d’eau de source de montagne. J’ajoute que l’humanité dont il s’agit me paraît être du meilleur monde, celui dont je raffole.
C’est vraiment le mois d’août ici, et en noir et blanc, un pochtron devenu idole des bons mots et des courses cyclistes, le sport le plus nul après le foot. Misère.
On ne compte plus en France le nombre de sommités totalement inconnues à une heure de vol de Paris.
Cessons de nous regarder le nombril.
Voyez Jean Anouilh qui avec ses pièces de théâtre a fait le tour du monde, Peter O’Toole, Richard Burton ont interprété ses pièces, on nous sert aujourd’hui un plat refroidi d’un demi-sel de bistrot. Parlez-en à vos enfants, moi pas connaître…
L’alcool est un peu comme le philtre que boit le héros dans L’étrange cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde : il révèle.
Pas toujours, mais souvent… Il décèle si quelqu’un a une nature addictive : dans ce cas, mieux vaut s’abstenir. Il montre sinon, quelque chose de quelqu’un : agressivité, maîtrise, rêve, fraternité, car on parle d’agressivité, mais certains sont amis de tout le monde après avoir bu.
Meilleurs que dans la vie courante.
Ces aspects ont été bien mis en valeur par Chaplin dans Les Lumières de la ville. Notre héros sauve le dépressif et fêtard d’un suicide, il est donc invité, et il peut envisager de lui demander de l’argent pour rendre la vue à l’aveugle qu’il aime.
Hélas ! Sobre, il ne le reconnaît pas plus qu’il ne se montre généreux ! L’un des ressorts comique et tragique du film tient dans ce contraste. Mais comme on est dans Charlot, happy end.
Par parenthèse, on peut remercier les créateurs nous en offrant, surtout quand cette issue n’est pas trop tirée par les cheveux.
Hélas ! Certains croient qu’il en va de même dans la vie… Je soupçonne que la Providence et autres idées finalistes sont la transposition dans la religion de ce qui a plu dans la fiction.
La fiction, c’est toujours une histoire comme si, même si elle ne s’énonce pas ainsi. Elle ouvre l’esprit quand la religion le ferme par la répétition des rites et des dogmes. Le conte suspend l’incrédulité, la religion commet des attentats, l’une ouvre à la liberté, l’autre est si liberticide qu’il faut la surveiller comme le lait sur le feu sauf qu’elle ne nourrit que de mirages empoisonnés.
Et le vin, lui, ne raconte pas votre histoire, il montre celle de la terre, du ciel et des Hommes, et peut vous exposer si vous n’avez pas la maîtrise de ses débordements.
Il est entre la religion et l’histoire : il peut libérer, il peut enchaîner, cela dépend de la nature de chaque personne et de son usage de la boisson. Certaines religions l’ont promu car pouvant mettre en transe, il est lié au sacré, d’autres l’ont interdit pour la même raison.
Cela se voit aussi dans des débats plus laïcs… Moi, sans surprise, je suis pour la liberté, et de laisser boire, et de ne pas y pousser celui à qui cela ne dit rien. Position ô combien cohérente ! Ni pour la nourriture, ni pour le sexe, et rien d’autre ne me vient à l’esprit pour l’heure, je ne vois pas pourquoi interdire ou obliger quelqu’un tant qu’il ne s’en prend pas à la liberté des autres.
Le vin ne raconte pas d’histoire, mais il inspire des histoires : les conteurs seraient souvent bien malheureux sans lui ! Que ces ingrats de prohibitionnistes y pensent avant de l’interdire. Mais il n’y a pas que des conteurs, dans la vie, et des auditeurs, tout le monde peut se faire sa sphère de rêve par un livre, mais aussi par la musique, l’alcool et autres choses semblables.
Interdire l’alcool comme d’ailleurs on l’a fait pour l’opium pas plus dangereux, mais passons, c’est rétrécir l’horizon du rêve possible. Combien de rêves assassinés ? Impossible de le savoir, mais sans doute plus que de vagues dans l’océan.
Ci-gît les rêves du monde.
Il me semble, mais on me corrigera, que Madame Simone disait, dans une émission brillante de radio, quelque chose comme: « Les génies maudits ne le sont pas parce qu’ils sont maudits mais parce qu’ils sont géniaux ». On peut remplacer génies par comédiens ou artistes.
Ceux qui ont quelque chose qui les pousse à s’utiliser d’une certaine façon, par déformation progressive, soit par le succès qu’ils rencontrent sous cet habillage, soit encore par désintérêt envers le « pecus », ou autres choses, arrivent à faire passer une attitude banale ou déviante pour un comportement ayant du sens. Le calembour ou la saillie sont le masque, du moins le pensè-je, de ce qu’ils dédaignent de développer.
Il me revient à l’esprit un article où Madame Sagan disait qu’elle possédait une Jaguar qu’elle aimait conduire pieds nus. Ça n’a aucun sens, c’est très dangereux pour les autres et les six ou douze cylindres ne ronronnent pas dans les arpions. Mais ça pose.
En revanche, la provocation littéraire, culturelle proprement dite, a une portée autre, sur un éventail polychrome. Du dernier livre de Virginie Despentes, « Cher connard », qu’on analyse pour l’instant en un torrent de fadaises de l’hyperconformisme pseudo-révolutionnaire, et dont j’ai lu quelques morceaux choisis, qui ne fait pas partie de la désinvolture d’un Blondin, mais de la pesante langueur d’un congrès du parti communiste chinois, « debout » « assis » « silence » « applaudir » mais à la sauce « la mienne est plus grosse que la tienne », jusqu’à l’élégant envol (oui, je le reconnais, la phrase est longue et complexe, mais je n’ai pas de génie) de Madame Simone qui révèle des dessous sobres sous un jupon affriolant.
@ genau
« Du dernier livre de Virginie Despentes, « Cher connard », qu’on analyse pour l’instant en un torrent de fadaises de l’hyperconformisme pseudo-révolutionnaire. »
Je ne vois pas le conformisme chez Virginie Despentes. Et elle n’est pas plus révolutionnaire que le gauchiste français typique.
Ses ouvrages remplissent la fonction qu’elle s’est assignée. Elle mérite sa place en tant qu’écrivaine.
Un auteur n’est pas mauvais du simple fait qu’il vous déplaît.
Ce que je ne comprends par contre pas, c’est pourquoi nous idolâtrons les écrivains ainsi, en France. Pourquoi nous suivons et disséquons leurs moindres faits et gestes comme s’ils étaient président de la République.
Ah les Hussards, une troupe de drouache (comme dit l’autre) qui n’est jamais rentrée dans mon petit théâtre, des gens qui n’ont pas compris grand-chose à l’avant-guerre… pas plus qu’à l’après-guerre. Un moment en creux dans l’espace littéraire français qui déboucha sur le « nouveau roman »… c’est dire !
Aujourd’hui Virginie Despentes… ça glisse encore plus bas… révélée par son roman « Baise-moi »… non merci !
Erga omnes
Je n’ai pas dit que Virginie Despentes me déplaisait, car je ne saurais pratiquer l’exclusion à partir de données personnelles non justifiées. J’ai rapporté, c’est tout. Le titre de l’opus me paraît « en soi », sans intérêt, mais ce n’est qu’un titre. Hégésippe Simon méritait aussi sa place d’écrivain, le connaissons-nous pour autant ? Et je tiens beaucoup à Hégésippe Simon comme au coucher de soleil sur l’Adriatique. Mille grâces
@ sbriglia 19/08/22 15:56
« Combien Blondin aurait apprécié de rencontrer Patrice Charoulet ! »
Eût-il fallu pour cela que Patrice Charoulet prenne son bâton de pèlerin et se rende bien loin de ses terres, au village de Salas, près de Linards, et, le but atteint, se plie à l’épreuve initiatique consistant à partager quelques indispensables « verres de contact » au goût plus anisé que la seule eau de source des montagnes dont s’abreuve notre ami, pour être accepté dans le cercle des intimes d’Antoine Blondin.
Reconnaissez, sbriglia, que de telles conditions rendaient alors très hypothétique une telle rencontre !
@ genau
« Hégésippe Simon méritait aussi sa place d’écrivain, le connaissons-nous pour autant ? »
…Hégésippe Simon…
Erga omnes !
Hégésippe, en voilà un qui valait le détour !
Je lis qu’une que je ne lis pas, a écrit « Baise-moi ! »
Je pourrais, si j’étais un garçon, répondre : « Si je veux très chère, et présentement j’ai autre chose à faire de plus intéressant ! »
Ce genre de personne peut bien être un écrivain, qui s’en plaindrait ?
Pas moi, qui ne la connais pas…
Mais enfin, peut-on s’attarder sur cette littérature ?
Non !
Je n’aime pas l’impératif ! J’aime beaucoup le conditionnel, et plus encore le passé antérieur…
Donc, s’il faut dire une chose utile et agréable, je dirais que genau est fondé.
Pour éclairer ce point, je donnerai une illustration de ce qu’un ordre peut construire de désordre… (Avant que j’oublie, je salue Hope et Marc au passage.)
L’ordre est une pure saloperie, cette pure ordurerie, je la rencontre régulièrement dans les récriminations de ma sœur, qui est une pure conne…
Comment s’y prend-elle ? De la même façon que la plupart qui trouve à redire quand on donne son avis sur tel ou tel sujet…
Genau nous dit une chose qui me paraît facile à saisir, que je saisis super bien, mais qui est semble-t-il insaisissable…
Dès lors, je viens apporter, sans qu’il ne le souhaite, de l’eau à son moulin qui n’en a pas besoin, et pour cette audace, genau ne me tiendra pas rigueur…
Despentes et ma sœur ont en partage une chose que j’ignore et que je ne comprends pas. Cette chose écœurante est à la mode dernièrement, elle vient monter brique à brique un mur entre ce que j’aime le plus, « les hommes », et ce qui m’indiffère le plus, « les femmes ».
Vous allez me dire que je me tire une balle dans le pied, et je vous dirais que j’aime mieux boiter qu’être du même bord que ma sœur, cette connasse qui a un avis sur tout, et une idée définitive sur le monde, la vie, les hommes, les enfants, les femmes, et tout le bataclan…
Moi, je m’en tamponne mollement le coquillard !
Elle me dit, devant nos vieux de la vieille, que je ne devrais pas utiliser de mots orduriers, comme « couilles », et « merde », que ce n’est pas joli dans la bouche d’une femme, et dans la seconde qui suit m’assigne le rôle d’amazone…
Moi qui suis une conne de première, je souhaite dire des grossièretés, je souhaite aussi me fondre et me confondre avec celui que je ne serai jamais…
Pendant ce temps, ma sœur hors d’elle, vérifie que ses bijoux sont toujours à la même place, et furieuse elle passe sa main sur ses oreilles, son cou décharné, ses poignets arthritiques. Quelle pouffiasse ! Elle adore « Baise-moi ! » de Despentes et des couleurs on ne discute pas…
@ Michel Deluré | 20 août 2022 à 17:14
Mon second degré aurait-il été mal compris ?
@ duvent
« Despentes et ma sœur ont en partage une chose que j’ignore et que je ne comprends pas. Cette chose écœurante est à la mode dernièrement, elle vient monter brique à brique un mur entre ce que j’aime le plus, « les hommes », et ce qui m’indiffère le plus, « les femmes ». »
Pas exactement, non.
Je suis un mec. J’ai lu du Despentes. Je n’ai pas senti qu’elle cherchait à ériger un mur. Plutôt l’inverse en fait, une fois qu’on se débarrasse de l’aspect direct et cru du style et qu’on n’est pas trop politiquement échaudé par ses thèses sur la nature des relations entre les sexes.
Et puis, si elle n’est pas tendre avec les hommes, elle n’est pas non plus d’une tendresse à toute épreuve avec les femmes:
« Entre la féminité telle que vendue dans les magazines et celle de la pute, la nuance m’échappe toujours. Et, bien qu’elles ne donnent pas clairement leurs tarifs, j’ai l’impression d’avoir connu beaucoup de putes, depuis. Beaucoup de femmes que le sexe n’intéresse pas mais qui savent en tirer profit. Qui couchent avec des hommes vieux, laids, chiants, déprimants de connerie, mais puissants socialement. Qui les épousent et se battent pour avoir le maximum au moment du divorce. Qui trouvent normal d’être entretenues, emmenées en voyage, gâtées. Qui voient même ça comme une réussite.
C’est triste d’entendre des femmes parler d’amour comme d’un contrat économique implicite. » — Virginie Despentes, King Kong Theorie.
On croirait même lire du Wil, du temps où il intervenait sur ce blog.
« Elle [votre sœur] me dit, devant nos vieux de la vieille, que je ne devrais pas utiliser de mots orduriers, comme « couilles », et « merde », que ce n’est pas joli dans la bouche d’une femme, et dans la seconde qui suit m’assigne le rôle d’amazone… »
Despentes a écrit « Les jolies choses » car, après « Baise-moi », un critique lui a dit qu’une femme devait écrire… « des jolies choses ».
Si votre sœur est fan de Despentes et vous intime de n’utiliser que des mots jolis dans la bouche d’une femme, il me vient deux réflexions: 1. pas sûr que votre sœur ait bien compris le propos de Despentes 2. les hommes n’ont même pas besoin d’infantiliser les femmes car les femmes s’en chargent très bien toutes seules…
Bref.
@ sbriglia 20/08/22 21:16
« Mon second degré aurait-il été mal compris ? »
Ma réponse aurait-elle été tout autant mal interprétée ?
PHÈDRE.
Ariane, ma sœur ! de quel amour blessée
Vous mourûtes aux bords où vous fûtes laissée !
https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Racine_-_%C5%92uvres,_Didot,_1854.djvu/257
Amoureuse qui inspire l’amour, sur la pente des pentes rejoindrait-on la fille de Minos et de Pasiphaé ?
…Quand ma bouche implorait le nom de la déesse,
J’adorais Hippolyte ; et, le voyant sans cesse,
Même au pied des autels que je faisais fumer,
J’offrais tout à ce dieu que je n’osais nommer.
Je l’évitais partout. Ô comble de misère !
Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son père.
Contre moi-même enfin j’osai me révolter :
J’excitai mon courage à le persécuter.
Pour bannir l’ennemi dont j’étais idolâtre,
J’affectai les chagrins d’une injuste marâtre ;
Je pressai son exil ; et mes cris éternels
L’arrachèrent du sein et des bras paternels.
Je respirais, Œnone ; et, depuis son absence,
Mes jours moins agités coulaient dans l’innocence :
Soumise à mon époux, et cachant mes ennuis,
De son fatal hymen je cultivais les fruits.
Vaines précautions ! Cruelle destinée !
Par mon époux lui-même à Trézène amenée,
J’ai revu l’ennemi que j’avais éloigné :
Ma blessure trop vive aussitôt a saigné.
Ce n’est plus une ardeur dans mes veines cachée :
C’est Vénus tout entière à sa proie attachée.
Ibid
La passion ainsi saurait mener aux chemins véritables de la victoire paisible qui mène d’Éros à Agapé :
« Et que celui qui n’a pas encore entendu la merveilleuse ouverture de Tannhäuser ne se figure pas ici un chant d’amoureux vulgaires, essayant de tuer le temps sous les tonnelles, les accents d’une troupe enivrée jetant à Dieu son défi dans la langue d’Horace. Il s’agit d’autre chose, à la fois plus vrai et plus sinistre. Langueurs, délices mêlées de fièvre et coupées d’angoisses, retours incessants vers une volupté qui promet d’éteindre, mais n’éteint jamais la soif ; palpitations furieuses du cœur et des sens, ordres impérieux de la chair, tout le dictionnaire des onomatopées de l’amour se fait entendre ici. Enfin le thème religieux reprend peu à peu son empire, lentement, par gradations, et absorbe l’autre dans une victoire paisible, glorieuse comme celle de l’être irrésistible sur l’être maladif et désordonné, de saint Michel sur Lucifer. »
https://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99Art_romantique/Richard_Wagner_et_Tannh%C3%A4user_%C3%A0_Paris
@ duvent | 20 août 2022 à 20:29
La réponse de Gérard Biard à un message qui lui était adressé dans le dernier Charlie est sans doute fortuite, il traite du même sujet.
Ceci dit, se purger fait aussi du bien.
Certains conçoivent la vie comme un long fleuve tranquille, du berceau à la mort, sans aspérités, sans remous, sans surprises… sans passion. Les uns, cultivant la respectabilité, en se fondant dans le moule d’une société qui impose un parcours vertueux, du diplôme à la Légion d’honneur, du CAP à la retraite de chef d’atelier, de la drague du samedi soir à l’art d’être grand-père, d’autres, préférant une notoriété malsaine, en grimpant les échelons de la délinquance, du larcin aux assises… Parcours dissemblables certes, mais finalement proches dans leur médiocrité rassurante. Les uns et les autres pensent maîtriser leur destin, ne pas subir leur sort, être libres… La société est sans pitié. Finalement, elle les façonne, les soumet, les broie.
Moins nombreux sont ceux qui, au calme trompeur du lac, préfèrent approcher le torrent, bifurquer sur un sentier pentu, rompre soudainement avec l’acquis. Sans calcul, par goût de l’inconnu, de la découverte, du risque, parfois de la provocation. Oublions ceux qui, tels ces citadins qui, un soir d’été, décident de tout plaquer pour se faire berger dans le Larzac, obéissent en fait à la forme la plus pernicieuse du conformisme. Ceux-là, tôt ou tard, se plaindront du chant du coq…
Les autres, eux, ceux qui choisissent vraiment de défier l’avenir, de jeter l’habitude aux orties, parfois de tutoyer l’abime, possèdent un bien précieux : la passion de réussir sa vie. Celle qu’il n’avait même pas imaginée, ni même désirée, celle devenue leur Everest au hasard d’une rencontre, d’un regard, d’une amitié… Une telle passion ne meurt pas, s’impose au quotidien sans jamais le ternir de redites étouffantes. Passion de connaître, d’aimer, de servir. Passion pour l’autre, passion aussi de la plénitude personnelle. Non pour paraître… Simplement pour, au soir de la vie, disparaître avec le sentiment qu’elle fut fructueuse, heureuse, utile…
Blondin était de ceux-là, son ami Nimier aussi… et bien d’autres au fil des générations, qui se sont retirés dans l’anonymat qu’ils avaient recherché, mais ne méritaient pas, tant ces passionnés, tels nos Révolutionnaires, sont indispensables à la société. Ils la font progresser, la bousculent, mais la rendent meilleure, plus humaine, probablement plus juste. Les autres, ceux qui se complaisent sur la voie tracée, se contentent d’en profiter… sans se rendre compte qu’ils ne sont que ses jouets…
@ F68.10 | 21 août 2022 à 01:07
« Si votre sœur est fan de Despentes et vous intime de n’utiliser que des mots jolis dans la bouche d’une femme, il me vient deux réflexions: 1. pas sûr que votre sœur ait bien compris le propos de Despentes 2. les hommes n’ont même pas besoin d’infantiliser les femmes car les femmes s’en chargent très bien toutes seules… »
Pour répondre à 1 : Ma sœur n’a pas besoin de comprendre les écrivains que la presse encense, elle encense par esprit de brebis…
Pour répondre à 2 : et vice versa !
Mais pour cette partie de votre propos :
« …une fois qu’on se débarrasse de l’aspect direct et cru du style et qu’on n’est pas trop politiquement échaudé par ses thèses sur la nature des relations entre les sexes… »
Il me semble que se débarrasser de l’aspect du style et n’être pas échaudé pas les thèses de l’écrivain, c’est problématique. Cependant, je comprends ce que vous voulez dire, à moins que je ne comprenne rien à ce que voulez me faire discerner…
Pour faire une analogie singulière, je peux reconnaître la technique du tissage dans une serpillière, je peux même distinguer la trame du fil, et apprécier à sa juste valeur la navette mais il demeurera que je ne serais pas facilement convaincue qu’une serpillière bien tissée est aussi intéressante qu’une tapisserie d’Aubusson.
Despentes est une serpillière, elle a donc son utilité !
@ duvent | 21 août 2022 à 19:34
La fin de votre intervention est exceptionnelle, si si, vous reprenez les ballons dans la course et d’une main ! Chapeau !
Le même style, j’étais en culottes très courtes quand je les ai vu jouer de près:
https://www.ladepeche.fr/2021/08/25/les-freres-labazuy-casquette-et-ministre-9749648.php
À mon avis, régler le carburateur double-corps de la Simca 1500 de mon enfance, je n’aurais aucun mal à vous le confier.
VANITY FAIR
La richesse d’un blog provient de l’impossibilité de convaincre qui que ce soit de quoi que ce soit.
@ Bill Noir | 22 août 2022 à 10:28
« La richesse d’un blog provient de l’impossibilité de convaincre qui que ce soit de quoi que ce soit. »
Ce n’est vrai qu’en apparence. J’ai moi-même constaté l’évolution manifeste de certains blogueurs suite à mes arguments. De même que j’ai modifié radicalement mes points de vue suite aux analyses d’autrui.
@ duvent
« Pour répondre à 1 : Ma sœur n’a pas besoin de comprendre les écrivains que la presse encense, elle encense par esprit de brebis… Pour répondre à 2 : et vice versa ! »
Je laisse de côté de votre sœur. Au sujet du « vice versa », je trouve quand même que les relations entre bonhommes sont de nature différente des relations entre nanas. Nettement moins intimes mais empreintes davantage de bonnes intentions, certes superficiellement. Il y a des attaques personnelles et jugements de valeur que les femmes se permettent bien davantage que les hommes, je trouve.
« Il me semble que se débarrasser de l’aspect du style et n’être pas échaudé par les thèses de l’écrivain, c’est problématique. »
Je ne vois pas pourquoi. S’il y a du fond, le mauvais style ne peut le dissimuler. Et du fond, il y en a. Ensuite, qu’on soit d’accord sur le fond ou pas, ce n’est pas une excuse pour prétendre qu’il est sans intérêt: entre deux thèses ayant du fond, ce sera plus celle avec laquelle vous êtes en désaccord qui méritera votre attention.
Cela étant, qu’on aime ou n’aime pas le style de Virginie Despentes, je trouve qu’elle a quand même un talent pour faire rire des situations, et qu’elle sait parfaitement tisser la trame narrative d’une histoire. Qu’elle parsème ou pas son texte de gros mots et de choses pas très jolies du tout ne change strictement rien à ce constat.
« Cependant, je comprends ce que vous voulez dire, à moins que je ne comprenne rien à ce que voulez me faire discerner… »
J’espère avoir été plus explicite.
« Je ne serais pas facilement convaincue qu’une serpillière bien tissée est aussi intéressante qu’une tapisserie d’Aubusson. »
Si vous vous intéressez au tissage, si, cela peut l’être. À titre d’exemple, ayant lu du Kenzaburō Ōe, j’ai trouvé ces textes parfaitement répugnants. Mais je ne peux que m’incliner devant l’auteur. De la même manière, je ne prends pas ombrage du caractère enfantin des textes d’une Selma Lagerlöf pour dénigrer son talent narratif plus qu’évident au prétexte que je ne serais plus un enfant. Même réflexion pour la science-fiction ou la « fantasy », pour faire écho à un débat plus récent avec M. Charoulet.
En même temps, je vous concède que je me trouve souvent un peu trop bon public.
« Despentes est une serpillière, elle a donc son utilité ! »
Ayant écrit King Kong Théorie, elle a de toute évidence une utilité. Bien qu’étant un mec et pas vraiment « féministe », j’ai apprécié y lire un féminisme qui n’est pas un féminisme de la chouinerie ou un féminisme victimaire. J’ai bien plus de respect pour une femme qui pense ainsi que pour nombre d’autres. Mais peut-être est-ce là un tropisme de mec.
Moi, j’me marre bien quand je lis du Despentes. C’est un peu tout ce que je lui demande, au fond. Sa tirade sur la duplicité et la fatuité des psychiatres dans Bye Bye Blondie est une perle. À peu près aussi désopilante que celle du juge de Camus dans l’Étranger.
Mais voyez-vous… Boualem Sansal ? Son style est nul. Absolument nul. Son talent narratif est, je trouve, moindre que celui de Despentes. Ce n’est pas pour autant que ses bouquins ne valent pas le coup. Au contraire. Et si Boualem Sansal était un fondamentaliste qui tentait des arguments sensés dans ses romans sur le manque de morale en Occident, même s’il écrivait comme un cochon et avec un talent narratif pauvre, je serais contraint d’affirmer qu’il y a du fond. René Guénon, par exemple, c’est stylistiquement nul, parfois juste et souvent très faux, avec des thèses diamétralement opposées à ma personne, bien plus en ligne avec celles d’Aleksandr Dugin et de feu sa fille (qui en constituent même une dérive significative, je trouve). Il ne me viendrait pourtant pas à l’idée de dénigrer son statut d’écrivain. Pas plus que cela ne me viendrait à l’idée de dénigrer celui de Despentes.
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@ Bill Noir
« La richesse d’un blog provient de l’impossibilité de convaincre qui que ce soit de quoi que ce soit. »
Ce n’est pas propre aux blogs: les gens font tout pour trouver des stratégies intellectuelles et rhétoriques dont ils se convainquent eux-mêmes de la validité pour ne jamais avoir à discuter des présupposés fondamentaux qui vicient leur pensée. Ils bottent en touche, dévient, jouent la montre, se perdent en manœuvres visant à montrer qu’ils sont plus persécutés que les autres. C’est usuel. C’est la règle du jeu.
Tant que la société trouvera légitimes ces stratégies d’immunisation à la critique, elle s’empêchera de réfléchir sur ce qu’elle croit vrai ou faux. C’est là un dogmatisme à la petite semaine, aussi puissant qu’il est diffus; un substitut aux aspects les plus réconfortants et les plus faux de la religion, au fond.
Si vous voulez une définition de l’élite intellectuelle, la voici: « les personnes qui refusent d’artificiellement immuniser leurs thèses de toute critique par divers stratagèmes rhétoriques et logiquement fallacieux. »
Avec cette définition, vous allez vite faire le vide dans l’élite de notre pays. Mais cette définition recouvre néanmoins une réalité. Au Moyen Âge, c’est l’Église qui jouait, en interne, ce rôle. Nous avons tenté de démocratiser et d’ouvrir cette fonction depuis quelques siècles à travers les divers intellectuels, les diverses formes d’expertise et divers statuts universitaires, et le résultat n’en est pas des plus mirifiques: les gens continuent, y compris dans le monde intellectuel, de chercher à s’immuniser à toute critique de fond.
Mais je ne crois pas qu’il existe d’autres manières de procéder que cette démocratisation que nous avons tentée depuis quelques siècles.
Macron retourne en Algérie. Il aime. Nos pieds-noirs sont circonspects. Peut-être prononcera-t-il enfin au profit de ces braves gens la reconnaissance de la Nation comme il l’a fait pour nos harkis !
@ F68.10 | 22 août 2022 à 16:43
Tout d’abord et afin de ne pas se perdre en palabres inutiles, je précise que je ne cherche ni à vous convaincre, ni à vous empêcher d’aimer les écrivains que vous aimez.
Il m’amuse d’avoir à vous préciser ce qui est évident, car j’ai lu plus bas dans votre commentaire à ce triste sire de Bill Noir, ceci : « Les gens font tout pour trouver des stratégies intellectuelles et rhétoriques dont ils se convainquent eux-mêmes de la validité pour ne jamais avoir à discuter des présupposés fondamentaux qui vicient leur pensée. Ils bottent en touche, dévient, jouent la montre, se perdent en manœuvres visant à montrer qu’ils sont plus persécutés que les autres. C’est usuel. C’est la règle du jeu. ».
J’approuve ce que vous écrivez…
J’approuve et je m’étonne…
Si l’on doit échanger dans un but qui ne soit pas vain, il faudrait s’attacher à suivre « rem tene verba sequentur » !
Ainsi, vous pouvez trouver ce qui satisfait votre recherche dans les écrivains que vous appréciez et je peux dire sans leur enlever le talent que vous leur trouvez qu’ils sont sans intérêt ni talent.
Dès lors, si je classe Despentes dans les « serpillières », comme Houellebecq dans les « pistolets urinoirs », le monde de la littérature ne va pas du tout s’en émouvoir, pour la raison illusoire qu’ils expriment merveilleusement bien des choses de leur temps… Un temps dont l’imaginaire est d’une pauvreté effrayante !
J’espère que c’est par goût de la provocation que vous écrivez ceci :
« Mais voyez-vous… Boualem Sansal ? Son style est nul. Absolument nul. Son talent narratif est, je trouve, moindre que celui de Despentes. Ce n’est pas pour autant que ses bouquins ne valent pas le coup. »
Permettez-moi, alors, de vous répondre : BS est une mer*e sur pattes, son style dont vous dites qu’il est nul, et son talent narratif nul, doivent conduire à la damnatio memoriae, sur-le-champ !
Notre temps est assez faisandé pour permettre à des hommes de rien d’occuper une place qui ne leur revient nullement, ils l’occupent sans vergogne, avec une férocité et un appétit qui dégoûteraient une tripotée de marcassins.
Mais ce n’est pas le propre de la littérature, malheureusement partout où le regard se pose, la médiocre imposture est couronnée de lauriers !
Les héros sont partout, et nous voyons le chef de guerre ici, le chef de brigade là, avec une pince à épiler, qui dépose un poil végétal sur une crotte d’on ne sait quoi, et celle-ci est écrivain car elle distrait, et ici nous avons des « artistes », des « créateurs », « des musiciens », en un mot : des trous du c*l, qui vont donner un sens à la vie sans lustre de leurs tristes et stupides contemporains… Ô tempora, ô mores !
@ duvent
Chère Madame,
Vous avez déclaré que vous n’étiez pas mon amie. Je vous l’accorde. J’ai répondu que vous pourriez me permettre de déclarer au moins que j’ai de l’estime pour vous, comme pour plusieurs d’ici. Ce jour, vous écrivez admirablement ceci : « Je classe Despentes dans les serpillières, comme Houellebecq dans les pistolets urinoirs. » Comment ne pas vous en estimer davantage encore ?
Je diffuse très largement cette belle phrase dans divers endroits de la Toile, regrettant de ne pas pouvoir y joindre une signature comportant un vrai prénom et un vrai nom. Elle restera, très fâcheusement, anonyme.
Me permettrez-vous une remarque formelle ? Vos guillemets ne s’imposaient pas, puisque des guillemets impliquent que l’on n’assume pas un énoncé. Or, à mon humble avis, vous assumez parfaitement ces très bons énoncés que vous avez mis, pourtant, entre guillemets.
Pénurie d’enseignants pour la rentrée. Tant qu’on ne manque pas d’élèves !
@ duvent
« Ainsi, vous pouvez trouver ce qui satisfait votre recherche dans les écrivains que vous appréciez et je peux dire sans leur enlever le talent que vous leur trouvez qu’ils sont sans intérêt ni talent. Dès lors, si je classe Despentes dans les « serpillières », comme Houellebecq dans les « pistolets urinoirs », le monde de la littérature ne va pas du tout s’en émouvoir, pour la raison illusoire qu’ils expriment merveilleusement bien des choses de leur temps… Un temps dont l’imaginaire est d’une pauvreté effrayante ! »
Vous avez tout à fait le droit de haïr l’œuvre de Mme Despentes ou de M. Houellebecq. Et j’ai tout à fait le droit de défendre la valeur d’écrivains même et surtout quand je ne les apprécie pas. C’est ce que je fais face à vous au sujet, ici, de Mme Despentes, et j’expose en quoi son travail n’est pas sans valeur, même si ce travail vous déplaît.
Vous prétendez que le monde de la littérature ne va pas s’émouvoir de votre critique au Kärcher. Admettons. Il demeure que la vie intellectuelle et la vie des idées importent et que, non, ce genre de critiques n’est pas sans incidence. Votre propension que je trouve excessive à la critique ne constitue donc pas une non-affaire.
« Permettez-moi, alors, de vous répondre : BS [Boualem Sansal] est une mer*e sur pattes, son style dont vous dites qu’il est nul, et son talent narratif nul, doivent conduire à la damnatio memoriae, sur-le-champ ! »
Non, Madame. Boualem Sansal n’est pas une « mer*e sur pattes ». Je trouve son style mauvais et son talent narratif moindre que Despentes. Il demeure que M. Sansal déploie une partie substantielle de son temps et de son énergie à produire ces œuvres. Bien que l’effort consenti ne soit nullement une garantie de qualité, il convient tout d’abord d’en prendre la mesure avant de critiquer gratuitement. Ensuite, si, M. Sansal fait des livres avec des thèmes qui ne sont absolument pas neutres ou insipides, et qui font sens. La tentative d’assassinat sur Salman Rushdie montre bien que le type de livres à la Boualem Sansal ont un rôle essentiel à jouer. Qu’on n’aime pas la forme ne justifie pas qu’on nie l’existence du fond.
« Les héros sont partout, et nous voyons le chef de guerre ici, le chef de brigade là, avec une pince à épiler, qui dépose un poil végétal sur une crotte d’on ne sait quoi, et celle-ci est écrivain car elle distrait, et ici nous avons des « artistes », des « créateurs », « des musiciens », en un mot : des trous du c*l, qui vont donner un sens à la vie sans lustre de leurs tristes et stupides contemporains… Ô tempora, ô mores ! »
Non. Ces gens se décarcassent pour créer. Sans eux, la culture n’existerait pas. Qu’on soit exigeant, soit. Mais pas au prix de cracher gratuitement sur les gens qui créent notre culture et notre civilisation à travers ce que leurs œuvres évoquent, critiquent, ou inspirent.
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@ Patrice Charoulet (@ duvent)
« Vous avez déclaré que vous n’étiez pas mon amie. Je vous l’accorde. J’ai répondu que vous pourriez me permettre de déclarer au moins que j’ai de l’estime pour vous, comme pour plusieurs d’ici. Ce jour, vous écrivez admirablement ceci : « Je classe Despentes dans les serpillières, comme Houellebecq dans les pistolets urinoirs. » Comment ne pas vous en estimer davantage encore ? »
Vous auriez craché sur Rabelais en son temps, Monsieur le professeur de français.
@ F68.10
Même si Du Bellay me charme et si Montaigne est passionnant à lire, je vous accorde que mes dieux commencent au XVIIe siècle et se nomment Pascal, Molière, Racine, La Fontaine, La Bruyère, La Rochefoucauld, Retz, Bossuet, Fénelon, Mme de Sévigné, Mme de La Fayette, Fontenelle… Et que Rabelais n’est pas de mon Panthéon.
Laissez-moi vous dire néanmoins que je vois mal le cousinage que vous voyez entre Rabelais et la p… Despentes, qui écrit comme un pied, et le minuscule écrivain Houellebecq, incroyablement surfait. Un commentateur sur Facebook écrit plaisamment que ce romancier est un « virtuose du style plat ».
@ F68.10 | 23 août 2022 à 18:25
« Vous avez tout à fait le droit de haïr l’œuvre de Mme Despentes ou de M. Houellebecq. »
« Votre propension que je trouve excessive à la critique ne constitue donc pas une non-affaire. »
Entre ces deux phrases, un territoire immense se dessine…
J’ai le droit, mais en réalité, vous n’avez pas l’air d’aimer cette possibilité…
« C’est ce que je fais face à vous au sujet, ici, de Mme Despentes, et j’expose en quoi son travail n’est pas sans valeur, même si ce travail vous déplaît. »
Mais vous vous égarez, son travail, comme vous l’écrivez, je m’en moque éperdument, il s’agissait d’un échange entre personnes de bonne compagnie, si vous souhaitez me mettre en cause, je n’y vois que des avantages, mais il faudra vous donner un peu plus de mal…
Que vous trouviez astucieux de rapprocher Boualem Sansal de Salman Rushdie est d’un grotesque qui me laisse pantoise… Que voulez-vous précisément m’imposer ?
Est-ce que le fait que le deuxième se soit fait agresser par un dégénéré m’empêche de dire ce que je pense du premier ? Non, je ne crois, dès lors, je redis que BS est une me*de sur pattes, son œuvre ne mérite pas que je m’y attarde !
Quant à votre théorie sur le décarcassement des imbéciles, elle me laisse rêveuse…
« Ces gens se décarcassent pour créer. Sans eux, la culture n’existerait pas. Qu’on soit exigeant, soit. Mais pas au prix de cracher gratuitement sur les gens qui créent notre culture et notre civilisation à travers ce que leurs œuvres évoquent, critiquent, ou inspirent. »
Je dirais, bien que cela vous hérisse, qu’ils devraient, ces gens, se reposer, et la culture ne s’en trouverait que mieux…
Vous ne devriez pas chercher à tordre mes pensées, elles vous échappent complètement, comme d’ailleurs les vôtres m’apparaissent dans la brume épaisse d’un a priori mal déguisé.
Je reprends bien volontiers vos mots pour exprimer clairement ma position, je suis exigeante au point de cracher gratuitement sur les gens qui créent aujourd’hui ce que vous appelez notre culture et notre civilisation, leurs œuvres sont si puantes de vanité et si pleine d’autosatisfaction, que je peux, oui, oui, cracher dessus, car figurez-vous que je n’ai pas besoin de consommer de la me*de pour savoir que c’est de la me*de ! Incroyable, non ?
Enfin, la phrase que vous destinez à M. Charoulet est dégoûtante… Mais sans doute aviez-vous besoin de le rabaisser pour vous élever ! C’est très petit, c’est très laid, ça, mais très artistique comme attitude…
Sans rancune !
@ F68.10 | 23 août 2022 à 18:25
« Non. Ces gens se décarcassent pour créer. Sans eux, la culture n’existerait pas. »
À ce rythme, vous allez en être réduit à justifier « Mein Kampf »… et sa réédition, dont je ne doute pas un seul instant que vous la vouez aux gémonies…
@ Serge HIREL
« À ce rythme, vous allez en être réduit à justifier « Mein Kampf »… et sa réédition, dont je ne doute pas un seul instant que vous la vouez aux gémonies… »
Je cautionne la réédition de Mein Kampf. C’est un document historique. Qui a donc une valeur historique intrinsèque. Le problème, ce sont les vrais nazis. Plus vraiment Mein Kampf, qu’ils trouveront sur le net de toutes manières, généreusement mis à disposition par la Public Library of India. De la même manière, il ne me viendrait pas à l’idée d’interdire le Coran sous prétexte du verset du sabre, et, justement, toute édition du Coran se doit à mon sens d’inclure le verset du sabre pour bien prouver noir sur blanc qu’il appelle à la guerre sainte de manière non-équivoque.
Et puis, dans la catégorie Mein Kampf, le torchon intitulé Основы геополитики / Les fondements de la géopolitique par Aleksandr Dugin, papa de la décédée à la une, c’est pas mal non plus. Voici le lien.
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@ duvent
« J’ai le droit, mais en réalité, vous n’avez pas l’air d’aimer cette possibilité… »
Exactement. Heureusement que vous avez le droit de faire ce qui ne me plaît pas. Aimeriez-vous que je vous interdise de faire absolument tout ce qui ne me plaise pas que vous fassiez ? (En fait, non, que vous aimiez ou pas Despentes m’indiffère pas mal, vous savez…)
« Que vous trouviez astucieux de rapprocher Boualem Sansal de Salman Rushdie est d’un grotesque qui me laisse pantoise… Que voulez-vous précisément m’imposer ? »
La comparaison n’est absolument pas grotesque. Boualem Sansal est un blasphémateur professionnel. Ce qui est arrivé à Rushdie pend au cou de chaque blasphémateur dans chaque pays qui ne tolère pas le blasphème. Treize pays prônent la peine de mort pour les athées.
Quand je parle de Boualem Sansal, c’est pour mettre en évidence qu’un auteur avec un style mauvais et un talent narratif pas folichon a une utilité ; et qu’une œuvre, même mal finalisée, peut avoir un impact substantiel sur la culture. C’est cette perspective que je protège en m’opposant à votre propension à la critique que je juge trop facile de votre part.
« Est-ce que le fait que le deuxième se soit fait agresser par un dégénéré m’empêche de dire ce que je pense du premier ? »
Non. Votre liberté d’expression est garantie, et je la défends. Je vous oppose seulement la mienne.
« Non, je ne crois, dès lors, je redis que BS est une me*de sur pattes, son œuvre ne mérite pas que je m’y attarde ! Quant à votre théorie sur le décarcassement des imbéciles, elle me laisse rêveuse… Je dirais, bien que cela vous hérisse, qu’ils devraient, ces gens, se reposer, et la culture ne s’en trouverait que mieux… »
Non, madame. Les chefs-d’œuvre n’adviennent qu’après que de multiples déchets ont tenté leur chance en prétendant à ce titre de chef-d’œuvre. L’existence de ces déchets est un prérequis pour que les chefs-d’œuvre apparaissent, après moult échecs. Il est donc nécessaire de ne pas ignorer leur rôle dans la création qui, comme toute chose, procède par essai et erreur. C’est pour cela que je m’oppose au gratuit dénigrement systématique et que je préfère une approche « peut mieux faire » de la critique qu’une approche, comme la vôtre, qui se résume en l’humiliation publique en guise de critique.
« Vous ne devriez pas chercher à tordre mes pensées, elles vous échappent complètement. »
Il ne tient qu’à vous de les exprimer proprement.
« Je reprends bien volontiers vos mots pour exprimer clairement ma position, je suis exigeante au point de cracher gratuitement sur les gens qui créent aujourd’hui ce que vous appelez notre culture et notre civilisation, leurs œuvres sont si puantes de vanité et si pleine d’autosatisfaction. »
Mais bien sûr. Avant, c’était mieux, peut-être ? Vous critiquez Houellebecq. Le trouvez-vous vaniteux ? Moi, absolument pas. Il sait mener sa barque et faire parler de lui, certes, mais ce n’est nullement là de la vanité. Où voyez-vous de l’autosatisfaction dans l’œuvre d’une Despentes ? Je ne vois absolument pas d’autosatisfaction. C’est plutôt l’insatisfaction qui la caractérise et caractérise son œuvre. Cette dame n’est pas une âme apaisée.
« Enfin, la phrase que vous destinez à M. Charoulet est dégoûtante… Mais sans doute aviez-vous besoin de le rabaisser pour vous élever ! C’est très petit, c’est très laid, ça, mais très artistique comme attitude… »
Je ne vois pas ce qu’il y a de dégoûtant à affirmer que Monsieur Charoulet encense les œuvres passées mais ne semble pas comprendre que les œuvres modernes ont le même rôle à jouer dans la culture que les chefs-d’œuvre du passé qu’il admire. Il encense Molière, et oublie que le théâtre était un art méprisé comme il méprise aujourd’hui ce qui est moderne. Il encense Molière, mais ignore un Goldoni. Il encense Fontenelle, en oubliant que l’Histoire des oracles ou même les Entretiens sur la pluralité des mondes est, sous ses atours proprets mettant en scène un dialogue courtois avec une femme qu’il feint de présenter comme plus bête qu’elle ne l’est, un chef-d’œuvre d’impiété, crime alors à peu près aussi grave qu’actuellement les gros mots de Despentes. Monsieur Charoulet encense Pascal, probablement pour ses textes philosophiques, mais semble ne pas prendre en compte le crime contre la pensée que constituent la perte de ses œuvres scientifiques qu’on tente de nos jours de reconstituer à partir des fragments traînant chez Leibniz et connus sous le nom des Pascaliana. Monsieur Charoulet s’insurge contre un accord grammatical de travers, ou un usage intransitif d’un verbe transitif, mais semble oublier que la langue française des auteurs de l’époque qu’il affectionne était loin d’être fixée par l’Académie française comme elle l’est de nos jours. Monsieur Charoulet, à mon sens, commet un délit d’anachronisme dans ses appréciations esthétiques, intellectuelles et culturelles.
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@ Patrice Charoulet
« Laissez-moi vous dire néanmoins que je vois mal le cousinage que vous voyez entre Rabelais et la p… Despentes. »
Autre temps, autre mœurs. Rabelais avait un agenda politique dans ses œuvres. Madame Despentes aussi. Chacun à sa façon. Les deux firent usage de moult gros mots. Le crime qu’on reproche à Despentes, on le reprocha aussi à Rabelais. Les gros mots ont la propriété de focaliser la critique sur eux: ils permettent d’attaquer l’œuvre en s’épargnant la peine d’avoir à attaquer le fond. Ils permettent de faire croire au public que le fond n’existe pas. Qu’il n’y a que des gros mots.
« Ce n’est pas la première fois que les théologiens le condamnent ; un an après sa publication, en 1532, Pantagruel a déchaîné les foudres de la Sorbonne, la puissante faculté parisienne qui veille sur le respect de la doctrine. Accusé d’obscénité – en sus de l’apostasie -, il [i.e. Rabelais] s’en est tiré de justesse grâce à l’un de ses anciens condisciples, Jean du Bellay, diplomate et évêque de Paris, qui l’a emmené fort à propos à Rome au titre de médecin. » — Véronique Maurus, Rabelais l’Insolent, Le Monde, 21.07.2003.
Et si, je persiste: il y a un fond chez la p… Despentes. Qu’on n’aime pas ce fond, c’est une chose. Qu’on le nie pour le plaisir de censurer ses thèses par le biais de la pression sociale sous prétexte de mauvais goût, c’en est une autre. Beaucoup moins louable. Elle écrit comme un pied ? Elle a un style efficace. Cela sert à quoi, un style, si ce n’est à faire passer des idées ?? Seulement à faire joli ?
« Un commentateur sur Facebook écrit plaisamment que ce romancier [Houellebecq] est un « virtuose du style plat ». »
Et c’est tout à son honneur. Je n’aime pas beaucoup Houellebecq mais, oui, j’admire sa capacité à aller droit au but au moyen de ce style parfaitement plat. Les gens qui épurent l’efficacité ainsi ont droit à tout mon respect. C’est loin d’être aisé d’être aussi efficace tout en étant si puissamment plat. Très loin d’être aisé.
@ F68.10 | 24 août 2022 à 01:24
« Quand je parle de Boualem Sansal, c’est pour mettre en évidence qu’un auteur avec un style mauvais et un talent narratif pas folichon a une utilité ; et qu’une œuvre, même mal finalisée, peut avoir un impact substantiel sur la culture. C’est cette perspective que je protège en m’opposant à votre propension à la critique que je juge trop facile de votre part. »
Ah ! Mais c’était donc vous !!!
Le protecteur de la perspective… L’opposant à ma propension…Le juge de ma facilité…
Ouais ! Ouais ! Ouais !
Eh ben, j’ai honte, du coup…
Je me rends compte de mon erreur, de mes excès, du talent des autres, ceux que je ne dois pas critiquer car ils remplissent un rôle et impactent substantiellement la culture.
Je réalise enfin, combien il y a dans la mer*e de bonnes choses, et vice versa…
Il était temps ! Ouf !
Donc, si j’ai bien compris, et rien n’est moins sûr vu mon niveau de compréhension de la me*de, je dois désormais veiller à ce que ma propension à la critique facile ne vienne pas détériorer les belles et grandes œuvres des auteurs merdiques.
Savez-vous que cela m’émeut ?
Auriez-vous la grande bonté de me dire si votre théorie porte un nom ?
Si tel n’est pas le cas, je propose de l’appeler : la Théorie Dentix uber alles !
Oui, je crois sincèrement que ce nom lui va comme un gant et je vais vous en donner la raison ci-après :
Dentix : Mot évocateur… Et vous allez voir que le lien avec votre théorie est irréfragable. En effet par association d’idées, il m’est venu dans la tête que les personnes écrivaines dont vous êtes le protecteur sont des molaires (pas Molière…) pourries, et qu’il faut les garder dans la bouche car par un effet étrange et merveilleux, il est utile de sentir la nauséabonde et délétère action du pourrissement. Un peu comme dans les « œuvres » des écrivains merdiques !
Uber alles : je crois que c’est de l’allemand, ça sonne bien, c’est d’une tendresse qui me touche, et pourquoi ne pas le reconnaître, c’est percutant !
Qu’en dites-vous ?
En outre, et pour ne pas laisser ce passage remarquable de votre exposé sans réponse, ce serait bête… :
« Non, madame. Les chefs-d’œuvre n’adviennent qu’après que de multiples déchets ont tenté leur chance en prétendant à ce titre de chef-d’œuvre. L’existence de ces déchets est un prérequis pour que les chefs-d’œuvre apparaissent, après moult échecs. Il est donc nécessaire de ne pas ignorer leur rôle dans la création qui, comme toute chose, procède par essai et erreur. C’est pour cela que je m’oppose au gratuit dénigrement systématique et que je préfère une approche « peut mieux faire » de la critique qu’une approche, comme la vôtre, qui se résume en l’humiliation publique en guise de critique. »
Je dirais que vous êtes tordant ! Oui, Monsieur ! Vous êtes mortellement drôle ! Je découvre donc que c’était vous aussi, le Bon Maître ! Celui qui écrit « peut mieux faire » !
Peut-être devriez-vous cesser de tourner autour du pot, et dire que votre but est simplement de vous opposer à ma théorie, laquelle porte le joli nom de : la Théorie du Chaos chaotique et plus si le temps le permet.
Comment arrivez-vous à comparer des sommets de nullité avec les brillants penseurs du temps passé ? Les scribouilleurs que vous défendez enfoncent des portes ouvertes, sans rencontrer la moindre résistance, et vous voudriez de surcroît en faire mes victimes ?
Vous ne manquez pas d’audace !
duvent ne sera jamais enceint, elle trouvera jamais un homme pour porter sa matrice.
@ Bill Noir | 24 août 2022 à 09:04
« duvent ne sera jamais enceint, elle trouvera jamais un homme pour porter sa matrice. »
Vous pouvez développer ?
@ duvent
« Vous pouvez développer ? »
Non, pourquoi ?
Il serait donc l’heure de citer mon auguste génitrice, vieillarde adolescente de nonante ans, illustrant à merveille que la liberté telle que la conçoit l’homme n’est qu’une illusion ; elle n’est que la simple marque de son ignorance des causes qui le déterminent :
« »Chacun ses goûts », disait un moine en urinant dans sa soupe. »
Comme quoi Spinoza et ma toute vieille maman s’accorde pour résumer une trajectoire romanesque :
« Baise-moi, cher connard ! »
Finalement, ne nous voilà donc pas si loin des fusées baudelairiennes, où les destructions passionnelles sont accession aux rédemptions du pardon :
« À travers la noirceur de la nuit, il avait regardé derrière lui dans les années profondes, puis il s’était jeté dans les bras de sa coupable amie, pour y retrouver le pardon qu’il lui accordait. »
https://fr.wikisource.org/wiki/Fus%C3%A9es#cite_note-12
@ Patrice Charoulet et à tous
Cherchant à montrer que le style d’Abeille est classique en requérant quelque article ou extrait, j’ai vu que le magicien igonré est mort… J’avais eu le bonheur de l’ignorer jusqu’à aujourd’hui.
Bien, sa fiche, et quelque chose sur son style :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Abeille#:~:text=Jacques%20Abeille%2C%20n%C3%A9%20le%2017,Libourne%2C%20est%20un%20%C3%A9crivain%20fran%C3%A7ais.
https://www.nonfiction.fr/article-8337-roman-les-contrees-paralleles-de-jacques-abeille.htm
Les gens pensent que du mal sort un bien, c’est au mieux, un moindre mal. Ainsi ! Les gens ont un préjugé favorable pour les auteurs morts, ça y est, l’auteur ne peut plus bouger, décevoir, et il est prêt à être momifié dans son mythe… Dommage que tant de gens ne lisent pas, sinon !
Mais du moins, cela va aider à la réception de son oeuvre en France, je n’en doute pas. J’espère aussi qu’il sera traduit à l’étranger : à mon avis, étant donné qu’on n’y est pas opposé à l’imaginaire et que le grand style français peut être prestigieux, son oeuvre pourrait parfaitement s’y greffer.
Sans vouloir développer, je dirais en priorité, le monde anglo-saxon, italien, peut-être latino et le Japon.
Cit-gît un créateur qui rend le monde à sa magie, le style à sa perfection, et la vie à…
À chacun de compléter : c’est là que commence le travail de créateur du lecteur.
@ Bill Noir | 24 août 2022 à 09:43
Vous répondez aux questions rhétoriques comme de bien entendu…
@ F68.10
« Autre temps, autre mœurs. Rabelais avait un agenda politique dans ses œuvres. Madame Despentes aussi. Chacun à sa façon. Les deux firent usage de moult gros mots. Le crime qu’on reproche à Despentes, on le reprocha aussi à Rabelais. Les gros mots ont la propriété de focaliser la critique sur eux: ils permettent d’attaquer l’œuvre en s’épargnant la peine d’avoir à attaquer le fond. Ils permettent de faire croire au public que le fond n’existe pas. Qu’il n’y a que des gros mots. »
J’ai lu plusieurs critiques du dernier ouvrage de Despentes qui parlent très clairement du fond, pas uniquement de sa forme. Et le fond n’est pas reluisant.
Pour ma part, j’ai vu le nanard « Baise-moi » et cela fait ma religion sur le cas Despentes. Rien à faire que la vulgarité puisse attirer la critique, si je puis dire, le fond est du niveau d’une pré-adolescente tragiquement attardée, et c’est toujours la même sauce depuis, cela transparaît dans ses propos récents.
Lorsque Virginie Despentes fait l’apologie des terroristes de Charlie Hebdo, c’est toujours la même rengaine depuis « Baise-moi » (« Manu, jeune Maghrébine à la langue bien pendue, a une vie qui la satisfait : elle arrive à trouver à peu près tous les jours à étancher sa « soif de foutre, de bière et de whisky » […] Un soir qu’elle se promène avec une autre fille, trois hommes les abordent, les emmènent dans un hangar et les violent. Manu est passive alors que l’autre résiste. Partant du principe que « ma chatte, je peux empêcher personne d’y entrer, alors je mets rien de précieux à l’intérieur » ») – cela résume bien la manière d’aborder le monde et les rapports que Despentes propose. C’est une désoeuvrée, une paumée, qui voudrait nous présenter son dégoût du monde et de l’homme comme un mode de vie souhaitable.
Ce n’est même pas un programme politique. C’est une influence négative, la bonne copine qui proposerait de l’héroïne à la plus jeune, plus influençable, sous prétexte d’être rock’n’roll, et qui lui expliquerait ensuite que c’est normal de faire le tapin pour payer sa consommation, parce qu’après tout tout est laid, pourquoi pas cela aussi.
Toxique, sous prétexte de rébellion, alors que c’est un hymne permanent à la soumission.
@ duvent
Admirant votre phrase « Je classe Despentes dans les serpillières, comme Houellebecq dans les pistolets urinoirs », j’ai voulu élargir votre lectorat. Je l’ai mise en divers endroits de la Toile, notamment sur Facebook, où j’ai 3 000 relations (baptisées « amis » par Facebook). Une de ces personnes, Eric Naulleau, commente votre merveille en deux mots : « Excellent résumé ! » J’en attends d’autres.
@ Patrice Charoulet | 24 août 2022 à 13:00 (@ duvent)
« Admirant votre phrase « Je classe Despentes dans les serpillières, comme Houellebecq dans les pistolets urinoirs », (…) J’en attends d’autres. »
Je m’étonne de votre attentisme.
Je finirai par douter que vous fûtes vraiment un professeur de français, car enfin dans le style, Molière fit aussi bien que Dame duvent, et à deux reprises.
En voici deux extraits qui auraient pu servir à caractériser les ouvrages cités, si en cour en ce moment :
« C’est un petit clystère, un petit clystère, bénin, bénin ; il est bénin, bénin: là, prenez, prenez, prenez, Monsieur; c’est pour déterger, pour déterger, déterger… »
Monsieur de Pourceaugnac, I, 11
Ou encore, car Molière y revint plusieurs fois à ce petit clystère :
« »Plus, du vingt-quatrième, un petit clystère insinuatif, préparatif, et rémollient, pour amollir, humecter, et rafraîchir les entrailles de Monsieur. […] Plus dudit jour, un bon clystère détersif, composé avec catholicon double, rhubarbe, miel rosat, et autres, suivant l’ordonnance, pour balayer, laver, et nettoyer le bas-ventre de Monsieur »
Le Malade imaginaire, I, 1
Attendons la réaction de Dame duvent qui latinise en manquant de francitude.
Bon, c’est juste pour finir le mois d’août dans de belles lettres.
Avant que le pire qui nous poursuit depuis longtemps ne finisse par nous rattraper comme vient de nous l’annoncer notre président.
@ Patrice Charoulet
Naulleau, estimable polémiste, auteur de cette déclaration impérissable en 2019: « Michel Houellebecq est aux grands auteurs ce que le beaujolais nouveau est aux grands crus ».
Il est du dernier chic de dézinguer Houellebecq !! Qui, entre lui et MH, laissera une trace dans 50 ans ?
@ Marcel
« J’ai lu plusieurs critiques du dernier ouvrage de Despentes qui parlent très clairement du fond, pas uniquement de sa forme. Et le fond n’est pas reluisant. »
Au moins, vous admettez qu’il y en a un, de fond. C’est déjà cela. On peut alors en discuter. Ce qui n’est pas encore le cas avec duvent et Monsieur Charoulet. Si vous voulez le fond de ma pensée sur vos propos: 1. Mme Despentes débloque avec le cas Charlie mais je vous avoue que je ne prends pas de conseils en géopolitique des idéologies ni de Madame Despentes ni de Monsieur Bigard. 2. Il existe plein d’auteurs nettement plus respectables qui ont pris des positions complètement décalées sur de tels sujets comme sur le cas Rushdie et la liste de ces profondes déceptions est longue, Mme Despentes n’étant qu’un cas sur cette liste. 3. Oui, elle a une idéologie d’extrême gauche, mais le véritable crime en la matière est que, sur les questions de défense des droits des « minorités sexuelles », le centre droit et le centre gauche soient essentiellement silencieux ou en tout cas peinent à impulser un mouvement raisonné de défense des droits. Il y a une raison pour laquelle je ne voterai jamais à la droite de Monsieur Macron, et c’est celle-là. Madame Despentes ne fait que représenter l’idéologie qui comble ce vide 4. Mme Despentes a écrit Baise-moi très tôt, en 1994, et King Kong Théorie, c’est 2006 ; donc, si vous voulez le fond, tournez-vous vers les œuvres qui ne sont pas de jeunesse. Ce fond ne vous plaira probablement pas, mais au moins n’intervertissez pas les rôles de « Baise-moi » et de « King Kong Théorie ». 5. « Baise-moi » est assez mauvais ou, plutôt, se juge comme un pamphlet ou une œuvre de débutante. Le problème avec « Baise-moi » fut simple: il fut catalogué comme film pornographique et donc interdit de projection en salle. Si vous prenez « Baise-moi » pour un film pornographique, permettez-moi de vous offrir un billet aller simple pour l’hôpital psychiatrique le plus proche. Ce n’est nullement là un film pornographique.
« Ce n’est même pas un programme politique. »
Ce n’est pas un programme politique. Cela a un contenu politique. Nuance.
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@ duvent
« Comment arrivez-vous à comparer des sommets de nullité avec les brillants penseurs du temps passé ? Les scribouilleurs que vous défendez enfoncent des portes ouvertes. »
Malheureusement, non. La question des « minorités sexuelles » n’est absolument pas une « porte ouverte ». J’étais de l’avis que c’était un non-sujet quand j’avais 20 ans. Après des décennies de psychiatrie, vous m’avez bel et bien convaincu, par la manière forte, que ce n’était absolument pas un non-sujet. Et je ne fais pourtant absolument pas partie de ces minorités sexuelles. Je suis un mâle hétérosexuel monogame à toute épreuve.
Maintenant, oui, je m’oppose de manière claire et carrée à votre esprit qui consiste à affirmer qu’un auteur n’a de la valeur qu’à partir du moment où les vers ont finit de digérer ses viscères. Vos auteurs du passé ne sont pas des demi-dieux. Ils ont écrit des choses dans leur contexte, ils avaient plus ou moins de talent, et les textes qui traversent le temps ne sont pas nécessairement les meilleurs. J’en ai assez de cette idolâtrie du passé et des auteurs passés, qu’on nous apprend à l’école en les désincarnant complètement pour mieux les canoniser. Ce n’est pas spécialement Despentes que je défends ici. Ce sont des contemporains comme des Thomas Reverdy ou des Terry Pratchett. Je viens d’ailleurs de regarder l’adaptation télévisée de son livre De bons présages, et c’est très bon ; et j’en ai assez qu’on vienne me dire que c’est de la daube parce que seul Le Cid est digne d’être enseigné à l’école. Marre de cet esprit de clocher sectaire et chauvin qui fait le lit de notre détestation de la création culturelle pendant que la Mafia K’1 Fry n’a pas ces pudeurs de gazelle dans leurs parfois talentueux cris de guerre culturelle. Secouez-vous un peu, bon sang… Antigone, ça va bien dix minutes…
« …et vous voudriez de surcroît en faire mes victimes ? Vous ne manquez pas d’audace ! »
Madame Despentes est désormais reconnue. Ce ne sont pas vos mugissements qui en feront une victime.
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@ Patrice Charoulet
« Une de ces personnes, Eric Naulleau, commente votre merveille en deux mots : « Excellent résumé ! » J’en attends d’autres. »
Monsieur Naulleau fait parler ses opinions politiques dans ses jugements littéraires. Je récuse cette approche. Il n’est pas besoin de nier un statut d’écrivain à autrui pour s’opposer à ses opinions politiques. J’attends que cette confusion, que vous entretenez, cesse.
@ Tipaza
Pour m’épater, vous citez deux extraits du « Malade imaginaire », pièce que j »ai expliquée pendant trois mois et douze ans de suite dans un collège réunionnais.
Et que je connais par coeur. Vous vous demandiez si j’ai bien été prof de français. Je viens de vous répondre.
Je connais moins bien, en revanche, les oeuvres complètes de Mme Despentes et de Monsieur Houellebecq. Qui ne sont pas encore, par chance, parmi les grands auteurs français que l’on peut étudier dans le secondaire. Si c’était le cas, il y aurait de quoi changer de métier. Ou de pays.
La France, matrie des hommes enceints.
@ F68.10 | 24 août 2022 à 15:28
« La question des « minorités sexuelles » n’est absolument pas une « porte ouverte ». J’étais de l’avis que c’était un non-sujet quand j’avais 20 ans. Après des décennies de psychiatrie, vous m’avez bel et bien convaincu, par la manière forte, que ce n’était absolument pas un non-sujet. »
What the fuck ! En français : c’est quoi ce bordel ?
Quand est-ce que j’ai fait cette bêtise ?
À la manière forte en plus ???
Non, mais j’ai complètement foiré ! En plus je rentre de vacances… La reprise va être intense !
Vous savez quoi ? Vous m’avez mis du baume au cœur avec les quelques petits mots qui suivent :
« Madame Despentes est désormais reconnue. Ce ne sont pas vos mugissements qui en feront une victime. »
D. est reconnue, et donc ?
Par chance mes mugissements n’en feront pas une victime, à moment, le doute m’a bité !!!
@ F68.10
« Madame Despentes ne fait que représenter l’idéologie qui comble ce vide 4. Mme Despentes a écrit Baise-moi très tôt, en 1994, et King Kong Théorie, c’est 2006 ; donc, si vous voulez le fond, tournez-vous vers les œuvres qui ne sont pas de jeunesse. Ce fond ne vous plaira probablement pas, mais au moins n’intervertissez pas les rôles de « Baise-moi » et de « King Kong Théorie ». »
Je ne parle pas même de son positionnement politique. Son propos sur Charlie Hebdo ne relève pas même de la politique, mais de cette allure dépresso-toxico-haineuse.
Virginie Despentes a-t-elle évolué au fil des années ? Peu m’importe, les bribes que j’en perçois restent du même registre et cela ne m’intéresse pas un seul instant.
« « Baise-moi » est assez mauvais ou, plutôt, se juge comme un pamphlet ou une œuvre de débutante. Le problème avec « Baise-moi » fut simple: il fut catalogué comme film pornographique et donc interdit de projection en salle. Si vous prenez « Baise-moi » pour un film pornographique, permettez-moi de vous offrir un billet aller simple pour l’hôpital »
Si par pornographie, on entend quelque chose dans l’esprit de l’érotisme, lié à la recherche du plaisir et de la jouissance, mais en version brutale et obscène, non, « Baise-moi », en plus d’être un nanard mal filmé et mal joué, n’est pas du tout pornographique. Il n’y a rien de « bandant », pour le dire vulgairement, dans ce nanard. Juste un discours et histoire toxique d’adolescent attardé qui, je me répète, se croyant dans la rébellion, fait un hymne permanent à la soumission sous toutes ses formes possibles (drogues, prostitution, etc).
@ Marcel
« Je ne parle pas même de son positionnement politique. Son propos sur Charlie Hebdo ne relève pas même de la politique, mais de cette allure dépresso-toxico-haineuse. »
Si votre seule attaque sur les œuvres de Despentes porte sur la personnalité de l’auteur, je ne peux que rejeter ces non-arguments. Si la littérature se devait d’être jugée ainsi, cela se saurait. Un auteur n’est pas une personne à imiter religieusement comme certains le feraient d’un prophète. Un auteur n’a nullement à être un être bien sous tout rapport. Ni même bien sous un quelconque rapport.
« Je suis écrivain (parmi d’autres choses) mais en anglais seulement. Il y a quelques années, un autre écrivain américain de ma connaissance, un individu très cultivé, m’a demandé ce que je pensais de Céline, moi qui pouvais le lire en français. Je lui ai dit que je ne m’étais jamais permis de lire Céline (il faut dire que mon père était juif, et si j’avais vécu en France pendant la guerre j’aurais été gazé par les copains de Céline). Il m’a dit que j’étais c*n, que, surtout, vu ce que, moi, j’écrivais, je devais beaucoup à Céline: peut-être à travers Garcia Marquez et d’autres, mais même si je refusais de le lire, il m’avait influencé. Donc j’ai lu Voyage au bout de la nuit. Et puis je l’ai tout de suite relu. OK, il a été un c*nnard, il a été immoral et ignoble, et si je croyais en l’enfer, j’espérerais qu’il y pourrisse, mais mer*e, que c’est magnifique ce qu’il a fait. Donc oui, on peut apprécier les livres de n’importe quel écrivain indépendamment de ce qu’il a été comme personne. » — Kevin Dolgin
Et encore heureux.
« …un hymne permanent à la soumission sous toutes ses formes possibles (drogues, prostitution, etc). »
Faux:
« Raconter mon expérience [de la prostitution]. C’est difficile. Je bute toujours sur ce chapitre. Je ne suis pas en train d’affirmer que dans n’importe quelles conditions et pour n’importe quelle femme ce type de travail est anodin. » — Virginie Despentes.
« Si par pornographie, on entend quelque chose dans l’esprit de l’érotisme, lié à la recherche du plaisir et de la jouissance, mais en version brutale et obscène, non, Baise-moi, en plus d’être un nanard mal filmé et mal joué, n’est pas du tout pornographique. Il n’y a rien de « bandant ». »
Exact. Cela pose donc la question de la nature de l’argument invoqué pour lui interdire les salles de cinéma. Il ne s’agit pas d’une interdiction au moins de 18 ans, ce qui aurait été raisonnable, mais bien d’interdiction en salle au motif de pornographie. Au moins, si je veux voir un film de boules à Lausanne en présence d’un public intéressé, j’ai le cinéma Le Moderne. En France, je ne peux pas. Et, en fait, on utilise la loi sur l’interdiction de la pornographie en salle pour interdire ce que vous êtes donc d’accord pour qualifier de non-pornographie.
Ah, en fait, non… on me dit que le cinéma porno de Lausanne va être transformé en garderie… Ironie… les spermatozoïdes évoluent…
Et moi, honnêtement, j’adore les nanards. Vous connaissez les Trois Trombes dans Jack Burton dans les griffes du mandarin ? Réalisme total.
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@ duvent
« What the fuck ! En français : c’est quoi ce bordel ? Quand est-ce que j’ai fait cette bêtise ? À la manière forte en plus ??? »
Vous, personnellement, non. Mais les pratiques de ce milieu ne peuvent prospérer sans un discours public qui les légitime. Discours identifiable dans la sphère publique quand on tend un peu l’oreille. C’est là que se jouent les constructions mentales qui permettent ou pas d’interner les homos. Donc, quand vous qualifiez de « porte ouverte » ce type de sujets, oui, vous banalisez des discours aboutissant à ces effets. Que vous les aimiez ou pas, les œuvres de Despentes ont vocation, indirectement, à impacter ce genre de représentations mentales. Effet collatéral de son histoire personnelle. Ce ne sont donc pas là des « portes ouvertes » qu’on enfonce en traitant de ces sujets, ne vous en déplaise. Ce sont même plutôt des portes fermées. Et Madame Despentes les a inventoriées, ces portes fermées.
« D. est reconnue, et donc ? »
Et, donc, cessez de prétendre que vos mugissements risquent de la persécuter. Ou, plutôt, cessez de mettre ces mots dans ma bouche. Ce que vous avez bel et bien fait.
MES PLÉIADES
@ F68.10 24 août 15h28
Je vais vous dire, camarade, des choses sans importance – comme d’hab !
J’en possède 2 cents… à vue d’œil. Georges Pompidou les avait tous, Gallimard le servait en premier, forcément. Macron en a emprunté 3 pour sa photo officielle, ceci pour vous rappeler la différence qu’il peut y avoir entre nos Présidents.
Le premier je l’ai acheté quand j’étais étudiant, sur ma bourse : Shakespeare. Quand je suis parti à l’armée je l’ai mis dans ma musette, il me suivait dans les op. ; plus tard j’ai acquis la nouvelle traduction : une petite merveille. Le second ce fut Homère, L’odyssée dans la traduction de Victor Bérard.
Je ne vous parle même pas de ceux qui suivirent… je vous avoue que je ne les ai pas tous lus mais j’en ai relu plusieurs, ça compense.
Depuis que « j’écris » je ne lis plus… je regrette mais les temps sont durs et si j’arrêtais par les temps qui courent je n’oserais plus me regarder dans la glace quand je me rase et je me couperais, je ne suis plus habile avec mes doigts.
Je rêve d’un temps où je vivrai avec eux du matin au soir.
Alors pour en revenir au sujet d’aujourd’hui je vous dirai sobrement que de votre Despentes j’en ai rien à talquer et que je trouve que l’éloge que vous en faites est pure comédie.
Les vieux, mon vieux, ils sont comme ça !
Transmettez mes bons sentiments à Madame duvent…
@ Bill Noir
« Alors pour en revenir au sujet d’aujourd’hui je vous dirai sobrement que de votre Despentes j’en ai rien à talquer et que je trouve que l’éloge que vous en faites est pure comédie. »
Monsieur. Je me moque complètement que vous achetiez des tomes de la Pléiade ou pas. Je n’ai pour ma part jamais acheté un seul tome de la Pléiade. Mes habitudes, quand j’habitais à Paris, c’était de chiner les vieux bouquins chez les divers libraires. Plus tard, je me suis pris de passion pour divers textes philosophiques dans une tradition un peu plus analytique que continentale. Actuellement, j’ai tout ce qu’il me faut comme textes, modernes et vieux, avec Internet. Je n’ai jamais acheté un tome de la Pléiade, et je n’en vois nullement le besoin.
Ce qui est sidérant, par contre, c’est que vous prétendiez que je fasse l’éloge de Despentes. J’affirme simplement qu’elle a un rôle à jouer dans le paysage littéraire. Que ce ne sont pas les gros mots qui masquent le fond, et que c’est utile que soient publiés des textes montrant que le « féminisme » n’est pas condamné à n’être qu’une vulgate victimaire ou une défense rabique de la maternité sous prétexte d’indépendance des femmes. Il y a tant de confusions dans les positions des féministes que, oui, des textes comme ceux de Despentes ont au moins le mérite de tailler dans le lard des non-dits. Ce n’est pas tant la revendication de l’égalité entre les sexes qui caractérise la position de Despentes, mais la reconnaissance des identités, la défense des choix individuels et la liberté à disposer de son corps. Ce sur quoi, qu’il s’agisse de la gauche ou de la droite ou des féministes, la société française fait preuve d’une mentalité paternaliste (ou maternaliste, c’est selon…) affligeante. Son texte est donc utile et nécessaire: il brise le tabou de l’égalitarisme franchouillard en matière de « féminisme » pour défendre la liberté individuelle.
Mais de là à prétendre que je fais l’éloge de Despentes, vous rigolez ? Reconnaître les mérites d’une œuvre dans le champ culturel, c’est idolâtrer Despentes et s’agenouiller devant ses propos les plus crétins comme ceux sur Charlie Hebdo ? Non, Monsieur. Je ne fais pas un éloge de Despentes. Je monte une défense de Despentes face à des gens qui refusent d’accepter la pertinence de ce type d’œuvres et qui se trouvent les prétextes les plus vils, intellectuellement, pour dénigrer le travail d’autrui au-delà du légitime. Je ne défends pas tant Despentes que je m’oppose à des fats.
Ce n’est pas « pure comédie » que, oui, je défende la légitimité des choix individuels, la reconnaissance des diverses identités et la liberté à disposer de son corps. C’est là de la décence humaine de base. Ma défense de Despentes se limite grosso modo à cela, et c’en sera une défense déterminée tant que je ne verrai que des prétentieux prendre ombrage de gros mots pour nier l’existence d’un quelconque fond.
Maintenant, non, Monsieur. Entre Roshdi Rashed et Madame Despentes, j’ai plus d’admiration pour les textes de Roshdi Rashed que ceux de Madame Despentes. Je trouve que le roman est un concept assez has been, et Vernon Subutex m’est tombé des mains au milieu du deuxième tome. J’ai préféré ses œuvres plus précoces, comme Les Chiennes savantes ou Bye Bye Blondie. Je trouve cela au fond assez léger et plaisant quand on n’a pas peur des gros mots et qu’on ne détourne pas le regard dès qu’on voit passer un zonard.
Mais entre nous, j’ai mieux à faire que de lire du Despentes.
Par contre, je constate que beaucoup de gens ont peur des gros mots.
C’est là un comportement vraiment immature.
Leçon de chose à Billy black old kid :
Si l’homme est enceint, c’est que c’est un femme, fille elle aussi de la mère patrie.
@ F68.10
« Je ne parle pas même de son positionnement politique. Son propos sur Charlie Hebdo ne relève pas même de la politique, mais de cette allure dépresso-toxico-haineuse. »
Si votre seule attaque sur les œuvres de Despentes porte sur la personnalité de l’auteur, je ne peux que rejeter ces non-arguments. Si la littérature se devait d’être jugée ainsi, cela se saurait. Un auteur n’est pas une personne à imiter religieusement comme certains le feraient d’un prophète. Un auteur n’a nullement à être un être bien sous tout rapport. Ni même bien sous un quelconque rapport. »
Par allure dépresso-toxico-haineuse, je ne parle pas de Virginie Despentes que je ne connais pas et ne souhaite pas connaître, mais du message de ses productions. Il me semblait avoir été clair. Rien à cirer qu’elle soit bien ou mauvaise sous tout rapport. Ce qu’elle écrit et dit, c’est de la déjection dépresso-toxico-haineuse, un hymne permanent à la soumission, aux violeurs dans Baise-moi (appelé « Rape me » à l’étranger), aux islamistes plus tard au sujet de Charlie Hebdo.
« Exact. Cela pose donc la question de la nature de l’argument invoqué pour lui interdire les salles de cinéma. Il ne s’agit pas d’une interdiction au moins de 18 ans, ce qui aurait été raisonnable, mais bien d’interdiction en salle au motif de pornographie. »
Vous êtes réellement en train de vous interroger sur l’autorisation de diffusion en salle de cinéma au sujet d’un film qui n’est plus en salle de cinéma depuis 22 ans ?
@ F68.10 25 août 13h11
« …vous rigolez… »
Oui Monsieur je rigole… pas toujours… mais souvent !
C’est encore heureux…
@ F68.10 25 août 13h11
« …vous rigolez… »
Oui mais pas avec n’importe qui… hélas !
@ F68.10 25 août 13h11
Avec vos balades sur les quais de Seine à farfouiller dans les caisses des bouquinistes, vous me faites beaucoup penser au regretté Président Mitterrand !
@ F68.10 25 août 13h11
La Pléiade… bof ! Il n’y a guère que les plus grands textes de l’Humanité !
@ Bill Noir
« Avec vos balades sur les quais de Seine à farfouiller dans les caisses des bouquinistes, vous me faites beaucoup penser au regretté Président Mitterrand ! »
Je traînais davantage rue du Cardinal Lemoine. Je n’ai jamais mis un pied chez un bouquiniste des quais de la Seine. Et les gens avaient tellement l’habitude de sortir leurs encombrants dans la rue sans autre forme de procès à Paris qu’on y trouvait parfois des perles. J’avais alors une approche complètement opportuniste de mes lectures. Je suis maintenant un peu plus organisé.
Quant à la Pléiade, oui, je m’en moque. Je trouvais davantage mon bonheur dans la collection des Belles Lettres. Un texte n’est pas grand parce qu’il est reconnu mais parce qu’il vous parle et résonne avec vos centres d’intérêts et questionnements. Je ne lis pas des livres parce qu’ils ont été adoubés par une quelconque autorité intellectuelle, mais parce que, de prise de note en prise de note, je tombe sur des références qui me sont inconnues et que j’ai envie de creuser. La Pléiade ne contient donc pas ce que je recherche. Par exemple, si je recherche l’Odyssée, je ne vais pas me tourner vers la Pléiade. Je vais me tourner vers la traduction faite par Ernst Zermelo, en allemand en 1930, parce que je suis curieux de ce qu’a fait ce bonhomme dans son temps libre… Cela n’est pas dans la Pléiade, mais chez Springer Verlag, dans le premier tome de ses œuvres complètes, publié en 2010.
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@ Marcel
« Par allure dépresso-toxico-haineuse, je ne parle pas de Virginie Despentes que je ne connais pas et ne souhaite pas connaître, mais du message de ses productions. »
Virginie Despentes n’est pas un exemple pour la jeunesse. Je doute qu’elle prétende en être un. Le message qu’elle envoie, c’est que, oui, certaines personnes ont des choses à dire. Même un tueur à gages à le droit d’écrire un livre s’il a des choses intéressantes à dire. La qualité de ce qu’il évoque n’a pas à passer par une quelconque autoflagellation pour ses crimes.
La littérature, cela n’a rien à voir avec « être un exemple pour la jeunesse ». Cela peut. Cela peut ne pas.
« …un hymne permanent à la soumission… »
Non. Ce n’est pas vrai. C’est là vos jugements de valeurs sur la prostitution et la drogue et peut-être même sur le MMA et le lancer de nains. Madame Despentes les conteste. Sur le fond. Vous ne pouvez vous prévaloir de vos seuls jugements de valeur pour esquiver le fond des ouvrages de Despentes, qui les conteste bien sur le fond même. Ce serait là une pétition de principe, vu que c’est bien cela qu’elle remet en cause.
« …aux violeurs dans Baise-moi… »
Virginie Despentes pose explicitement la question de pourquoi il ne serait pas légitime de violenter physiquement et très brutalement les violeurs, hors cadre légal. Elle ne fait donc aucun hymne permanent aux violeurs. Elle attend que les hommes se saisissent de la question et elle fait le tour de cette question. En aucun cas elle ne fait un hymne aux violeurs.
« Vous êtes réellement en train de vous interroger sur l’autorisation de diffusion en salle de cinéma au sujet d’un film qui n’est plus en salle de cinéma depuis 22 ans ? »
C’est un précédent juridique. Un précédent juridique témoigne de la structure de la loi et des non-dits qu’elle dissimule ou pas. À moins que vous ne me montriez un précédent plus récent sur le même thème, ce précédent d’il y a 22 ans est encore d’actualité.
Je n’irai pas jusqu’à prétendre que Despentes, Flaubert, 100 % même combat, mais bon… il n’y a pas à faire semblant que ce précédent d’il y a 22 ans n’existe pas.
@ F68.10 25 août 13h11
« Lire … avec Internet » c’est se passer du plaisir de manipuler un livre… c’est physique !
Lisez donc Despentes couchée sur papier… ça vous émotionnera !
@ Bill Noir | 27 août 2022 à 08:59
C’est une arnaque bien franchouillarde, la Pléiade. Pour commencer, cela favorise le snobisme et la cuistrerie. À moins d’avoir un mètre ou deux de Pléiade chez soi, on est considéré, dans certains cercles, comme un moins que rien.
Ensuite, cette collection est hors de prix. Il est normal qu’un livre relié soit, mettons, 50 % plus cher qu’un livre broché. À 60 € en moyenne le bout, c’est du vol pur et simple.
Surtout que ce prix et le même pour les nombreux ouvrages tombés dans le domaine public qui font partie du catalogue… 68 € pour le seul tome I des Mille et une Nuits, 200 € pour la Bible en trois volumes, vous appelez ça comment, vous ?
Et qu’on ne me parle pas du coût du travail d’édition. Dans ce dernier cas, il s’agit de réimpression des éditions de 1956, 1959 et 1971.
Il n’y a aucun directeur artistique à payer. La conception graphique est la même pour tous les titres. La typographie n’a pas changé depuis Mathusalem.
La qualité de fabrication ? Parlons-en. Oui, ce sont des livres reliés, mais la reliure est souple. Cela n’est pas particulièrement solide. En fait, à l’origine, la Pléiade était censée être une espèce de livre de poche haut de gamme.
Surtout, l’existence de la Pléiade sert d’excuse à ce scandale de l’édition française, qui fait qu’on ne peut acheter aucun livre relié dans s’pays. Le seul choix offert au cochon de lecteur est le livre de poche (fabriqué n’importe comment) et le livre broché grand format (fabriqué n’importe comment).
Dans tous les pays normaux, civilisés, l’Angleterre par exemple, pour chaque livre publié, vous avez le choix entre la version brochée et la version reliée. Dans le pays du Tiers-Monde dirigé par des snobs incultes qui s’appelle la France, non.
C’est bouquin de m… en grand format, ou (plus tard, peut-être et pas à tous les coups) bouquin de m… en petit format.
Dans certains cas, d’ailleurs, c’est seulement bouquin de m… en petit format, dès la sortie.
Dans cette partie de l’édition qui représente 99,99 % du marché, on n’en a pas, non plus, pour son argent et de très loin.
Dans les pays normaux, civilisés, chaque titre fait l’objet d’une couverture spécifique, souvent conçue par des artistes de talent. En France, non. C’est la même couverture pour toute une collection, et le résultat est souvent minable, paresseusement torché quand ce n’est pas carrément laid.
Mais ça n’empêche pas les journalistes soi-disant « littéraires » de s’extasier sur la « blanche » de Gallimard — tu parles d’un effort de conception graphique, ça n’a pas changé depuis 1911, et comme inventivité, ça se pose là.
Le festival continue à l’intérieur : papier bon à essuyer les légumes, typographie et mise en page dénuées de toute beauté (ne parlons pas du respect des règles du métier), fautes d’orthographe en pagaille, et, pour les ouvrages de connaissance (essais, histoire, science…), cette crapulerie typiquement française qui consiste, bien souvent, à ne fournir ni bibliographie, ni recueil de notes, ni chronologie, ni liste des personnes ou des lieux, ni index général.
Et en particulier pas d’index. Outil de base de n’importe quel livre consacré au savoir. Absence d’autant plus scandaleuse que depuis l’invention du traitement de texte, le travail est largement automatisé.
Je suis tombé de l’armoire, récemment, en constatant que la trilogie de Thierry Wolton intitulée « Histoire mondiale du communisme » (3 tomes, 3 456 pages, 117 € le tout sans réduction si vous achetez les trois volumes, le prix ayant augmenté depuis la sortie, et non l’inverse comme dans les pays non communistes, l’édition numérique à peine moins chère que l’édition papier — et bien sûr pas de version reliée, qu’est-ce que vous croyez ?), eh bien cet ouvrage de référence, somme dont je ne connais pas d’équivalent, ne dispose même pas d’un index.
On se demande pourquoi on rémunère l’éditeur.
Quant aux tables des matières, quand elles existent, elle sont conçues par des types qui devraient être fusillés pour crimes contre la typographie.
Pour revenir aux Pléiade, un ami qui les prise davantage que moi se plaignait, il y a de longues années déjà, qu’on y trouvait, aussi, des fautes d’orthographe.
Dernier indice des plus sûrs, prouvant l’arnaque commerciale et intellectuelle : Michel Onfray se fait systématiquement photographier, chez lui, devant une bibliothèque remplie exclusivement de Pléiade. Ça montre bien qu’il est un philosophe.
@ Robert Marchenoir | 27 août 2022 à 17:34
Un peu exagéré comme d’hab, et pourtant vous n’allez pas à ce que je considère comme l’essentiel et qui fait que je n’ai de livres de la Pléiade que ceux que mon entourage m’a offert gentiment.
Je reproche à cette édition le papier bible qui fait que je suis incapable de lire ces ouvrages, pour deux raisons.
D’abord le contact du papier, sa manipulation difficile pour moi est insupportable, mais surtout la finesse de la feuille qui fait que le texte est en transparence et que je ne peux pas faire d’annotations.
Une lecture sans annotations, sans commentaires en marge, sans interaction avec le texte est une lecture vide de sens pour moi.
Par contre, pour l’esthétique de la couverture, ma foi, il y a une volonté d’élitisme, c’est vrai, en voulant reproduire les présentations des anciens ouvrages qui avaient tous la même reliure, avec le titre en lettres d’or sur le dos.
Cette conception me donne l’impression que ce sont des livres faits pour être vus sur des étagères et pas pour être manipulés par des lecteurs qui aiment revenir sur des textes annotés.
Une forme de snobisme bien connu de nos chères élites.
Le livre de poche s’est voulu à l’inverse plus manipulable, mais hélas le papier des vieux livres de poche a jauni et devient un peu cassant.
Bref, rien n’est parfait.
Peut-être le livre numérique dont on peut choisir sa police, ajuster la taille et la couleur du fond de page.
Mais voilà on perd l’esthétique de l’étagère dans une belle bibliothèque que j’aime bien finalement. 😉
La collection Bouquins me paraît un bon moyen terme entre ces deux extrêmes. Opinion sans publicité !
@ Tipaza | 27 août 2022 à 22:17
Vous n’annoteriez tout de même pas des livres de luxe à 60 € pièce ? Même s’ils n’étaient pas imprimés sur papier bible ?
J’espère que vous n’annotez pas les livres d’art, nombreux à être imprimés sur du papier tout à fait accueillant au stylo ou au crayon, et dont certains sont pourvus de textes de haut niveau scientifique, parfaitement justiciables de commentaires.
Je ne suis nullement réfractaire à l’esthétique d’une bibliothèque, bien au contraire. À condition qu’elle s’accorde avec l’intérêt pour le contenu…
Paradoxalement, certaines collections de poche bénéficient d’un papier de meilleure qualité que certaines collections grand format.
@ Robert Marchenoir | 27 août 2022 à 23:41
« Vous n’annoteriez tout de même pas des livres de luxe à 60 € pièce ? »
Vous avez le luxe à un faible niveau.
Seriez-vous un sous-marin du PS de Hollande qui considérait comme riche tout malheureux disposant de plus de 4 000 € par mois ?
Le seul luxe qui nous échappe est le temps, et donc les seuls livres de luxe sont des incunables. Je n’en ai pas, mais je connais quelqu’un qui en a. 😉
« J’espère que vous n’annotez pas les livres d’art »
Jamais de graffiti sur des reproductions d’oeuvres d’art.
Mes livres d’art n’ont pas de textes de haut niveau scientifique, mais ils ont des reproductions quasi parfaites, c’est pour cela que je les choisis.
Un livre d’art n’appelle pas de commentaires dans la mesure où il ne fait qu’offrir au regard la beauté du monde dans la diversité des représentations humaines.
Et là, pas de commentaires, seule la méditation sur la multiple vision des différentes cultures.
@ F68.10 27 août 15h51
Vous ne manquez pas d’Herr !
Proposer une traduction en allemand de l’Odyssée… à des Français !
Chez ces gens-là Monsieur je ne prise que leurs musiciens, quelques-uns de leurs peintres… et leurs savants juifs !
@ Tipaza | 28 août 2022 à 09:55
« Vous avez le luxe à un faible niveau. Seriez-vous un sous-marin du PS de Hollande qui considérait comme riche tout malheureux disposant de plus de 4 000 € par mois ? »
Quelle drôle de réaction qui est la vôtre ! Je n’ai pas le pouvoir de mettre le luxe à quelque niveau que ce soit. Le luxe est quelque chose de relatif. Un livre de littérature à 60 € est objectivement un livre de luxe, puisque le prix normal d’un tel objet est aux alentours de 20 €.
Une voiture de 10 000 € coûte infiniment plus cher, et pourtant c’est une voiture de péquenot, car tels sont les prix.
Une Pléiade est objectivement un objet de luxe, car fabriqué avec des matériaux et des méthodes qui sont nettement plus proches de l’artisanat que la quasi-totalité des livres vendus sur le marché.
Quant à me chercher des noises en m’accusant de socialisme, vous vous moquez du monde. Je passe mon temps ici à faire l’éloge des riches, de la richesse, de l’argent et de « l’ultra-libéralisme ».
Vous, par contre, vous avez souvent montré des complaisances pour le communisme. Il n’y a que chez vous que le mot luxe est une insulte. Pour moi, c’est un éloge.
En tous cas, vous venez de faire la preuve une fois de plus que la politique salit tout, pollue tout. Cette conversation avait commencé sur un terrain aussi éloigné de la politique que possible : il a fallu absolument que vous réinjectiez ce virus maléfique ici même.
La Pléiade est ancrée fortement, ce qui permet à des gens dont les lunettes ne parviennent pas à une correction parfaite de mieux lire. Cet objet n’est pas non plus très encombrant, ce qui est pratique pour des gens ayant des difficultés à saisir des volumes plus encombrants, pour diverses raisons.
Cela dit pour relativiser le problème de tourner les pages de papier bible, pour certains.
Tel objet convient à certains, pas à d’autres.
Si on ne peut annoter les textes ou les notes, cela peut plaire comme un texte figé dans son état initial, une référence, comme le livre en question se veut être et est pour certains.
Une référence pour un certain temps : on retrouve des textes, les traductions évoluent sans parler de l’état de la recherche.
Une bibliothèque, c’est un peu tout. Mettons de côté la vanité qui se montre en tout, elle est surtout une coupe géologique de la littérature et de la science, le cabinet de curiosité de son lecteur.
Fascinant.
@ Robert Marchenoir | 28 août 2022 à 17:23
« Quant à me chercher des noises en m’accusant de socialisme, vous vous moquez du monde. »
Ben oui, c’était une blague qui comme souvent pour ce qui est des blagues écrites, n’amusent que celui qui les écrit mais pas toujours celui qui les lit.
Depuis le temps que je vous lis ici et sur le blog de Nathalie Meyer, j’ai bien compris que vous étiez hyperlibéral. Faut pas vous mettre dans cet état.
Inutile de me traiter de communiste pour cela, encore que depuis le temps, ça me fasse toujours rigoler.
« Il n’y a que chez vous que le mot luxe est une insulte. »
Ah, pas du tout, le luxe, le vrai, doit être accompagné de raffinement, la marque de la civilisation… peut-être en décadence d’ailleurs.
Sinon à quoi bon, il devient la marque des Barbares qui accaparent et entassent.
Pléiade (suite)
Je me suis tu sur « Pléiade ». Je serai bref.
Le papier bible permet un grand nombre de pages en un petit volume. Je n’aurais pas l’idée d’annoter du papier bible ; il suffit de prendre des notes sur un cahier.
Vanité de montrer sa collection de « Pléiade » ? Encore faut-il avoir des visiteurs.
La collection « Bouquins » a bien des charmes aussi.
La plupart des Français n’achètent pas un livre par an.
@ Robert Marchenoir 27 août 17h34
Remarquable analyse de la stratégie commerciale d’une entreprise un peu particulière, productrice d’objets curieux. Reconnaissons qu’elle n’a guère plus d’intérêt que si vous aviez tenté de nous captiver avec les affres commerciales d’un fabricant de fromages… disons que vous n’avez pas réfléchi à la nature profonde de l’objet « mis sur le marché ».
Un objet qui ne concerne que peu de gens (lire un livre n’est pas commun), qui est aujourd’hui en concurrence avec d’autres pratiques, qui peut être « utilisé » gratuitement dans certains établissements, qui peut se conserver sans risques sauf cataclysmes, qui ne se dégrade que si on agit contre lui avec férocité ; dont l’usage ne demande que des efforts limités, voire émollients ; de fait une marchandise unique, multiforme, dans toute la gamme de la qualité, de la forme, du poids, de la joliesse, de l’odeur, de l’élégance, dont le contenu abstrait occupe un espace sans limite.
Avec une connexion souple entre l’objet et son contenu intime… mais connexion quand même. Tel contenu peut être couché sur du papier boucherie, tel autre sur un vélin supérieur ; habillé d’une couverture conséquente ou quasiment aussi nu qu’un journal du soir.
Dans le fond vous avez entrepris de parler d’un objet indéfinissable, multidimensionnel, intemporel, qui ne vaut que par la qualité de celui qui le possède et qui en jouit.
Dérisoire votre tentative de tenir cette « chose » dans une analyse rationnelle en relation avec les lois du marché.
J’irais même jusqu’à dire que votre insistance à en parler pourrait être considéré comme irrespectueuse par certains maniaques.
J’espère que vous ne m’en voudrez pas de cette insolence respectueuse.
Dans cet univers infini je me suis permis de parler d’un élément particulier, lequel a suscité une forte émotion, particulièrement la vôtre… je suis abasourdi… je ne suis pas habitué à cet honneur…
Cet objet particulier n’est pas un livre, mais une bibliothèque c’est à dire un ensemble de livres qui se tiennent ensemble pour la qualité de leur contenu… enfin pour une grande partie d’entre eux car il faut bien admettre que certains par leurs qualités moindres sont honorés par complaisances diverses.
Afin de les distinguer du vulgum, la maison éditrice a posé un certain nombre de règles d’uniformité matérielle ou culturelle qui permet de mettre cette « marchandise » à part – une sorte d’aristocratie du livre, section littérature au sens large du terme – de façon à ce que leur assemblage en rayons, en caisses, en containers et autres, uniformité qui vaut reconnaissance au lecteur… même à un aveugle lequel par le toucher sait immédiatement à quoi il a affaire. Couverture, papier, caractères d’impression, appareils divers – glossaire, notes, introductions biographiques, historiques, littéraires, tous moyens qui permettent au lecteur le plus démuni d’accéder au plaisir raffiné de la connaissance livresque – autant d’outils d’homogénéisation qui multiplient les pouvoirs des lecteurs les plus ineptes.
Notons au passage que dans toutes les nations culturellement haut de gamme, il existe de tels objets.
Naturellement, la possession d’un tel objet est une fierté pour le propriétaire, pour peu qu’il soit porté à la vanité, celle de croire que possession de l’objet vaut celle de son contenu, c’est la raison pour laquelle vous avez très bien noté que certains, humbles de leurs qualités intellectuelles et connaissant leurs limites, arborent sans retenue leur possession au risque d’être gaussé… on notera des cas célèbres : Messmer en 73 dans une interview télévisée qui repasse en boucle depuis quelques jours ; Jérôme Béglé fut charrié un jour chez Praud pour s’être présenté devant sa bibliothèque en enfilade. Ça fait toujours rire.
Les gens timides – c’est mon cas – cachent leur trésor au fin fond de leur tanière, ils le protègent des regards jaloux de la multitude.
Bien sûr il y a des défauts, le principal étant le papier utilise, dit papier bible, lequel est réservé aux longs récits ! C’est le pire pour tourner les pages et si on se mouille le doigt pour aider c’est la cata ! Il y a aussi la mollesse de la couverture.
Mais, cher camarade, vous devrez convenir que ces désagréments sont indispensables pour limiter le volume et le poids des engins… qu’ils soient utilisés dans la mollesse d’un profond fauteuil ou d’un lit, emportés en voyage ou empoignés dans des maisons de campagne insalubres.
À plusieurs reprises dans votre dithyrambe vous avez utilisé l’expression « bouquin de m…. » en petit et en grand format… Dieu merci la Pléiade en est dépourvu et ce n’est pas demain la veille que Madame D y fera son entrée !
Tout ceci ayant été rappelé il m’est agréable de vous rappeler que la Pléiade nous a permis d’admirer des trésors inestimables. Ainsi en est-il de ces chefs-d’œuvre de l’humanité que sont les quatre romans de la littérature chinoise… comment en aurait-il été autrement !
Je me rappelle encore « ce Pivot » où le premier volume fut présenté… un étonnant enthousiasme s’empara des lecteurs en puissance qui auraient embrassé volontiers ce traducteur sinisant.
Les hons vont en voyage à la Chine… les sages saisissent « leur » Pléiade !
@ Bill Noir | 29 août 2022 à 18:02
Vous vous trompez. Les fabricants de fromages sont très intéressants, et le marché de l’édition est parfaitement accessible à l’analyse rationnelle. Tout comme celui des tire-bouchon à vaporisation hyperbolique.
Vous ne pourriez pas gloser sur le caractère évanescent des Pléiade si des dizaines de personnes n’avaient travaillé d’arrache-pied pour les produire.
Quant à votre allégation selon laquelle je n’aurais pas « réfléchi à la nature profonde de l’objet », elle est aussi méprisante que démentie par mon analyse même. D’ailleurs, il est intéressant de constater ce qu’une réflexion sur ce sujet déclenche comme réactions. Cela confirme mon propos. Roland Barthes n’a pas cité la Pléiade dans Mythologies ; c’est un ratage.
@ Bill Noir
« Chez ces gens-là Monsieur je ne prise que leurs musiciens, quelques-uns de leurs peintres… et leurs savants juifs ! »
Eh bien, il serait temps que vous acceptiez l’idée que les Teutons sont des gens comme les autres. Ces rancœurs du passé n’ont plus leur place.
« Dérisoire votre tentative de tenir cette « chose » dans une analyse rationnelle en relation avec les lois du marché. J’irais même jusqu’à dire que votre insistance à en parler pourrait être considéré comme irrespectueuse par certains maniaques. » — vous @ Robert Marchenoir
Pardon ? Non. L’édition est bien un marché. Et il convient bien d’analyser l’accès à la littérature, au sens le plus large du terme, ainsi que l’accès à l’information en terme de dynamique de marché. Analyser là où le marché fonctionne, là où il dysfonctionne. Comme pour n’importe quel autre marché, bien qu’ils aient chacun leurs spécificités.
Un marché, c’est fait pour maximiser la qualité, et permettre à la demande de rencontrer l’offre au maximum. C’est donc important, comme concept, même quand il s’agit de livres.
« Cet objet particulier n’est pas un livre, mais une bibliothèque c’est à dire un ensemble de livres qui se tiennent ensemble pour la qualité de leur contenu… enfin pour une grande partie d’entre eux car il faut bien admettre que certains par leurs qualités moindres sont honorés par complaisances diverses. »
Pas forcément. Un livre peut être très mauvais, mais, s’il contient ne serait-ce qu’une seule information pertinente qu’on ne trouve pas ailleurs, c’est cela qui en fait sa valeur. Ce phénomène est le plus visible dans la philologie des textes antiques, surtout des textes scientifiques antiques, où des textes nuls sont soigneusement préservés et édités car ils contiennent des informations qu’on ne trouve nulle part ailleurs.
Une bonne bibliothèque, c’est donc une bibliothèque qui contient des textes parfaitement nuls quand ils permettent d’avoir une meilleure connaissance d’un domaine. De plus, des textes nuls qui n’ont pas d’intérêt actuel peuvent en acquérir par la grâce de travaux ultérieurs, et il convient donc d’archiver même des textes particulièrement nuls dans sa bibliothèque pour cette raison: on ne peut anticiper l’avenir de la vie des idées. Je crois qu’on a cité Jacques Abeille, récemment, sur ce blog, par exemple.
« Afin de les distinguer du vulgum, la maison éditrice a posé un certain nombre de règles d’uniformité matérielle ou culturelle qui permet de mettre cette « marchandise » à part – une sorte d’aristocratie du livre. »
Aristocratie du livre ? Mon œil. Personne n’est capable de définir une telle hiérarchie car personne ne peut prévoir le futur. Tout au plus peut-on prendre la pertinence qu’indique l’histoire comme indicateur. Mais, non, la seule hiérarchie du livre qui existe, c’est celle de la pertinence pour le lecteur auquel c’est destiné, ce qui se manifeste par la capacité de ce lecteur de réutiliser sa bibliothèque afin de produire quelque chose de neuf qui réponde à la loi de la demande, que ce soit à court terme ou à long terme.
« Mais, cher camarade, vous devrez convenir que ces désagréments sont indispensables pour limiter le volume et le poids des engins… »
Ma bibliothèque tient désormais dans mon ordinateur. C’est très léger.
Quand je dois chercher un document physique, c’est la croix et la bannière. Un texte de Marc Krasner que je recherche actuellement, extrait d’un colloque de 1956, je dois aller le chercher en bibliothèque à Padoue, à Liège, à Clermont-Ferrand, à Stanford ou au Japon. Ou me fendre de cinquante balles puis le scanner. Pour mon ordinateur. La barbe. J’en ai marre du papier.
Et c’est bien parce que c’est un chef-d’œuvre non reconnu (ou qui commence à l’être depuis 2011) qu’il se trouve être à peu près inaccessible. Et ce serait un bénéfice net pour l’humanité que de le dématérialiser une bonne fois pour toutes.
Maintenant, si un bibliophile veut absolument du papier, je comprends. Mais c’est quand même vachement pratique, pour bosser, d’avoir cela sur son ordinateur.
Mais la dématérialisation est inévitable. Pouvoir faire des recherches automatisées dans les textes, c’est en effet absolument nécessaire dans certains types de travaux. Le gros problème est que cette dématérialisation se couple d’un cadre légal désormais complètement inadapté. Il va falloir à terme repenser complètement les règles légales au sujet du marché de la création culturelle et de l’édition ainsi que de l’accès au savoir.
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@ Patrice Charoulet
« La plupart des Français n’achètent pas un livre par an. »
Préfecture de la Martinique citant le SNL: « En 2019, 52 % des Français ont acheté au moins un livre. »
Et ils en lisent plus qu’ils n’en achètent.
@ Bill Noir
Concernant la Pléiade, j’avais raté ça dans votre réponse :
« Cet objet particulier n’est pas un livre, mais une bibliothèque c’est à dire un ensemble de livres qui se tiennent ensemble pour la qualité de leur contenu. »
Oui, enfin en bon français, ça s’appelle une collection chez un éditeur. Après, que cette collection se pousse particulièrement du col et attire les snobs, c’est une autre chose.
Que cette collection soit marquée par l’exigence d’un appareil de notes, donc se veuille savante et meilleure que les autres, c’est encore autre chose.
Qu’elle ait la réputation d’accueillir uniquement des auteurs morts et devenus des classiques (règle qui est enfreinte désormais), c’est encore une autre caractéristique.
Et que ses fétichistes la voient comme une bibliothèque, c’est à dire une collection qui, dans l’idéal, devrait être achetée intégralement (voire exclusivement) par tout honnête homme, afin justement de constituer sa bibliothèque à lui, c’est précisément ce que mon commentaire visait à critiquer, entre autres.
Et puisque, maintenant, on ne peut plus rien dire sans ajouter « j’ai de bons amis noirs », je m’empresse de préciser que je n’entendais pas, par là, dénier tout mérite à ce légendaire produit de la culture françouése. Loin de là.
Pour répondre à mes deux amis vayavoir du boulot… apapeur on va s’y cogner !
ÉPISODE 1
@ Robert Marchenoir
« …j’avais raté ça dans votre réponse… »
C’est là l’avantage – et le désavantage – des laïus interminables dont l’objet premier est de camoufler la viduité du message. Plus on en colle, plus ça mousse… Ce n’est pas mon genre. Quand je ne me limite pas à 2 ou 3 phrases c’est pour masquer que je n’ai rien à proposer de plus que n’importe quel quidam que la plume démange.
L’extravagance pesante – et inutile – de ma réponse est nullement de vous faire honte mais de vous faire réfléchir amicalement à la « cursivité » [ être cursif ] et à sa qualité première qui est d’économiser le temps et la sérénité des gens qui sont amenés à vous lire.
Permettez-moi de vous enseigner sur mes plaisirs et mes joies : exprimer quelque chose d’intéressant, ou de drôle, ou encore de sinistre et de stupide en une ou deux phrases. Le summum étant une phrase de moins de 10 mots ; cela m’arrive régulièrement… c’est joice ! Ces jours-ci j’ai battu mon record : 2 mots… je ne sais plus à quelle occasion !
Plus qu’esthétique ma position est morale : je n’aime pas déranger.
Pour ce qui concerne le sujet débattu ici – la Pléiade – je vous avouerai que je regrette profondément d’avoir eu l’idée de l’introduire ici étant donné les développements quasi sans limites qui s’en sont suivis.
La prochaine fois qu’une idée farfelue me viendra à l’esprit, soyez assuré que je réfléchirai longuement avant de l’exposer à la foule !
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@ F68.10
« Eh bien, il serait temps que vous acceptiez l’idée que les Teutons sont des gens comme les autres. Ces rancœurs du passé n’ont plus leur place. »
Ne comptez pas là-dessus. J’ai des motifs personnels (familiaux) pour n’être guère enclin à faire des cadeaux à cette tribu de barbares. J’ai aussi des motifs politiques : il faut être aveugle pour ne pas voir que ces gens sont aujourd’hui nocifs pour l’espace européen et qu’à longueur d’années ils nous mettent en danger par toutes sortes de moyens et pour jouer avec les minables qui sont censés défendre nos intérêts nationaux… tous secteurs confondus.
Pour eux la France et les Français c’est que dalle… alors allez vendre votre germanité à d’autres.
Je vous la fais courte parce que vous êtes un ami que je ne veux pas perturber. Aussi je vous accorde deux cadeaux supplémentaires : Thomas Mann que j’ai lu avec plaisir – et Joseph Ratzinger mais comme vous êtes athée-athée ça ne vous dit pas grand-chose.
@ Bill Noir | 31 août 2022 à 16:00
« L’extravagance pesante – et inutile – de ma réponse est nullement de vous faire honte mais de vous faire réfléchir amicalement à la ‘cursivité’ [ être cursif ] et à sa qualité première qui est d’économiser le temps et la sérénité des gens qui sont amenés à vous lire. »
« Permettez-moi de vous enseigner sur mes plaisirs et mes joies : exprimer quelque chose d’intéressant, ou de drôle, ou encore de sinistre et de stupide en une ou deux phrases. Le summum étant une phrase de moins de 10 mots ; cela m’arrive régulièrement… »
Fausse modestie de votre part, et peine perdue en ce qui me concerne. Je fais court quand j’ai à faire court. Je fais long quand j’ai à faire long.
C’est fou le nombre de Français qui disent : vous devriez faire comme moi. Je ne vois pas pourquoi. Il y a là une arrogance bien déplacée. Chacun est différent, et chacun a ses raisons.
Quant au temps d’autrui, je n’en suis nullement responsable. Chacun en fait ce qu’il veut.
C’est curieux, cette haine systématique de la liberté, dans s’pays.
Un des meilleurs écrivains français du XXe siècle écrit : « Ce que j’aime dans l’Académie française, c’est son dictionnaire. » Je suis du même avis. Heureux utilisateur d’un très grand nombre de dictionnaires, quand je lis un excellent auteur (je ne lis rien d’autre), c’est d’abord ce dictionnaire-là que j’ouvre, en cas de besoin.
L’ennui, c’est que, pour la dernière édition, le tome 1 est de 1994, le tome 2 de 2001 ,le tome 3 de 2011. Nul ne sait quand paraîtra le quatrième et dernier tome.
J’ai téléphoné à l’Académie française à ce sujet. J’ai rencontré un excellent répondeur téléphonique.
Je n’ai pas reçu de réponse.
ÉPISODE 1-2
@ Robert Marchenoir
« Fausse modestie de votre part » : appréciation gratuite… ce que vous savez de moi est peu… votre perspicacité a tout de même des limites… Pour ce qui me concerne je suis plutôt admiratif quand je rencontre des gens qui ne sont pas des ânes bâtés [ heu ! Je ne pense à personne en particulier]
« Je fais court quand j’ai à faire court, je fais long quand j’ai à faire long »… moi pareil, mais reconnaissez que vous faites plus souvent long que moi… la différence d’âge peut-être… je fatigue vite !
J’ajoute que quand je ressens le besoin de vous dire le plaisir que j’ai de vous lire je ne m’en prive pas.
J’aime exprimer mon admiration… Dieu merci nos camarades ne nous en donnent pas souvent l’occasion.
« Quant au temps d’autrui je n’en suis nullement responsable. Chacun en fait ce qu’il veut. »
C’est sûr !
« C’est curieux, cette haine systématique de la liberté, dans s’pays. »
Vous trouvez ? ya des tas de gens qui font n’importe quoi dance pays… et on parle d’eux poliment comme s’ils étaient chez eux.
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@ F68.10
Dans mon énumération aimante j’ai oublié le cinéma… Ach ! le cinéma : Murnau, Lang, Wenders, Fassbinder, Schlöndorff, Riefenstahl… et Henkel Von Donnermarck.
Les acteurs Armin Mueller-Stahl, Sébastian Koch, Ulrich Mühe… sans parler des actrices… Ah ! Les actrices !
Un excellent écrivain français écrit, en 1989, « le domaine qui m’est le plus cher, celui de la langue française… ».
Dans les derniers rangs de la société et du fond de mon obscurité, j’ose dire que c’est aussi le domaine qui m’est le plus cher.