La morale n’est pas drôle

Respecter la loi, agir selon sa conscience, se vouloir le plus digne possible : autant d'exigences qui, pour aussi nécessaires qu'elles soient, ne suscitent  pas une adhésion enthousiaste et ne se prêtent guère à l'humour. La morale est ennuyeuse parce qu'elle ne s'autorise aucun chemin de traverse et que sa pureté vite saluée est souvent abandonnée au profit d'une fascination vulgaire et puérile pour certaines dérives.

J'ai honte pour la France à cause de l'effervescence admirative à l'égard de ce convoyeur de fonds lyonnais  d'origine serbe, Tony Musulin, qui a détourné un peu plus de 11 millions d'euros en disparaissant avec son butin le 5 novembre. Apparemment, il n'encourrait qu'une sanction maximale de trois ans d'emprisonnement. La procédure suivie par le Parquet de Lyon déterminera ce qu'il en est sur le plan juridique et pour l'enquête à mener.

L'insupportable acclamation sur le Net de ce délit  me scandalise, qui au prétexte de cet accomplissement sans violence, n'est pas loin de faire de ce probable délinquant un héros. On en manque donc tellement dans notre vie publique pour que nous allions porter sur un pavois médiatique un tel personnage, qui aurait dû d'ailleurs attirer l'attention sur lui bien avant ce détournement ! Est-il imaginable qu'en 48 heures, 14 groupes de "fans" de ce voleur présumé se soient créés et que le nombre de ses partisans puisse aller de 153 personnes à 7000 ! Est-il croyable qu'à Lyon on trouve déjà des T-shirts à l'effigie de Tony Musulin (Le Journal du Dimanche, le site du JDD, nouvelobs.com) ? Est-il banal, devant un acte malhonnête et rentable, de voir adorer à ce point celui qui l'a sans doute perpétré ?

Cette idolâtrie subite est le signe d'un engouement qui la dépasse. Ce n'est pas seulement la curiosité médiatique pour les frondeurs et les fraudeurs, pour ceux qui s'en prennent à l'ordre et aux richesses établis, pour les pied de nez aux riches et aux puissants. Le citoyen affamé de faits divers a toujours été fasciné par le mythe de Robin des Bois acharné à dépouiller les méchants possédants et la triste Banque de France ! Musulin va peut-être couler des jours heureux et choquants à l'étranger sans songer à rendre sa dîme au peuple mais peu importe.

Analyser cette infraction comme une revanche des "petits" contre les "gros", comme le comportement allègrement malicieux d'un détrousseur réparant toutes les injustices sociales et flattant l'envie des modestes constituerait à mon sens une explication insuffisante pour justifier ce raz-de-marée. Plus profondément, loin de voir dans ce délit et dans l'assentiment vulgaire qu'il suscite la marque d'une cassure dans la société, j'y perçois une sorte de gangrène qui, bien au-delà de sa définition judiciaire, a corrompu les tréfonds de notre monde, du plus haut au plus bas de l'échelle. Je n'opposerai pas les humbles aux privilégiés mais je les réunirai malheureusement, quelles que soient les motivations de ceux qui ont décidé de transgresser et de mettre à bas l'éthique, dans une même indifférence à l'égard de ce qui devrait structurer une vie personnelle, une existence collective. C'est à tous les niveaux que paraît se déliter cette "ennuyeuse" morale, les manifestations de cette dégradation arborant ici l'air populaire ou là l'apparence distinguée. Les imbéciles nombreux qui s'extasient sont probablement les mêmes qui vitupèrent la moindre indélicatesse politique ou économique. Incapables de comprendre que tout est lié !

Il n'est pas neutre non plus que ce soit dans la quotidienneté professionnelle la plus limpide et grâce à celle-ci que ce détournement ait été opéré. Dans ce domaine comme dans d'autres plus honorables mais prêtant également à la réflexion, le mal s'approche étroitement de la racine et les mécanismes naturels sont dévoyés. La grève classique tourne de plus en plus à la violence et aux affrontements physiques. La délinquance, voire la criminalité demain, n'auront même plus besoin de constituer une rupture par rapport à la normalité. Elles s'installeront au coeur de celle-ci et viendront pervertir – félicitées par le Net qui n'est pas coupable mais ceux qui y dégorgent n'importe quoi – la familiarité paisible des travaux anciens.

Je suis indigné parce que mépriser la bêtise et l'indécence ne suffit pas lorsqu'elles submergent. Musulin, ce profiteur opportuniste, en dit plus sur notre univers, sur nos liens à l'argent, sur notre sens du droit, sur notre honneur que beaucoup de penseurs et de livres. Il y a quelque chose de pourri dans cette belle République !

On se console comme on peut même si le rapprochement m'a sauté à l'esprit. En France, un voleur qu'on glorifie. Aux Etats-Unis, des voleuses qu'on humilie sur la place publique. Une mère de 56 ans et sa fille de 35 ans ont été contraintes, en Pennsylvanie, de s'afficher durant plus de quatre heures comme les "voleuses" qu'elles avaient été. Elles avaient soustrait les cartes-cadeaux d'une fillette de 9 ans. Les pancartes devant elles annonçaient : "J'ai volé une enfant de 9 ans le jour de son anniversaire. Ne volez pas, sinon voilà ce qui pourrait vous arriver". Pour avoir accepté cette punition publique, les délinquantes devraient bénéficier d'une peine avec sursis. L'exposition puis la sanction, donc (Le Parisien).

Rien de pire que cette dégradation d'humanité offerte à tous. Je suis persuadé qu'aucune peine n'aurait pu être plus décisive que cet outrage suivant l'offense faite à la jeune victime. Le visage de ces deux Américaines à l'évidence démunies châtiées en totale et impudique transparence manifeste à quel point, pour elles, le comble a été atteint et que même la publicité d'une audience n'a rien à voir avec cet opprobre.

Mais quelque chose en nous se révolte contre cette sanction qui renvoie si cruellement à des temps anciens ou à ces législations fanatiques qui coupent la main des voleurs. On ne peut pas tout se permettre. Il y a des attitudes qui ne font pas mal qu'aux coupables.

Entre cette indignité américaine et l'encens français honteusement déversé par les internautes sur Tony Musulin, si on tentait tout simplement la justice ?

 

 

 

   

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  1. Pierre-Antoine

    @PB
    Cher ami,
    Moi aussi cette dérive m’insupporte !
    Mais au-delà de l’irritation, je m’interroge sur le pourquoi de cette fascination ?
    Cette réaction amorale dans la forme, l’est-elle dans le fond ?
    Il me semble que c’est une réaction des « petites gens » face à l’injustice flagrante des puissants qui tiennent les rênes du pouvoir et de l’argent.
    Sans l’excuser, je dirais que le sentiment qui prévaut chez ces « admirateurs » c’est un (faux) sentiment d’équité, de rééquilibrage, de redistribution des cartes, un ras-le-bol.
    On ne donne pas impunément du pain et des jeux au peuple sans qu’un jour un écoeurement salutaire ne vienne à le faire réagir…
    Ils réagissent mal, certes, ils prennent le mal pour le bien et le bien pour le mal (je sais, je fais dans la morale en disant cela), mais ils réagissent…ouf…
    Prenez garde, vous hommes de pouvoir qui l’exercez à sens unique et vous homme de justice qui l’appliquez sans discerner au-delà des articles des codes, que la loi est faite pour l’homme et non l’homme pour la loi.
    Après tout ce ne sont que des applaudissements d’exploits certes amoraux… mais ils auraient pu l’exprimer d’une autre manière moins virtuelle.
    Cordialement
    Pierre-Antoine

  2. Je comprends votre indignation, mais sans la partager tout à fait.
    Vous vivez dans un monde qui (j’espère ne pas vous offenser en disant cela) n’a que peu de rapport avec celui de la majorité des Français.
    Je crois que vous ne mesurez pas à quel point beaucoup d’entre eux se sentent humiliés, le mot n’est pas trop fort, quand ils voient le salaire des traders et autres, et quand ils voient que les banques sont désormais en parfaite santé grâce à l’argent public, et que le chômage bat tous les records.
    Leur raisonnement est peut-être court, mais pour eux, c’est une forme de revanche…
    Avec toute ma sympathie.

  3. Oui, les groupes facebook… je ne sais pas si je vous suivrai jusqu’au bout de vos conclusions :
    – Tout d’abord facebook et autres applicatif participatif sont avant tout des caisses de résonance médiatiques : qu’on parle des sujets d’actualité on line, ou qu’on en parle au café du coin, c’est la même chose. Les gens créent des pages fans pour tout et n’importe quoi. Faut-il vraiment voir un message profond dans l’inscription à cette page ?
    – Pour moi le message, c’est aussi « la réalité rejoint les films que nous avons vus » : on salue une réalité qui dépasse la fiction. Comme on crie olé à la corrida, on applaudit un beau geste. C’est un message « nous sommes contre le sang versé, la brutalité gratuite, la violence quotidienne – si vous êtes délinquants, ayez au moins cette élégance de monter une belle escroquerie, qui ne s’attaque pas aux personnes privées, et qui en plus vous rapporte » – on salue l’intelligence de ce délinquant, par contraste avec la bêtise de tant d’autres. On salue l’adrénaline, le frisson, on s’identifie, comme au cinéma.

  4. Bernard-27400

    Sur Internet nous avons les choeurs et l’orchestre, mais les chefs restent invisibles, bien au chaud à la direction de certains partis politiques ou syndicaux.
    Je ne suis pas du tout étonné par ces acclamations qui ne sont d’ailleurs pas nouvelles; souvenons nous des braqueurs du train Glasgow-Londres ou du gang des égoutiers de Nice qui furent vite sympathiques à une opinion publique voire mondiale à la seule différence que dans ces deux méfaits l’art et la technique semblaient être plus acclamés que les individus eux-mêmes « Sans haine ni violence. »
    Là, si la violence ne semble pas exister, la haine est bien présente, la haine du riche, du capital. Et c’est l’individu qui est devenu un héros. Un Robin des bois ? Pourquoi pas, n’a-t-il pas mis lui aussi à mal les finances de l’Angleterre en soutenant un roi qui passait son temps à guerroyer à droite et à gauche. Nous sommes dans un pays qui compare bien les démonteurs d’un restaurant à service rapide à des Astérix et Obélix, un pays qui est passé maître à justifier le mal, le hors la loi; ce nouveau venu au panthéon des héros n’a donc rien d’étonnant.
    Alors on doit se poser la question du « Pourquoi ». Personnellement je montrerais du doigt l’Education nationale et ses éternelles réformes, gauchistes et démagogiques suis-je tenté d’écrire, une Education nationale qui a préféré mettre en avant des Genet ou des Bourdieu et qui a passé à la trappe des Montaigne ou Euripide ces deux derniers enseignant que « la seule vraie richesse est celle de l’âme » (Phèdre d’Euripide citation reprise par Montaigne dans ces « Essais). Voilà la source, la racine du mal, ceux et celles s’exprimant sur Internet étant juste les excroissances de ces principes, c’est la grande incantation sous les mânes de Coluche « Les riches sont des salauds » oubliant certainement consciemment que Coluche avait conclu « J’aimerais bien être un salaud »… Et eux aussi ils aimeraient bien en être… des salauds. Mais ne le sont-ils déjà pas un peu quelque part ?
    Une pancarte autour du cou sur une place publique, Monsieur l’avocat général est bien gentil. Diogène le cynique nous a appris que la liberté peut se trouver loin de l’argent, je les condamnerais à vivre un mois comme ce philosophe.

  5. Bonjour,
    Il existe bien le délit d’apologie de crime contre l’humanité.
    Existe-t-il le délit d’apologie de crime tout simple ou le délit d’apologie de délit ?

  6. Cher Philippe Bilger, votre étonnement m’étonne. L’effervescence admirative dont bénéficierait ce convoyeur de fonds ne présente pas d’autre spécificité que de s’exprimer sur le net, si j’en crois vos informations. Sans doute ne fréquentons-nous pas les mêmes sites, car je n’ai pas constaté les salves admiratives dont vous faites état, si ce n’est à la lecture du très « honorable » Journal du Dimanche », de son site internet, ainsi que de celui du nouvelobs.com. Il est vrai que je ne suis pas un fervent visiteur de facebook. Mais si vous faites appel à votre mémoire, sans la torturer outre-mesure, vous n’aurez pas oublié, j’en suis sûr, Ronald Biggs, « héros » du hold-up du train Glasgow-Londres, pas plus que vous n’aurez effacé de votre mémoire Albert Spaggiari, immortalisé par le casse de la Société Générale de Nice, qui plus est célébré par le film « Sans arme, ni haine, ni violence ».
    Je vous rejoins en revanche sur votre « profession de foi » : « Respecter la loi, agir selon sa conscience, se vouloir le plus digne possible : autant d’exigences qui, pour aussi nécessaires qu’elles soient, ne suscitent pas une adhésion enthousiaste » .
    A la faveur de votre billet, je me demande si, vous comme moi, nous ne sommes pas condamnés à nous lamenter pour l’éternité quand triomphent depuis des années des carrières politiques émaillées de condamnations et de mises en examen diverses et variées, sans que pour autant ces coups de canifs -ou parfois de hachoirs- portés à la morale publique aient la moindre influence sur les succès électoraux de leurs bénéficiaires. Je m’en voudrais de peiner jpledun ou Laurent Dingli en citant leurs noms. D’ailleurs ils sont connus de tous et cela ne trouble plus personne.

  7. Bonjour M. Bilger,
    Sans faire l’apologie de Tony Musulin, ces mouvements de soutien ne me choquent pas particulièrement.
    Il faut reconnaître que le présumé voleur n’a rien d’un imbécile et qu’il a su, avec beaucoup d’intelligence et peut-être certaines complicités, réaliser le « coup du siècle ». Comme vous le soulignez, il n’a agressé personne et a profité d’une batterie de dysfonctionnements dans cette société de transport de fonds.J’attends d’ailleurs avec impatience que la chaîne des responsabilités soit établie.
    Enfin, il n’est tout de même pas nouveau qu’un brigand suscite l’admiration d’une partie de l’opinion publique, Robin des Bois ou Louis Mandrin pour ne prendre que ces deux exemples, en sont de parfaites illustrations.

  8. Je ne résiste pas à vous livrer la « complainte de Mandrin » datant de 1755:
    « Nous étions vingt ou trente,
    Brigands dans une bande,
    Tous habillés de blanc,
    À la mode des…
    Vous m’entendez ?
    Tous habillés de blanc
    À la mode des marchands.
    »
    « La première volerie
    Que je fis dans ma vie
    C’est d’avoir goupillé,
    La bourse d’un…
    Vous m’entendez ?
    C’est d’avoir goupillé
    La bourse d’un curé. »
    « J’entrai dedans sa chambre
    Mon Dieu, qu’elle était grande !
    J’y trouvai mille écus,
    Je mis la main…
    Vous m’entendez ?
    J’y trouvai mille écus,
    Je mis la main dessus. »
    « J’entrai dedans une autre,
    Mon Dieu, qu’elle était haute !
    De robes et de manteaux
    J’en chargeai trois…
    Vous m’entendez ?
    De robes et de manteaux,
    J’en chargeai trois chariots. »
    « Je les portai pour vendre
    À la foire en Hollande.
    J’ les vendis bon marché,
    Ils n’ m’avaient rien…
    Vous m’entendez ?
    J’ les vendis bon marché,
    Ils n’ m’avaient rien coûté. »
    « Ces Messieurs de Grenoble
    Avec leurs longues robes,
    Et leurs bonnets carrés,
    M’eurent bientôt…
    Vous m’entendez ?
    Et leurs bonnets carrés
    M’eurent bientôt jugé. »
    « Ils m’ont jugé à pendre,
    Ah ! c’est dur à entendre !
    À pendre et étrangler,
    Sur la place du…
    Vous m’entendez ?
    À pendre et étrangler,
    Sur la place du Marché. »
    « Monté sur la potence
    Je regardai la France,
    J’y vis mes compagnons,
    À l’ombre d’un…
    Vous m’entendez ?
    J’y vis mes compagnons,
    À l’ombre d’un buisson. »
    « Compagnons de misère,
    Allez dire à ma mère,
    Qu’elle ne me reverra plus,
    Je suis un enfant…
    Vous m’entendez ?
    Qu’elle ne me reverra plus,
    Je suis un enfant perdu !  »

  9. A mon avis, cette amoralité se nourrit de celle des pouvoirs économiques et politiques, et des difficultés de la société à la combattre sur le terrain du droit et de la politique.
    Cela ne la justifie pas, mais contribue à l’expliquer.
    De plus il y a un contraste saisissant entre la violence, y compris économique, que subissent quotidiennement un grand nombre de personnes, et l’absence de violence avec laquelle ce forfait a été accompli.
    Dans un monde de paillettes et de strass ça brille, même si au fond c’est moche, comme beaucoup de ce qui nous est vendu médiatiquement.

  10. Justice au singulier ou Morale au pluriel ? Il est bon de savoir qu’il manque plus de 11 millions à l’économie de la France ! Un coup de maître pour certains, un coup de poignard pour d’autres ! La justice fera le reste !

  11. @Bernard 27400,
    « Diogène le cynique nous a appris que la liberté peut se trouver loin de l’argent, je les condamnerais à vivre un mois comme ce philosophe »
    Ne craignez-vous pas de les inciter ainsi à l’exhibitionnisme sur la voie publique ?

  12. Jean-Dominique Reffait

    Vrai sujet complexe.
    Il y a des ponts invisibles entre la morale, l’amoralité et l’immoralité. Ces passerelles ne se réduisent pas à quelques petits arrangements de confort en soi et sa conscience ; elles résultent aussi de la complexité d’une perception sociale des droits et devoirs de chacun dans la société.
    Vous écrivez avec justesse : « Les imbéciles nombreux qui s’extasient sont probablement les mêmes qui vitupèrent la moindre indélicatesse politique ou économique. » Mais alors, que direz-vous à un homme comme moi qui, souvent bien indulgent envers les manquements des uns, trouve matière à sourire à l’égard de ce hold-up par évaporation ?
    Je m’efforce depuis mon adolescence de cultiver une morale stricte qui n’a cependant rien d’austère tant je la place au rang des bonheurs de la vie, des manifestations d’amour et d’estime qui interdisent de nuire, qui exigent d’assister, qui conduisent à faire bien. Je ne pense pas avoir jamais dérogé de façon consciente à des principes stoïciens mâtinés de kantisme. Et l’un des aspects de cette stricte morale réside dans l’assentiment et dans l’impossibilité d’imposer ces principes aux autres autrement que par la conviction.
    Pour autant, ce casse m’a amusé. Parce qu’il n’y eut aucune violence, parce que l’argent volé ne représente rien d’autre que du papier, étant soustrait à la Banque de France avant d’entrer dans le circuit économique où ce papier aurait alors – et alors seulement – correspondu à une valeur travail. D’un point de vue de la technique économique, cet homme n’a lésé personne, il n’a pas confisqué l’épargne de son prochain, il n’a spolié le fruit du labeur de personne. Je comprends bien que le système économique exige que, pour établir la confiance financière, chacun ne puisse imprimer ses propres billets ni se servir au cul du camion et c’est uniquement cette rupture du pacte de confiance financier qui justifie les poursuites judiciaires à l’encontre de cet homme. Il n’a pas fait un seul malheureux dans l’histoire, ni de près, ni de loin. Si son geste n’est pas moral, au sens où il n’a pas fait le bien, il n’est pas immoral non plus, n’ayant causé aucun mal. Il est juste amoral, dénué de toute signification morale.
    Les réactions sur Facebook m’ont échappé, bien qu’y ayant des amies très vigilantes. Là encore, ne nous emportons pas plus loin que la signification réelle de l’intention. L’autre jour, sur le même Facebook, je découvrais un groupe baptisé : « Pariez sur la date de capture et de pendaison de Sarkozy » et qui vois-je parmi les membres : Anne-Aymone Giscard d’Estaing ! Quelle signification attribuer à ce genre de choses, tout comme à l’enthousiasme feint au sujet de ce convoyeur définitif ? J’y vois la marque d’une dérision outrancière plutôt que l’apologie du régicide ou du vol. L’excès parodique de l’enthousiasme qui s’amuse d’un pied de nez au système, parce qu’il ne s’agit que d’un pied de nez, presqu’un gag.
    Il en va évidemment tout autrement de ces personnes américaines qui ont volé un enfant, acte à mes yeux bien plus grave que l’évaporation de quelques morceaux de papier, aussi soigneusement imprimés soient-ils. La particularité de la sanction est bien américaine, répandue et acceptée dans ce pays étrange. Je suis moins catégorique que vous : si un délit constitue un dol pour la société, si les responsables acceptent cette peine alternative en échange d’un sursis, si la conscience d’avoir nui à quelqu’un devait se faire jour dans l’esprit de ces femmes à travers cette exposition, j’y trouve des vertus pédagogiques plus efficace que la prison.
    Nous vivons, Philippe, dans une société qui est organisée de façon malhonnête et cette malhonnêteté fondamentale est corrigée à la marge par la conscience des uns et des lois pour tous. Sans malhonnêteté congénitale, point besoin de loi. Un expert-comptable de mes amis m’expliquait qu’aucune entreprise ne pouvait se développer avec succès sans contourner, du moins partiellement, les lois et règlements nombreux. L’abus de bien social est qualifié par lui d’outil de gestion. Non pas qu’il faille en user et abuser sans discernement, mais le système induit de négocier des arrangements avec la loi.
    Enfin, et pour chevaucher de concert avec vous, quels sont les signes visibles de cette morale au plus haut sommet de l’Etat, garant constitutionnel de la Loi ? La violation manifeste du code des marchés publics concernant les sondages de l’Elysée pour des montants élevés vaudrait la prison assurée à n’importe quel maire ou président de Conseil Général qui agirait de même. Ici, rien, une vague polémique sans que le Parquet, placé devant l’évidence reconnue d’une infraction caractérisée, ne bouge la moindre oreille. Le voleur de Lyon n’a guère embarqué que quatre ans de sondages frauduleux élyséens.
    C’est le monde tel qu’il va, tel qu’il a toujours été, il faut s’en arranger sans s’énerver, en s’efforçant, quand cela nous est possible, de nous maintenir à l’écart de cette bacchanale informe.
    PS. J’espère que ce commentaire aura plus de succès technique que celui sur le précédent billet qui a disparu dans les tuyaux internet.

  13. Cher Philippe,
    Votre réaction est surprenante et pour le moins inopportune dans les temps que nous vivons. Que vous soyez choqué je peux le comprendre. Choqué par quoi exactement ? Les manifestations de joie entourant ce fait divers, ou le néant que constitue « la morale » dans le monde qui nous entoure ?
    Tous les dépositaires de l’ordre public ont fauté. Ce 9 novembre, anniversaire de la chute du mur de Berlin est aussi le jour de la rencontre de P.Bilger avec une réalité dont il a cherché à se protéger.
    Ces faits que vous évoquez ne sont que des péripéties dans le déroulement quotidien, d’autres suivront, bien pires, plus affligeants, 40 ans d’individualisme, de négation des valeurs de nos parents, notre époque a su détruire, elle a aussi su créer la religion mondiale « l’argent » et quoi d’autre ?
    J’entends souvent, lorsque je m’interroge sur l’avenir de la jeunesse, « ils feront comme nous, ils se débrouilleront », Ponce Pilate !
    L’heure n’est plus aux indignations, la partie qui se joue entre les grands de ce monde consiste à se préserver tout en évitant le chaos mais d’abord se préserver. Allez lire votre billet de ce matin dans deux ou trois collèges et lycées, vous n’en sortirez pas indemne. Il est beaucoup trop tard, sauf à envisager ce que nous devons faire pour que demain puisse changer les mentalités. Il faut toujours un premier jour.
    Ce n’est pas la révolte en elle-même qui est noble, mais ce qu’elle exige. A. Camus.
    Fraternellement vôtre.

  14. « On en manque donc tellement (de héros) dans notre vie publique pour que nous allions porter sur un pavois médiatique un tel personnage…  »
    Non, nous n’en manquons pas, mais á force de les dénigrer, de les moquer, á toutes les sauces et sur tous les supports médiatiques, ces vrais héros ont perdu de leur influence.
    Continuez comme ca, chers moqueurs, et PB va bientôt avoir tout á fait raison.

  15. Merci M. Bilger, vous avez l’art de ramener vos lecteurs à la raison.
    Car si moi aussi je me suis amusé à lire hier soir sur lefigaro.fr les commentaires frondeurs unanimes, je n’en oublie pas moins en effet que cette tolérance à l’égard du faible qui dépouille le fort est
    nuisible. Elle est la marque de problèmes sociétaux profonds, d’un peuple qui ne se voit plus comme un ensemble solidaire. La reconnaissance ne va plus à celui qui s’efforce de s’émanciper dans le respect de tous et par le fruit de sa persévération laborieuse. Cercle vicieux donc qui tire toute une société vers le bas.
    Il est accepté que chacun jour sa partie, tire son épingle du jeu. On rentre dans la logique du petit jardin, chacun cherchant son petit confort, quel qu’en soit le prix pour son environnement. Et on admire
    ceux qui réussissent à se construire un paradis par des actes éclatants, quelle que soient leur conséquence pour la communauté
    nationale. Plus de destin collectif, voici la racine du problème.
    La plus dangereuse des conséquences n’est certainement pas la perte de ces 10 millions d’euros mais cette acceptation de l’égoïsme individuel qui s’applique non seulement aux Robins des Bois mais aussi aux dirigeants et à tous ceux qui détiennent le pouvoir.
    Comment trouver autrement une explication à l’absence de soulèvement d’un peuple qui se fait dépouiller à chaque instant ? Prix très
    élevés, qualité médiocre des biens et services, abandon de l’Etat, salaires bloqués, etc… Tout ça au bénéfice de quelques médiocres qui veulent une part de gâteau toujours plus grande sans prendre la part des responsabilité afférente.
    J’apporte cependant une nuance à votre propos. Attention à ne pas devenir trop aveugle. Votre incompréhension et votre sévérité face à ce type de réaction révèle peut-être que vous ne saisissez pas exactement l’ampleur des dégâts.
    Que faire quand les classes moyennes ne peuvent guère se payer mieux que des appartements déprimants dans des banlieues grises, pour manger des pâtes sur une table Conforama en carton trop chèrement payée sans pouvoir se payer des loisirs quotidiens dans un environnement ou le moindre demi Kronenbourg coûte 4€ ?
    Le faible espoir de progression salariale ne condamne-t-il pas à rêver de Loto ou de grand coup ?

  16. On peut aussi prendre ça pour une vaste plaisanterie. Qui, personnellement, m’amuse beaucoup, bien que je sois ce qu’il est convenu d’appeler « une honnête citoyenne ».

  17. Denis Monod-Broca

    Oui, la morale a mauvaise presse. Et la transgression est portée aux nues.
    L’exemple vient de haut : ceux qui nous parlent dans le poste ne se prétendent-ils pas tous plus ou moins rebelles ?
    Un chanteur n’avait-il pas tenté, il y a quelque temps, de porter plainte pour « atteinte à son image de rebelle » parce qu’une photo de lui en père de famille poussant la poussette de son bébé avait été diffusée dans la presse ?
    Tout cela n’est pas très nouveau. Le prophète Esaïe déjà, s’adressant à la ville de Jérusalem, l’avait accusée en ces termes : « Tes princes sont des rebelles »
    Et puis cette manie que nous avons d’affirmer que la loi est mauvaise et qu’il faut la réformer, n’est-elle pas le comble de la transgression ?
    Ce climat général n’empêche pas que ces groupes de soutien à un voleur soient absurdes.
    Mais ils contiennent certainement une bonne part de provocation. Et il est de bonne politique de ne pas riposter aux provocations.

  18. Le considérer comme un héros, un Lucky Luke ou un Robin des bois des temps modernes ne signifie pas que l’on absout son forfait, ou plus précisément son délit, puisqu’il s’agit de ça.
    Je le regarde avec une certaine bienveillance mais ne le soutiendrai certainement pas lorsqu’il passera, et je l’espère, devant un tribunal correctionnel.

  19. Bah ! Faut pas non plus prendre trop au sérieux cet enthousiasme. C’est juste qu’au fond l’histoire est rigolote. On est contrôlés tellement dans tous les sens que lorsqu’un individu arrive à passer entre les mailles des filets de contrôle, on en rigole avec lui. Maintenant, on est juste curieux de voir comment il va s’en sortir et comment il a fait. S’il est arrêté on n’en fera pas un drame, c’est la règle du jeu !… Pour l’instant, tout ça, c’est qu’un film, on attend la réalité !

  20. « Il y a quelque chose de pourri dans cette belle République ! »
    Effectivement, à partir du moment où l’on exclut la morale, tout principe « moral ». On observe ainsi la disparition de la morale publique, le mot lui-même n’étant plus prononcé publiquement qu’avec une certaine honte.
    Cependant ne faut-il pas aussi et plus simplement voir dans cette attitude un effet « Guignol » où l’on préfère voir le gendarme battu et ridiculisé par le bon et sympathique larron.
    Il y a certes là l’expression d’un rejet traditionnel dans notre peuple de ce qui représente la rigueur de la loi.
    Mais la différence avec le spectacle de Guignol est que, après son influence sur les écrans de télévision, Internet lui donne une effet multiplicateur et une résonance sans précédent.
    Le fond du problème est me semble-t-il le relativisme permanent et généralisé qui fait bien sûr perdre de vue les principes fondamentaux nécessaires à une vie collective apaisée.

  21. Les clameurs d’enthousiasme pour ce malfaiteur me semblent au contraire des réactions habituelles à ce genre de forfait. Les postiches n’étaient-ils pas pour certains des sortes de héros en leur temps, le casse de la société générale de Nice n’a-t-il pas été salué pour son ingéniosité (même publiquement, par Jacques Médecin, vrai parangon de vertu d’ailleurs). L’absence de violence lors de la commission du délit fait sauter le dernier verrou de conscience morale invitant à la désapprobation de l’acte (« sans armes ni violence », le coup parfait selon la doxa populaire). Pensons à l’argumentation pro domo récitée immanquablement par les braqueurs de banques lorsqu’ils sont dans le box des accusés: « je n’en veux à personne juste à l’argent des banquiers, je ne suis pas un méchant je me suis uniquement pointé avec un flingue dans une agence » (les clients et salariés présents au moment des faits auront certainement une vision différente de la chose). Je rejoins l’auteur du billet dans ses déplorations, mais je ne décèle pas pour ma part un phénomène attestant un brouillage de l’échelle des valeurs dans notre société contemporaine, juste un atavisme français malheureusement très commun et banal (et bien entendu, très contestable).
    Les passions collectives pour la cavale de M. Treiber constituent un tout autre motif d’indignation. La fascination pour le rocambolesque de cet événement n’a tenu aucun compte de la gravité des faits reprochés à l’évadé ni de l’entrave mise à la pleine réalisation de la justice dans cette affaire sordide. Et pourtant, le plus célèbre cavaleur de France possède désormais sa marionnette aux Guignols, on se rit de l’impéritie des forces policières, et on va même jusqu’à trouver acceptable qu’il bénéficie d’une éventuelle complicité extérieure. Je n’ose imaginer le désarroi des proches des victimes, qui doivent ressentir la brûlure d’un coup de poignard à chaque fois que les médias rapportent complaisamment les péripéties de cette sombre histoire.
    Dernière chose qui n’a peut-être qu’un lointain rapport. Hier a été diffusé le film « Heat » de Michael Mann, fascinant objet cinématographique que j’avais vu plusieurs fois. Un détail cependant m’a sauté aux yeux hier soir: dans la scène inaugurale, les bandits utilisent un cadre de métal serti d’explosifs pour ouvrir le fourgon blindé comme une boîte de conserve. Cet élément n’est pas si anodin, car ce mode opératoire est semblable à la technique utilisée par Antonio Ferrara, qui, paraît-il, était inédite en France. En l’espèce, il est donc vraisemblable qu’un film d’action ait inspiré un passage à l’acte. Et pourtant, le film lui-même reste distancié, refuse de se prêter à l’exaltation des exploits criminels, et présente une brochette de paladins du crime, résolus au pire s’il le faut et vivant une existence finalement très morne et marquée par la solitude pesante de la marginalité.
    Des esprits mal préparés n’auront donc pas su voir la complexité des situations dépeintes dans cette fiction, n’ont pas éprouvé l’effroi que provoque normalement la terrible violence de l’attaque du fourgon, conclue par la mort de 3 convoyeurs abattus à bout pourtant. Au contraire, ils ont adopté les mêmes tactiques, la même détermination que les personnages du film. Ce simple fait doit inviter à mettre en sourdine les fascinations intimes que chacun peut éprouver pour la transgression: il est humain d’applaudir « Robin des Bois » ou ses prétendus avatars, l’habileté de ce Tony Musulin peut susciter des rires goguenards et même l’envie discrète que le voleur puisse profiter de son larcin en vivant sous les cocotiers. Mais pour la majorité, la rigolade se termine lorsqu’on éteint le poste de télévision ou qu’on referme la rubrique « faits divers » de son journal. Quelques autres vont malheureusement déduire de ce fait que l’avenir sourit aux audacieux, qu’il suffit de tendre la main et d’être bien organisé pour ramasser un magot, que la vie honnête n’en vaut pas le prix.

  22. « le relativisme permanent et généralisé qui fait bien sûr perdre de vue les principes fondamentaux nécessaires à une vie collective apaisée. »
    Le relativisme est au contraire la clé de toute vie en société…
    @ PB,
    Ce billet est à rebours des prises de positions de l’opinion publique mais il est opportun.
    Mais pourquoi utilisez-vous sans cesse le terme « moral » dans vos développements ? Ne pourriez-vous pas y substituer le concept « d’éthique », beaucoup plus neutre et totalement compatible ?
    « Personne n’aime qu’on lui fasse la morale, mais le pire est bien quand on doit se la faire à soi-même » (Vincent Juillet).

  23. Bernard-27400

    @ Ludovic
    Pensez vous vraiment que ça choquerait ? L’exhibitionnisme est partout, sur Internet, à la télévision, au cinéma ; l’exhibitionnisme devient même une culture, rentre parfois dans des gouvernements (la Cicciolina). J’en suis même à penser que si une telle sentence existait, une fois la peine accomplie, des justiciables signeraient des contrats avec les plus grands noms du cinéma afin d’exhiber leurs attributs à l’écran, il faudra bien songer à remplacer Depardieu. C’est certainement le seul point positif de la peine qui serait retenu.
    Mais tout à fait entre nous, j’aimerais parfois être deux minutes Diogène le Cynique juste pour soulager ma vessie sur les têtes de ceux qui peuvent soutenir qu’il est de bon ton de disparaître avec plusieurs millions d’euros volés .

  24. Jean-Dominique Reffait

    @Denis75
    Je soutiens tout à fait le terme de morale au lieu d’éthique. Même si, dans le cas d’espèce, je ne pense que l’on puisse porter un jugement moral sur l’acte de ce voleur (on a retrouvé 9 millions, gros pourboire tout de même), la notion d’éthique correspond à une appréciation très variable et individuelle. Sorte de catalogue des opportunités morales de chacun, l’éthique est tout sauf un constituant universel de la pensée.
    Une société qui substitue l’éthique à la morale est en grand danger.

  25. Alex paulista

    Cher Philippe Bilger
    Je crois que vous vous trompez.
    Au contraire, ce que les gens saluent dans ce coup fumant, c’est le respect de valeurs fondamentales.
    – il n’a pas utilisé la violence (valeur de la vie). Ce n’est que de l’argent.
    – il n’a volé personne en particulier (la propriété individuelle). Pour autant on ne peut pas suivre Ludovic en disant qu’il n’a volé personne. Non, il nous a tous volés un peu (surtout vous, j’utilise plus le real). Sinon il suffirait d’imprimer des billets pour résoudre la crise… Remarquez c’est une idée :o)
    – il a travaillé jour et nuit pendant dix ans avant de préparer ce coup (valeur travail). Il n’avait pas beaucoup par mois en attendant. Papa ne l’a pas mis à ce poste.
    – enfin, le courage. Il faut oser. Le gars prend des risques, il a toute la Police à ses trousses.
    Donc, parmi les voleurs, celui-là est justement apprécié pour les valeurs qu’il respecte. On souhaiterait presque que certains politiques en prennent de la graine. Je pense aux suicides de 3 balles dans la tête, défenestrations et écoutes téléphoniques sauvages, aux rétro-commissions tirées de pays pauvres, au népotisme, à l’impunité totale.
    Au bout du compte, donc, le travail finit par payer.
    La morale est assez drôle, finalement.
    On peut aussi penser au courage de certains magistrats qui n’hésitent pas à… se taire lorsqu’on les met au pas. Remarquez que je ne veux pas me poser en donneur de leçons: j’ai abandonné l’idée de me battre contre les murs pour aider les étrangers en France, pour vivre à l’étranger et m’aider moi-même.

  26. Catherine JACOB

    « La morale est ennuyeuse parce qu’elle ne s’autorise aucun chemin de traverse et que sa pureté vite saluée est abandonnée, souvent, au profit d’une fascination vulgaire et puérile pour certaines dérives. »
    J’ai envie de commenter ce point via les diverses ‘traductions’ que pourrait prendre ce terme de ‘morale’ en japonais:
    1- « SeGen_no_Hinan_ni kansuru_Ōkubo » : « Crainte du jugement critique de la société » , le mot pour ‘crainte du’ pouvant également être traduit par ‘lâcheté devant’. Agir conformément à la morale, revient donc, de ce point de vue, à agir de façon à ne pas être l’objet des critiques de la société, et c’est souvent dans ce sens que l’on cherche à se soustraire au jugement moral et qu’on approuve en somme, un courageux ‘comportement libre’ au sens de ‘libéré de la pesanteur et des contraintes morales’ et en particulier comme dans ’C’est une femme libérée, tu sais c’est pas si facile’, autrement dit libérée du joug social en matière de choix dans les domaines du partenaire sexuel, des choix socioprofessionnels, éducatifs etc..
    2- « Shiki » : le moral de ‘C’est bon pour le moral’. Ex: ‘Shiki_Wo_Kobu’: ‘Se motiver pour quelque chose comme en dansant au son du tambour’ – Le son des grands tambours, où se retrouve par ailleurs curieusement la 2de partie de mon nom de famille (Ja_KoBu), représente accessoirement ma première expérience forte du Japon. Sur cette base, plutôt que cette disposition d’esprit qu’est le moral, je verrais bien ‘entrain, ardeur’, comme le fait d’être soulevé, emporté par une force qui nous dépasse et serait susceptible de nous faire accomplir les meilleures comme les pires choses (ardeur guerrière, enthousiasme au sens grec du terme).
    3- « DôToku » : Qui évoque « le chemin (Dô – chinois : Dào ) à suivre pour vivre en conformité avec la vertu (Toku – chinois : Dé ) » et qui suppose la capacité à discerner le Bien ( Zen : chinois : Shàn – notion où se retrouve une idée de ‘concorde qui règne autour d‘un partage équitable‘) du Mal (Aku : chinois : Wu – notion où se retrouve une idée de ‘repoussant‘ tel de par la conscience d’un risque de ‘vampirisation’ du Ch‘i‘). Autrement dit, non pas la contrainte extérieure exercée par la loi (HôRitsu, chinois : FaLu), vis-à-vis de laquelle on se retrouve finalement tout aussi passif que dans le cas de la vampirisation ci-dessus évoquée), mais la disposition intérieure qui suppose la capacité d’agir de soi-même selon des principes (GenRi, chinois: YuanLi). De ce point de vue, la morale qui suppose non pas une promenade le long du chemin de Panurge sous la houlette d’un berger et le mordillement de ses chiens, mais l’effort de mettre en pratique tel ou tel principe, représente une aventure rien moins qu’ennuyeuse et où règne rien moins que de l’arbitraire, sachant que la nécessaire et inéluctable transformation des choses en leur contraire pourra faire de la soumission aveugle aux principes de La loi morale (rigorisme), un véritable esclavage, et le repos de la conscience qui se met humblement en accord avec elle-même sous l’égide des lois une forme de liberté…!
    4- « KyôKun », le précepte, autrement dit aussi « la morale de l’histoire » ou encore l’enseignement par lequel on comprend que le(s) principe(s) ci-dessus évoqué(s), ne sort(ent) pas de nulle part, comme un lapin d’un chapeau, mais représente(nt) comme la capitalisation en quelque sorte, ou encore une forme de mise en commun de l’expérience.
    5- Ce chemin, c’est aussi le nom donné à l’enseignement de Lao Tseu, le Tao, la Voie du Non désir, du Non Agir et de la Vacuité qui se retrouvera comme fil rouge notamment de la poésie de Bashô. Ex.
    6- « DôGi », synonyme de « DôToku » mais plus proche de l’idée de régulation des mœurs qui s’accomplit dès lors que l’on se conforme aux coutumes et codes sociaux en vigueur.
    7- « ShûShin » : L’ascèse.
    – Etc. etc.
    On retrouvera l’ensemble de ces nuances avec le « mos, moris » des latins, qui tantôt s’unit, tantôt s’oppose à « lex », la loi, mais qui, contrairement à la « morale (qui) n’est pas drôle », nomme aussi l’  « humeur, la fantaisie », et cependant avec ’morosus’, « qui suit son humeur, difficile, capricieux, chagrin » même, évoque parallèlement quelque chose d’effectivement ‘pas drôle’ du tout dès lors qu’on a à le subir, tant de la part d’autrui qu’en tant que notre propre manière parfois lunatique (autrement dit ’sous influence’), de nous comporter.
      
    Ceci étant, si ce qui vous choque tant, autrement dit l’assimilation du délinquant à un héros, peut donner à penser, ce serait sous l’égide du discernement qu’opère la conscience morale en tant que ‘Dôtoku’, entre « le Bien ( Zen : chinois : Shàn – notion où se retrouve une idée de ‘concorde qui règne autour d‘un partage équitable‘) du Mal (Aku : chinois : Wu – notion où se retrouve une idée de ‘repoussant‘ tel de par le sentiment d’un risque de ‘vampirisation’ du Ch‘i‘). » Autrement à partir de ce sentiment de la correction, rectification non violente d’un « partage inéquitable » conséquence par ex. de l’aspect rapace du « Désir » tel celui à l’œuvre dans l’affaire Kerviel où l’on a eu d’un côté une vampirisation du Golden Boy par la spirale infernale engendrée par le phénomène spéculatif et de l’autre une façon de répondre à l’exigence démesurée de l’employeur eu égard à un accroissement du profit dans un laps de temps de plus en plus réduit, donc comme sous l’effet de sa seule volonté (telle l’illusion d’un coup de baguette magique) ainsi qu’au mépris de la situation critique du plus grand nombre, au mépris de la destruction de l‘emploi de la PME à laquelle on ne prêtera plus, au mépris de l’anéantissement de la famille dont on vendra l‘appartement pour une bouchée de pain pour récupérer trois francs si sous malgré la volonté du père de famille de s’en sortir etc. etc. Pour que les gens applaudissent à la disparition de onze millions d’euros comme ils applaudiraient au bon numéro sorti au Kéno, au Loto, au Jackpot, au PMU ou que sais-je encore avant de réclamer leur part en tant que « meilleur ami » du gagnant, c’est qu’ils ont sans doute le sentiment que quelque chose est par là « réparé » même si cette réparation s’accomplit par un acte moralement condamnable et au profit d’un seul, dernier point qui jugule par ailleurs la force révolutionnaire potentielle de l’évènement.
    En ce jour anniversaire de la chute du mur de Berlin, je crois que nous avons là un bon thème de réflexion et je suis pour ma part assez curieuse du type de « morale de l’histoire » à laquelle nous finirons par avoir droit au bout du compte.
    « Laissez sortir les gens, c’est la seule chose à faire si on ne veut pas utiliser les armes. », se souvient d’avoir dit sous la pression de la foule l’officier responsable à Check Point Charlie ou je ne sais plus quel autre point de contrôle…
    « Ouvrir » ou « Tirer », « réfléchir à davantage d’équité » ou « créer l’occasion de la tentation et sanctionner », je crois que la réponse à ce problème nous fournira en effet la morale de l’histoire.

  27. @ JD Reffait :
    « Une société qui substitue l’éthique à la morale est en grand danger. »
    Hmm… Pourquoi ?
    La morale a une connotation fortement religieuse qu’il faudrait finalement bannir des sociétés « démocratiques ». Au surplus, la morale, à l’instar de l’éthique, « correspond à une appréciation très variable et individuelle ».

  28. Jean-Dominique Reffait

    Alex Paulista,
    Non, cet homme n’a volé personne, pas même la collectivité. Du moins, si l’on veut réellement calculer la valeur effective du vol, ce n’est pas 11 millions mais uniquement le coût du papier, de l’impression et de la coupe des billets, c’est-à-dire le coût marginal de fabrication des billets.
    En effet, le papier-monnaie ne correspond plus à une contrepartie de richesses réelles (tel que l’or auparavant) et ne prend donc une valeur qu’à partir du moment où ce papier entre dans le circuit économique. Le vol a eu lieu avant cette entrée dans le circuit économique, les billets n’avaient donc qu’une valeur de papier.
    Une fois rendu dans un distributeur de billet, chaque billet retiré par vous et moi prend une valeur économique puisqu’il correspond à une richesse détenue et que vous attribuez au papier qu’on vous donne une valeur équivalente à la richesse détenue, sur la base de la confiance que vous accordez aux autorités qui garantissent cette équivalence.
    En vérité cet homme pourrait être poursuivi pour création illégale de monnaie, parce que ces billets n’étant pas entrés dans le circuit économique ont exactement le même statut que la fausse monnaie.

  29. Je partage tout à fait votre avis M. Bilger.
    Mais je remarque une chose c’est que les « bien-pensants » ne s’offusquent jamais devant les revenus pharaoniques des vedettes, qu’elles soient sportives, cinématographiques ou autres… alors pour quoi tant de haine !! La lutte des classes est revenue !!! Lénine réveille-toi ils sont devenus fous !!!

  30. @Alex Paulista,
    « Pour autant on ne peut pas suivre Ludovic en disant qu’il n’a volé personne. Non, il nous a tous volés un peu (surtout vous, j’utilise plus le real). »
    Où avez-vous lu que j’ai dit qu’il n’avait volé personne ?

  31. @Bernard 27400
    « Pensez vous vraiment que ça choquerait ?  »
    Euh oui tout de même, l’exhibitionnisme sur la voie publique est fort heureusement un délit à caractère sexuel.
    Mais c’était surtout une boutade de ma part à propos de Diogène.

  32. Allez savoir pourquoi, dans cette phrase : 1- « SeGen_no_Hinan_ni kansuru_Ōkubo » : « Crainte du jugement critique de la société », le mot «Ōkubo» (Nom de famille d’un poète d’obédience confucéenne versé dans la poésie de style chinois de la fin de l’époque de Edo, ŌKUBO Shibutsu) a remplacé bizarrement le mot «Okubyô» (manque de courage). Il fallait donc lire : « SeGen_no_Hinan_ni kansuru_Okubyô ».
    Idem un peu plus bas, il faut lire «trois francs six (6) sous» et non pas «trois francs si (conditionnel) sous».
    Ceci dit, tous les accents des mots étrangers ne sont pas tous correctement mis dans mon texte, vu que je ne les ai pas tous sur la machine du jour, par ex. le « Ō » du latin « mos » est long. Mais bon, ça n’engendre pas nécessairement toujours de confusion comme dans le cas ayant paru nécessiter une rectification/précision (Ōkubo).

  33. Marie @JD Reffait

    @ JD Reffait,
    « PS. J’espère que ce commentaire aura plus de succès technique que celui sur le précédent billet qui a disparu dans les tuyaux internet. »
    Vous avez péché par « excès de vitesse » !
    Si vous oubliez de cliquer sur « aperçu » (enregistrement de votre commentaire sur le blog de PB) avant de cliquer sur « envoyer », il est certain que votre écrit voyagera dans les méandres d’internet ! Pour « blogerrir » où ? Pas sur le blog de PB, c’est sûr !

  34. Robert Marchenoir

    Ce n’est pas uniquement un problème de morale. C’est aussi un problème de bêtise.
    L’argent volé, c’est celui de la Banque de France, c’est l’argent des impôts, c’est de l’argent pris dans la poche des Français. Mais ceux-ci sont tellement bêtes qu’ils ne s’en rendent pas compte. Ils pensent que l’argent de l’Etat pousse sur un arbre planté dans la cour de l’Elysée.
    Et vu que cet argent vient en grande partie de la dette, ils se félicitent qu’un truand serbe ait volé l’argent de leurs bébés à naître.

  35. Bonjour

    J’ai peur que ce ne soit encore plus sordide: s’il est acclamé c’est surtout pour lui « demander » de partager: « je te cacherai volontiers si tu m’en donnes un peu »… C’est une acclamation de veules, qui n’osent pas faire, mais aimeraient bien en croquer. Assez nauséabond.

    Que des financiers sans vergogne ou des dirigeants dont bling-bling ne donnent pas l’exemple cela ne fait peu de doute; cela explique sans doute la mécanique, mais sans rien changer à l’amoralité de ces soutiens.

    Ce n’est pas surprenant. C’est médiocre.

  36. Oui bon. Les sociétés fonctionnent sur des croyances, Facebook donne l’illusion d’un rassemblement sans frontières. Ceux-là mêmes qui arboraient crânement l’année dernière un tee-shirt Yes we can Barack Obama exhibent aujourd’hui un sweet Tony Musulin. L’intérêt dans cette histoire réside dans l’épopée d’un héros ordinaire devenu millionnaire à la faveur d’une série de couacs. Il ressemble à Matt Damon le discret dans Ocean Eleven: l’instigateur du casse du siècle sans effusion de sang. L’aspect moral est superflu dans l’engouement pour cet anonyme devenu à la lumière de Facebook et des médias un héros malgré lui. Son rêve est commun à 99, 99 % des humains: couler des jours tranquilles au soleil dans une planque à l’abri du besoin.

  37. Alex paulista

    Chers Ludovic et Jean-Dominique
    Oui, pardon Ludovic, j’ai lu rapidement et cru que le commentaire de JDR était la suite du vôtre. Mille excuses.
    En fait, le commentaire était celui de
    Jean-Dominique Reffait | 09 novembre 2009 à 10:31
    Jean-Dominique s’est reconnu, qui m’a répondu.
    Je ne suis pas d’accord avec lui pour autant et donc, du coup, d’accord avec vous: la création de la monnaie ayant un effet économique non-nul il nous vole tous. Sinon il suffirait de faire fonctionner la planche à billets pour tenir la promesse du pouvoir d’achat…
    L’effet est similaire à celui de fabriquer de la monnaie, je suis d’accord bien sûr.
    Non, en fait ce n’est pas exactement égal: il y a fort à parier qu’il dépensera cet argent hors de France…
    Au Brésil ?

  38. En qualité de lecteur régulier de votre blog, je dois admettre que je suis plus que sceptique du sentiment – je crois un peu vieux jeu – que vous nous livrez.
    D’abord la fuite du convoyeur qui n’est qu’un pied de nez. Non pas du « petit » aux « gros », mais du « un peu plus malin » aux « franchement idiots ».
    Car il faut admettre qu’il faut être bien stupide pour laisser une personne seule dans un camion, fût-il blindé, avec 11M d’euros, et la possibilité de désactiver son GPS. Aujourd’hui même les taxis sont géolocalisables à merci.
    C’est précisément – et seulement – ce pied de nez que le peuple français admire ; cela, dans le même temps en reconnaissant la vie probablement infecte que s’attachera à vivre notre bonhomme. Rester caché avec son butin, la chose ne doit guère être aisée…
    Quant au respect des lois, je ne crois pas que quiconque soit en mesure aujourd’hui de vraiment les respecter. Il y a trop de normes pour que nous puissions faire du respect des lois une vraie valeur. Les lois sont au mieux des instruments politiques de communication qui ont une vertu : un symbole qui ne coûte rien…

  39. Cher Philippe,
    A quoi sert de constater un état de carence, quand l’état de carence est là…
    L’éthique n’est pas la morale.
    L’éthique est interne, la morale est externe.
    L’éthique repose sur l’estime de soi tandis que la morale est en lien avec le respect de soi.
    L’éthique, c’est une neutralité de principe, c’est une somme d’exceptions enfermée dans un cadre rigide, vouée à exploser sous le poids de sa compilation à chaque situation nouvelle.
    La morale est plus réaliste, elle admet la faiblesse, la défaillance, l’imprévu, le jamais vu.
    La morale compose avec l’absurde, le rire, la charité, l’inattendu. Elle admet.
    Là où l’éthique admet qu’être vu fait devenir puissant, la morale doute.
    La où la morale demande de se montrer tel que l’on n’est pas pour faire illusion, pour répondre aux règles, aux normes,
    l’éthique doute.
    Est-ce l’éthique ou la morale qui commande à Antigone d’ensevelir son frère?
    Pourquoi voudriez-vous qu’Antigone écoute toujours Créon?
    Pourquoi voudriez-vous que la vérité ne soit qu’une et qu’il n’existe qu’un seul chemin dit éthique ou dit moral.
    L’éthique est une construction de prestige.
    La morale, c’est le faire avec.
    françoise et karell Semtob

  40. Aïssa Lacheb-Boukachache

    Un buzz en chasse un autre … Vous ne devriez pas faire tout un raouf pour si peu, mon cher PB … A vrai dire, une chose me gêne dans votre billet; c’est d’y préciser qu’il est d’origine serbe … Je ne vois pas ce que cela peut apporter à l’information et à votre commentaire. S’il avait été d’origine gascogne ou alsacienne, l’auriez-vous mentionné? Et pourtant, où est la différence?… Il est français, oui ou non?… Ne voyez aucune malice dans mon propos; c’est très important au contraire … Enfin … J’écrivais donc qu’un buzz en chasse un autre et à la vitesse de la lumière … Aujourd’hui, il s’agit de savoir si Sarkozy était à Berlin avec son piolet contre le mur le 9 novembre ou le 10 voire le 11 … Car s’il y était le 10 à minuit et une minute et non le 9 à 23h59 (au plus tard) comme il l’affirme, c’est différent, tout est différent, la face de ces choses en est de fait bouleversée … Et si c’était le 11, alors alors c’est un cataclysme, une fin de toutes les croyances, de toutes les morales … voilà à quoi nous en sommes réduits, voilà les valeurs, voilà l’intelligence posées en ces façons: le 9, le 10 ou le 11 à Berlin? On comprend mieux, à cette aune, pourquoi ce type se barre avec le fourgon …
    Aïssa.

  41. Jean Philippe

    Bonjour,
    La réaction qui a suivi ce fait divers n’a pas été une surprise pour moi, même si je ne la partage pas du tout. Tony Musulin fait effectivement penser à ces héros de livres qui commettent des délits mais qui restent sympathiques aux yeux du lecteur. On pense bien évidemment à Robin des Bois ou à Jean Valjean !
    Pourtant, les premiers éléments révélés par la presse montrent que la réalité n’est pas aussi belle. Tony Musulin, s’il est réellement coupable, n’a rien du misérable qui vole pour survivre ou pour aider les autres. Il roulait en Ferrari, or son salaire ne lui permettait pas d’avoir une aussi belle voiture.
    Et c’est justement un point qui a attiré mon attention. Comment se fait-il que son patrimoine n’ait pas soulevé de questions avant ? Même si ce n’est pas une preuve, il me semble qu’il faudrait avoir de véritables moyens pour enquêter lorsqu’une personne a un patrimoine qui ne correspond pas à son salaire.

  42. Alex paulista

    Chères Françoise et Karell Semtob
    Je définirais autrement morale et éthique.
    Nous avons déjà eu un long débat avec JDR sur ce sujet, donc il est important de définir les mots.
    La morale est l’application de principes créés par la société extérieure, comme vous le soulignez. Elle est à mon sens une construction de nature très rationnelle.
    Le mot éthique peut paraître réducteur car il renonce à l’élaboration d’un système. L’éthique prend acte du fait que devant certaines situations la mathématique des âmes nous amène aux pires exactions (et le pire, c’est la …). Certains, au Texas, en perdent la tête.
    Le concept d’éthique est plus humble, plus intérieur, moins idéologue. En ce sens, si la morale est judéo-chrétienne, l’éthique est davantage chrétienne car elle est à l’écoute de notre for intérieur.
    Dans l’Antigone de JA, c’est l’éthique qui commande à Antigone d’ensevelir son frère.
    Parce que c’est viscéral.

  43. Jean-Dominique Reffait

    Robert Marchenoir
    « L’argent volé, c’est celui de la Banque de France, c’est l’argent des impôts, c’est de l’argent pris dans la poche des Français. Mais ceux-ci sont tellement bêtes qu’ils ne s’en rendent pas compte. »
    Je me demande quel qualificatif je dois attribuer à ceux qui ne se rendent pas compte qu’ils disent des sottises. L’argent des impôts ne passe pas par la Banque de France.

  44. Pierre-Antoine

    @semtob
    « L’éthique est une construction de prestige.
    La morale, c’est le faire avec. »
    A mon humble avis et ma petite expérience, la morale est l’ossature de l’âme et l’éthique en est l’expression.
    C’est ce qui fait que nous ne sommes pas des mollusques en quête d’une coquille pour nous protéger. Mais des êtres humains capables de se tenir debout, bien droit et d’avancer sans détour.
    Cordialement
    Pierre-Antoine

  45. @JD Reffait
    « Le vol a eu lieu avant cette entrée dans le circuit économique, les billets n’avaient donc qu’une valeur de papier. »
    Devons-nous dans ce cas parler du coup de maître de la brigade ‘Alerte enlèvement de billets’ comme non pas d’un Jackpot de neuf millions d’euros mais comme de la simple récupération d’un certain nombre de kilos de papier monnaie gênants dont le malheureux convoyeur obligé au départ de voler le tout ne pouvait finalement assumer que le contenu d’un sac à dos?
    Il faudra lui conseiller de se reconvertir dans le transport anversois des carats d’allotrope de haute pression du carbone qui seront tout de même d’un meilleur rendement au sac à dos que la production à peine sèche de la Banque de France.

  46. mathevet Nicholas

    Monsieur Bilger a l’indignation sélective, on voit bien d’où il écrit. Un petit café après votre dessert, très cher…?

  47. Vous dites « J’ai honte pour la France à cause de l’effervescence admirative à l’égard de ce convoyeur de fonds lyonnais d’origine serbe, Tony Musulin, qui a détourné un peu plus de 11 millions d’euros en disparaissant avec son butin le 5 novembre. »
    Que vous, Philippe Bilger, croyiez nécessaire de mentionner l’origine du délinquant me choque beaucoup plus que son geste ou que le soutien apparent des internautes ! Surtout connaissant vos démêlés avec BHL (https://www.philippebilger.com/blog/2009/10/bhl-agent-de-police-intellectuelle.html) et ses allégations plus que douteuses sur vos propres origines…
    L’origine étrangère de Tony Musulin est-elle la cause de sa délinquance que vous la mettiez ainsi en avant ?? J’ai peut-être mal interprété vos propos mais, écrits tels quel, ils sont très troublants…

  48. Jean-Dominique Reffait

    Catherine Jacob,
    « Devons-nous dans ce cas parler du coup de maître de la brigade ‘Alerte enlèvement de billets’ comme non pas d’un Jackpot de neuf millions d’euros mais comme de la simple récupération d’un certain nombre de kilos de papier monnaie gênants dont le malheureux convoyeur obligé au départ de voler le tout ne pouvait finalement assumer que le contenu d’un sac à dos? »
    Oui, c’est exactement cela pour ce qui est de la récupération du papier mais moins côté voleur : son intention est bien d’injecter dans l’économie du papier qui n’a aucune contrepartie économique, donc de la fausse monnaie. Grosso modo, pour l’Etat, le manque à gagner est très faible financièrement (prix du papier), mais pour le voleur, il est bien de 9 millions.
    Au-delà de cette mise au point technique, ce qui m’importe est de me rapprocher du coeur du billet et, notamment, de l’approche morale du délit concerné.
    Souvenons-nous de ces distributeurs de billets qui ont dans le passé délivré deux ou trois fois les sommes demandées : je retire 20 € et le distributeur m’en donne 60, sans débiter les 40 € de trop, qui correspondent dès lors à de la fausse monnaie. Les gens se sont tous précipités sur ces distributeurs et il ne me semble pas qu’il y ait eu de poursuites : simplement une mise à jour des comptes concernés. Dans les principes, Musulin n’a pas fait autre chose.
    Les grands équilibres financiers ou économiques supposent des règles générales mais le manquement marginal à ces règles n’a aucune influence sur les équilibres. Il n’y a aucune place pour la morale dans ce contexte, ni dans les règles ni dans les manquements, dans la mesure où il n’y a pas de nuisance ou de bienfait pour les intéressés.
    Je me souviens de l’affaire Elf : des commissions pour obtenir des marchés à l’étranger. L’entreprise se portait fort bien, les actionnaires étaient contents, les salariés aussi, aucune entreprise française n’était lésée, l’Etat percevait des impôts records. Où était le dol ? Nulle part.
    Je crois que nous associons trop vite la transgression à l’immoralité : une règle peut avoir une utilité pratique sans s’appuyer sur un principe moral. Si la règle ne repose pas sur un principe moral, il n’y a pas d’immoralité à la transgresser, ce qui ne signifie qu’il faille le faire pour autant car la règle repose sur d’autres justifications pertinentes.

  49. « …C’est le monde tel qu’il va, tel qu’il a toujours été, il faut s’en arranger sans s’énerver, en s’efforçant, quand cela nous est possible, de nous maintenir à l’écart de cette bacchanale informe… »
    Rédigé par: Jean-Dominique Reffait | 09 novembre 2009 à 10:31
    Ca resume bien ma pensee, alors j’ai « vole » les mots de Monsieur Reffait…

  50. Rédigé par Monsieur SR le 09 novembre 2009 à 18:53
    « …exhibent aujourd’hui un sweet Tony Musulin… »
    Ouf ! tant qu’ils n’arborent pas un sweet ou le nom du « heros » a perdu son « u » et transforme le « n » de son nom par un « m », ca va !!!
    Ce serait un comble pour un type d’origine serbe !!!

  51. La loi, la morale…
    La loi est du côté de la banque qui a « conseillé » la petite vieille qui a vu ses économies s’envoler avec la crise. Et la morale ?
    Il n’y a rien d’étonnant dans le fait que ce braqueur ait des fans. Chirac (Pasqua, Sarkozy…) en a aussi beaucoup. lol

  52. Alex paulista

    Cher JDR
    Ce que vous expliquez de nouveau est – pour moi – une absurdité.
    La création de monnaie dévalue celle-ci. Quand vous précisez que « le manquement marginal à ces règles n’a aucune influence sur les équilibres » vous transformez un argument quantitatif en argument qualitatif. Bien sûr que 2 MEuros sur le budget de l’État n’ont aucune influence quantifiable. Mais cela ne veut pas dire que le vol n’est pas exactement de 2 MEuros: ce vol prive de l’opportunité d’imprimer de la monnaie. Il faut bien s’arrêter à une limite, et ce vol déplace la limite d’exactement 2MEuros.
    Sinon les politiques ne s’écharperaient pas pour le budget ! Besoin de financer un hôpital ? Pas de problème, le député Reffait a amené du papier…
    Je vous taquine. Mais plus sérieusement, en économie ou en finance, la valeur d’un actif est justement déterminée par les arbitrages qu’on peut réaliser avec. Exactement comme un taux de change forward est déterminé de manière univoque par le taux de change du jour et les taux d’intérêts dans les deux devises concernées.

  53. Rédigé par Monsieur Aïssa Lacheb-Boukachache le 09 novembre 2009 à 20:30
    « …A vrai dire, une chose me gêne dans votre billet, c’est d’y préciser qu’il est d’origine serbe… Je ne vois pas ce que cela peut apporter à l’information et à votre commentaire. S’il avait été d’origine gasconne ou alsacienne, l’auriez-vous mentionné ? Et pourtant, où est la différence ?… Il est français, oui ou non ?… »
    et aussi :
    Rédigé par Madame La Sasson le 10 novembre 2009 à 10:52
    « …ce convoyeur de fonds lyonnais d’origine serbe, Tony Musulin… »
    « …Que vous, Philippe Bilger, croyiez nécessaire de mentionner l’origine du délinquant me choque beaucoup plus que son geste ou que le soutien apparent des internautes ! … »
    Cela me semble une bien etrange reaction !
    « …L’origine étrangère de Tony Musulin est-elle la cause de sa délinquance que vous la mettiez ainsi en avant ?? … »
    Je me suis egalement « interrogee » sur le fait de mentionner les origines serbes du bonhomme (qui n’est pas Gascon de Gascogne !)… mais si c’est un fait etabli !? Pourquoi le cacher, cela fait partie prenante de son identite au meme titre que l’age, etc.
    Et puis, il s’agit peut-etre d’une information fondamentale ; a savoir que cet argent alimentera peut-etre une « mafia serbe » ?!
    En tout cas, l’argent non recupere pourrait eventuellement faire « tourner le commerce en France », commerce de luxe de preference, si ce type choisit de le depenser dans l’Hexagone. Bon je sais : les « biffetons » sont numerotes et peuvent etre « traces »…

  54. C’est quoi cette manie de rappeler l’origine des gens lorsque l’on parle d’eux en mal ? On n’entendait jamais dire de Zidane : le meilleur joueur du monde d’origine algérienne, alors pourquoi rappeler les origines serbes de M. Musulin ? Les bons français n’ont aucune origine ?

  55. @La Sasson
    Complètement á côté de la plaque vos propos.
    Ici dans ma feuille de chou, les auteurs de vols, violences, etc… sont cités sans leurs noms complets mais avec leur nationalité (autrichien, serbe, roumain etc.), c’est très intéressant…
    La population n’a rien á redire á cela, bien au contraire.
    C’est bien français de défendre les voleurs.
    Sur un autre sujet, c’est bien télévision française de faire du direct á partir des quais de la ligne A pour avoir le suivi de la grève… Super info !
    Il n’y a pas longtemps on me parlait de France ridicule á l’étranger.
    Ceux-là ont bien raison !

  56. Je suis étonné de votre étonnement.
    A l’école, nous avions l’habitude de chanter
    « Vive les vacances, à bas les pénitences, les cahiers au feu et les profs au milieu »…
    Cette transgression enfantine était-elle pour autant l’expression d’une future génération ayant perdu tout repère ?
    Si une minorité exprime l’apologie de ce vol avec sérieux, c’est aussi la même minorité qui s’offusque devant la gabegie des banquiers tout en raisonnant dans leur for intérieur : « si j’étais à leur place, je ferais pareil ».
    Quant à la majorité des comiques qui expriment leur dérision par un soi-disant soutien au voleur, c’est à mon sens plus à comparer avec « les lancer de nains » ou « le vol des nains de jardins » :
    Une simple expression provocatrice de la lutte contre le conformisme.
    Pas de quoi fouetter un chat.
    Faut-il craindre la déliquescence de notre société, ou juste constater que dans une société toujours plus réglementée, toujours plus collectiviste (je parle bien de la France, en dépit des apparences), un peu de « chacun pour soi » n’est pas nécessairement la fin des haricots.
    Il s’agit bien entendu de l’expression, à la mode du temps, d’une certaine forme de pensée consciente qui n’aura pas plus d’impact que les « il est interdit d’interdire », ou « sous les pavés la plage » de mai 68.

  57. Jean-Dominique Reffait

    Alex Paulista, si vous partez du principe que l’intégralité ou que la majorité de la monnaie circulant est imprimée en billets ou frappée en pièces, vous avez bien raison.
    Mais la marge de manoeuvre pour la création de monnaie fiduciaire est aujourd’hui immense : vous pouvez émettre le double de monnaie papier qui existe aujourd’hui, cela ne représenterait pas plus qu’un ou deux pour cent de la masse monétaire totale. Il n’y a donc aucune incidence sur l’évaluation de la monnaie.
    Ce qui en jeu n’est pas la valeur de la monnaie, qui ne serait en rien dévaluée si tous les faux-monnayeurs du monde se tenaient la main, mais la confiance que vous placez dans la monnaie : trop de fausse monnaie tue la vraie, plus personne n’en veut comme à l’époque des dernières pièces de 10 francs (1 sur 10 était fausse). Vous pouvez toujours essayer de placer un vrai billet de 200 € dans un commerce, je vous souhaite bonne chance. C’est la confiance qui est en jeu, par l’évaluation de la monnaie.

  58. @JD Reffait
    « Une société qui substitue l’éthique à la morale est en grand danger »
    Faudrait m’expliquer cela car pour moi, éthique = morale !
    Je suis également scandalisé par la réaction du net ou de certains, qui en fait ne représentent peut-être qu’un petit pourcentage des utilisateurs du net.
    Ce qui me scandalise beaucoup plus et à supposer que l’information soit vraie, c’est ce mensonge (ou cette erreur ?) du président sur la date de sa venue à Berlin il y a 20 ans. S’il a sciemment enjolivé les choses, alors, il ne faut vraiment pas s’étonner de la réaction de certains.

  59. Aïssa Lacheb-Boukachache

    « Bonjour mesdames et messieurs les conseillers et autres du Président.
    Travailleur précaire actuellement en chômage et n’ayant que peu de revenus pour subvenir à mes besoins, je vous demande, s’il vous plaît, de me commander un sondage sur le thème que vous voudrez. Je puis me déplacer et marcher longtemps de particulier à particulier les sonder de vive voix, j’ai encore de bons souliers, porte à porte, ville et villages à l’entour et interroger ainsi mille personnes ou plus selon vos directives et besoins. Je vous retournerai par la Poste les résultats de ce sondage. Dans l’immédiat, si vous pouviez m’avancer 1000 euros sur les millions que vous donnez chaque année aux sondeurs patentés, afin que je puisse commencer, cela me permettrait de m’acheter à manger d’abord et nous ferait gagner du temps ensuite. Sans cette somme, il est évident que je ne pourrai sonder qui que ce soit malgré que cela ne requiert aucune compétence intellectuelle et/ou manuelle quelconque. Je vous remercie infiniment de votre bonté et votre compréhension. Vous pouvez me répondre par courriel; je vous indiquerai toutes mes coordonnées en retour. »
    Aïssa Lacheb-Boukachache.
    C’est le courriel que je viens d’envoyer à l’Elysée. J’espère qu’ils me répondront, tout de même … le contraire ne serait pas convenable …
    Voilà, cher PB, français d’origine serbe ou non, on peut choisir de gagner sa vie en sondant les âmes perverties de ces français de souche que vous décrivez ainsi félicitant le bandit ou en se tirant avec le fourgon plein de cet argent qui n’a, vous le savez, pas d’odeur … Il n’y a absolument rien de pourri dans la République, je vous rassure; tout n’y est qu’une question de délicatesse et les uns comme l’autre n’en manquent pas assurément, vous ne le nierez pas …
    Aïssa.

  60. Aïssa Lacheb-Boukachache

    J’aime beaucoup ces débats où les deux propositions et points de vue sont valables mais néanmoins s’affrontent… C’est toujours là qu’on se surpasse, sachant qu’il sera dur d’abattre l’adversaire. Merci Jean-Dominique et Alexandre de tant d’intelligence qui fait fuir tous les marchenoir du monde qui s’étaient empressés, sitôt qu’ils ont entendu qu’il s’agissait d’un français pas français comme un vrai français, de pointer leur museau et commencer d’aboyer…
    Aïssa.

  61. Pierre-Antoine

    @Tony Musulin
    Cher Monsieur, vous n’avez pas de chance, TRIPLEMENT pas de chance…
    Bien que d’origine serbe vous n’avez pas pu profiter des contacts que certains de vos compatriotes ont tissés en France, cela vous aurait permis de faire transiter par leurs réseaux de vente de matériels issus des épisodes guerriers de ces dernières décennies, vos sacs de gros billets numérotés et surtout bénéficier de complicité pour pouvoir louer à votre place le véhicule et le local refuge indispensable pour pouvoir attendre que ça se calme pour vous…
    Cela vous aurait évité de vous faire reconnaître sur photo par d’honnêtes citoyens.
    Peut-être que pour votre prochain coup vous pourrez demander à JP Treiber quelques conseils pour disparaître sans complice… si vous partagez la même cellule bien sûr.
    Cordialement
    Pierre-Antoine

  62. Aïssa Lacheb-Boukachache

    « … On ne peut jouer toute sa vie dans le même mouvement appassionato. Même au point de vue purement esthétique, un appassionato ne vaut, ne marque, n’émeut que dans la mesure où il a été préparé par un moderato. La vie n’est pas une valse tzigane avec un titre comme «Amoureuse» ou «Fascination». Il faut en faire, à défaut d’une symphonie, au moins une bonne sonate; et ces quelques mesures débridées de l’appassionato, il faut les avoir préparées, attendues, méritées par une fugue bien sage, un peu raisonneuse, presque morose; ensuite elles se placeront d’elles-mêmes …».
    Cette lettre fut écrite à ses parents à la lueur de la bougie, dans la tranchée, sous les bombardements les plus intenses et effroyables par Pierre Dupouey/ lieutenant/ Mort pour la France au champ d’honneur le 3 avril 1915 devant Nieuport/Yser. On lui envoyait sur la tête des marmites infernales, il prenait son temps, se blottissait sous terre et écrivait ça … (J’ai recopié juste un extrait; la lettre est longue; elle fut retrouvée près de son corps et acheminée longtemps après à sa famille).
    « … Sache qu’il y aura toujours de la beauté sur terre et que l’homme n’aura jamais assez de méchanceté pour la supprimer.»
    Pierre Dupouey encore lui, quelques jours plus tôt.
    Voila, pour ce cher PB … Il est si dégoûté, écoeuré, révolté par notre sale époque … Ca va le consoler, n’est-ce pas cher PB; on est des nains à côté de Pierre Dupouey …
    Bonne nuit. En attendant que l’Elysée me commande un sondage, faut que j’aille travailler plus pour chercher à bouffer … C’est que je suis pas Séguéla ni convoyeur de fonds, moi …
    Aïssa.

  63. Votre article montre bien votre ignorance totale de ce qu’est la culture du net. Le genre des groupes qui ont été créés à la suite de ce vol ne se basent pas sur des « convictions » qui vont à l’encontre de la moralité, c’est tout au plus de la simple provocation, de l’amusement, du loisir. Et c’est le cas de la plupart des « buzz » du net.
    Ce genre de phénomène, autrefois sous une autre forme, a toujours existé, et ça a toujours indigné les générations passées.
    Mais vous semblez avoir du mal à comprendre que la communication sur internet n’a rien à voir avec celle de la vie réelle.
    Tout ce qui se dit, s’écrit sur internet est souvent fait avec beaucoup de légèreté, on est fondu dans la masse, anonyme, et on s’amuse simplement. Car pour beaucoup de gens internet reste un loisir. Beaucoup de gens trouvent là un moyen d’amusement, une petite anecdote qui les fait rire, en rejoignant ce genre de groupe.
    D’autre part je rappelle qu’en France, et surtout chez les jeunes, il y a un manque de confiance envers la justice et la police. Celle-ci n’a plus un rôle « protecteur » mais est vue comme quelque chose de négatif, que l’on fuit en général. Cela s’explique notamment par certaines bavures, et beaucoup d’autres choses.
    Donc d’une part vous n’avez pas grandi dans cette « culture » internet, et d’autre part je ne penses pas que vous fassiez ou que vous ayez fait une étude approfondie de ce sujet qu’est internet et précisément l’esprit, la culture et le « way of life » qui l’entoure : alors, comment pouvez-vous vous permettre de vous exprimer dessus ?

  64. @Aïssa,
    Merci à vous pour vos derniers commentaires.J’éprouve pour vous une certaine estime, et votre passion pour la première guerre mondiale me touche beaucoup.
    Cordialement

  65. Aïssa et d’autres ont raison de s’élever contre l’insistance de l’Avocat général Bilger sur l’origine serbe – supposée – du convoyeur.
    J’espère que l’Avocat général Bilger ne requiert pas en fonction de la nationalité d’origine, ou de l’origine, des Français poursuivis en assises.
    Sinon, son billet est intéressant.
    Un intervenant a fait observer que l’Elysée a violé le droit des marchés publics dans le cadre de sa commande de sondages. Bien vu!

  66. Cher JDR
    Je comprends mieux votre point de vue, mais je ne suis pas convaincu tout de même. J’ai l’impression que lors de l’émission de ces billets on est bien obligé d’affecter des fonds « non-papier » en correspondance. Qui du coup ne sont pas disponibles pour autre chose.
    Pour libérer ces fonds il faudrait déclarer publiquement que les billets portant ces numéros sont des faux, avec les conséquences pour ceux qui les auraient utilisés sans le savoir. Ce qui serait fort de café, puisque ces billets sont véritables.
    Et même en suivant votre raisonnement (que ça ne troublerait que la confiance), cette limite que l’on met arbitrairement à la monnaie papier pour ne pas impacter la confiance, on l’a décalée exactement de 2 millions d’euros. Ces deux millions d’euros auraient pu être utilisés de la même manière pour faire quelque chose d’une valeur exacte de 2 millions d’euros: on aurait pu décider de baisser un peu la confiance mais d’imprimer 2 millions de plus pour les donner à des gens contre des virements en argent non-papier (puisque vous le préférez :o) ). C’est en pensant à cet arbitrage que je prétends que la perte vaut 2 MEuros.
    En bref, j’ai beau le tourner dans tous les sens, la perte est toujours évaluée à la même somme, qu’elle soit une perte de confiance ou bien directement de fonds.
    Sachez que j’aimerais bien vous être agréable sur ce point, je ne demande qu’à être convaincu (ces 2 millions étaient un peu les miens, j’ai encore des biens en France !). Mais je ne vous suis pas.
    Cher Aïssa
    Merci pour ces compliments.
    À propos de l’origine du voleur, j’ai trouvé passable de la mentionner, et encore plus discutable de contester le droit de la mentionner. Car s’il est une chose pire que la stigmatisation systématique, c’est le fait de ne plus pouvoir s’exprimer tellement il faut veiller au politiquement conforme. J’ai vu que vous exprimez la même idée en disant que ce n’est pas grave non plus, car cela fait partie de son identité.
    Sur les bons plans pour l’emploi, ne vous branchez pas sur les sondages. Ça eut payé… Même installateur de douches, les bonnes places sont déjà pourvues.
    Puisqu’on en était à prendre en compte les origines, lancez-vous plutôt dans la délocalisation des soins aux retraités au Maghreb. Les gens vont déjà en Tunisie pour la chirurgie esthétique, notre ancien Président se détend au Maroc…
    Je suis sûr que bientôt le Maghreb sera une grande maison de retraite, avec un niveau de service qu’on ne pourra plus offrir en France.
    Après, le risque, c’est de croiser BHL…
    De mon côté, c’est décidé, si un pépin grave touche mes parents et leur autonomie, je les prends avec moi au Brésil, d’où je vous écris de la chaleur d’un soir d’été.
    En lien, une chanson qui revient à la mode.

  67. La façon dont Taddeï, sur France 3, a apporté sans hésitation ni réserve sa pierre à la célébration de Muslin, présenté comme le héros de la révolte de l’individu contre la société, en dit long sur la banalisation généralisée de l’anarchisme soft qui semble devenir la dernière mode bobo, avec une inconscience qui stupéfie et une ignorance totale de ce qu’implique le lien social et de ce qu’il apporte à l’individu. Que de telles banalités doivent être rappelées est révélateur d’un état de la société, dont les conséquences sont pourtant perceptibles de haut en bas de celle-ci, sans que les rapports de cause à effet entre phénomènes sociaux et comportements individuels soient perçus en étant remplacé par l’idée d’une opposition irréductible entre l’intérêt réel des individus et les mystifications de la société.

  68. Philippe Bilger

    J’avoue que je comprends mal les quelques réactions qui s’émeuvent de la mention de « l’origine serbe » de T.Musulin. C’est une information que Le Parisien a rapportée, que tous les journaux ont reprise, qui n’est ni inutile ni choquante. Evidemment, elle n’a aucun rapport avec sa délinquance ! Cependant, elle explique peut-être son départ. Il faut tout de même arrêter de faire de la morale quand on définit simplement le mieux possible une identité.

  69. Bonsoir,
    Vous parlez d’or, car il s’agit d’un vol. Mais l’irresponsabilité et l’incompétence sont-elles par contre impunies ? M. Charles Milhaud, il y a encore un an directeur de la Caisse d’Epargne qui sous sa direction a perdu 751 millions d’euros, se pavane dans les émissions (radio : Les grosses têtes, dixit un commentaire lu par moi, télévision : passage à Ce soir ou jamais mardi 4 novembre, que j’ai vu). Est-ce scandaleux ou normal ?

  70. Oui, encore un bout de commentaire, encore plus proche de votre billet : Jacques Chirac a été renvoyé en correctionnelle pour des faits ayant trait à des emplois fictifs à la Mairie de Paris. Mais d’autres faits en examen, qu’on lui reprochait aussi, n’ont pas été retenus, et surtout l’un d’eux, qui m’a proprement abasourdi :
    Il avait payé pour – environ – 300 000 euros (trois cent mille) de billets d’avions en argent liquide. D’où pouvait bien provenir l’argent, si ce n’est d’une magouille? Eh bien M. Chirac a expliqué que cet argent provenait des fonds secrets dont il avait disposition quand il était Premier ministre !! C’est-à-dire qu’il se servait dans la caisse et qu’il en a fait un trésor de guerre pour les années futures… Et ce chef d’accusation a été jugé irrecevable, ou prescrit, ou je ne sais quoi d’autre.
    Si vous pensez qu’il n’y a pas de quoi s’indigner, ce personnage ayant occupé les plus hauts emplois de la République, je me demande bien ce que vous pourriez répondre à ceci. Répondez si vous le jugez bon. Cordialement
    JMP

  71. Le même engouement s’était manifesté envers Jérôme Kerviel. Et que dire des réélections de Berlusconi en dépit de ses itératifs détournements [à son exclusif profit] de justice ? Identification au  » petit malin  » qui sait toujours profiter. Confusion, et même abandon des valeurs, au profit du spectacle et de la perversité érigés au niveau des beaux-arts.

  72. Cher Aïssa
    Vous avez raison, Cantat est un très bon chanteur. J’aime moins le boxeur.
    En le voyant à côté des Têtes Raides, je pense à la chanson Fragile dont le clip a été censuré par les médias, je ne sais pas trop pourquoi.
    Heureusement il y a le net.

  73. Bien sûr que tout cela est indéfendable mais j’aurais aimé, M. Bilger, que vous mettiez ce fait divers en parallèle avec les dérives des bonus, retraites chapeaux etc. que s’octroient quotidiennement les grands dirigeants ou en tout cas qui se croient grands puisque leurs salaires sont géants. Je vous cite la dernière déclaration de Mr Lloyd Blankfein, PDG de Goldman Sachs : I’m doing ‘God’s work’.(Je fais une mission divine). Alors M. Tony Musulin dit Robin des Bois a sûrement enfreint la morale mais s’est attiré la sympathie des milliers de gens qui perdent leur travail à cause de la cupidité et l’arrogance de messieurs Lloyd Blankfein et autres…
    Je n’excuse pas mais…

  74. Louis SCHWEITZER

    C’est un gentleman cambrioleur. C’est dans la tradition romanesque française. C’est cette tradition que le public applaudit. D’ailleurs n’a-t-il pas abandonné la majeure partie de son larcin ? C’est donc plus l’esthétique du geste qui l’a guidé que l’appât du gain. Il y a pire héros que celui-ci !

  75. A Alex Paulista : « À propos de l’origine du voleur, j’ai trouvé passable de la mentionner, et encore plus discutable de contester le droit de la mentionner. Car s’il est une chose pire que la stigmatisation systématique, c’est le fait de ne plus pouvoir s’exprimer tellement il faut veiller au politiquement conforme. »
    Ce qui me choque, c’est que l’origine étrangère n’est jamais mentionnée que pour des actes négatifs et répréhensibles (en dehors de l’actualité sportive … et encore :-)) Comme le note Aïssa, dit-on « le violeur Untel d’origine alsacienne » ou la voleuse Unetelle d’origine savoyarde » ? Non… alors pourquoi systématiquement rajouter un renseignement identitaire (qui de plus ne fait absolument pas avancer le schmilblik) pour les uns et l’ignorer pour les autres ??
    A M. Bilger : « J’avoue que je comprends mal les quelques réactions qui s’émeuvent de la mention de « l’origine serbe » de T.Musulin. C’est une information que Le Parisien a rapportée, que tous les journaux ont reprise, qui n’est ni inutile ni choquante. Evidemment, elle n’a aucun rapport avec sa délinquance ! Cependant, elle explique peut-être son départ. Il faut tout de même arrêter de faire de la morale quand on définit simplement le mieux possible une identité. »
    Spaggiari était (a priori) d’origine italienne, c’est donc peut-être la raison de son départ après le casse du siècle ?? par exemple pour donner ses pépètes mal acquises à la mafia ??
    Autre solution franchement moins glamour : tout cet argent, où le dépenser sans se faire remarquer plus que ça ?? en restant chez moi bien sûr ! aucun policier français n’aura l’outrecuidance ni la présence d’esprit de venir m’y chercher moi le seul suspect de l’affaire ! Ah ben oui c’est peut être aussi pour ça qu’il est parti…
    Et c’est sûr que l’identité de Tony Musulin a été très simplement définie dans votre article du jour : serbe, point final. Est-ce à dire qu’il a les penchants sanguinaires et barbares de Milosevic et de Mladic réunis ? ou bien ??
    Et franchement, que ce soit une information reprise par tous les journaux (au passage, écoutant la radio, ça m’a aussi écorché les oreilles) n’est pas du tout un gage de qualité.
    Voyons Maître, ces arguments sont totalement irrecevables ! imaginez un réquisitoire ou chaque allusion à l’accusé fasse référence à son origine étrangère ! ne diriez-vous pas comme Aïssa et moi ??

  76. Est-il possible de n’avoir pas immédiatement compris que c’est l’homme qui échappe à sa destinée sans éclat que chacun applaudit, et moi avec. « Un qui s’échappe ! », bonne chance à lui.
    Nous servir cette morale de Carême, à nous, pauvres Français lambda, quand l’immoralité a investi l’Elysée, c’est un peu aveugle.
    Commencez par le commencement : que ceux qui doivent être parfaits le soient au moins un peu ; ensuite seulement on pourra demander à la piétaille de se priver de ses rêves et de liquider ses héros du jour.

  77. Brice Chevallier

    Monsieur,
    Vous avez tout à fait raison de vous offusquer d’une telle « robindesboisiation », mais que diable vient faire la petite phrase suivante au début de votre deuxième paragraphe : « … d’origine serbe… » ?
    En quoi cela aide-t-il à la compréhension de votre propos ? Si nous devions ainsi, à chaque personne dont on parle, rajouter ce genre de qualificatif, nos écrits deviendraient bien vite illisibles – ne sommes-nous pas une large majorité issu de l’immigration (fils, petits-fils) à vivre en France ? À commencer par notre Président issu de l’immigration hongroise et son épouse immigré italienne.

  78. Catherine JACOB@Polochon

    @Polochon « @JD Reffait
    « Une société qui substitue l’éthique à la morale est en grand danger »
    Faudrait m’expliquer cela car pour moi, éthique = morale !
    Je suis également scandalisé par la réaction du net ou de certains, qui en fait ne représentent peut-être qu’un petit pourcentage des utilisateurs du net. »
    Fondamentalement, éthique et morale reposent étymologiquement parlant, sur un même sens originel.
    L’éthique est en effet issu du grec « ethos », « coutume, usage » de « ethô »: comme cela a coutume d’avoir lieu (autrement dit, dans le respect des rites!) *swedh, « ce qui est propre à un individu ou à un groupe d’hommes, le « propre » donc, d’où est également issu le latin : « suesco » (e long et o long) : « s’accoutumer » et encore le grec « êthos: lieu de séjour » – dans le même registre on a en encore l’éthologie qui étudie les mœurs et autres comportement des animaux dans leur biotope naturel -. Quant à la morale, sa dénomination est issue du latin « mos » (avec o long), qui désigne la façon de se comporter et d’agir selon la coutume.
    De ce point de vue, on peut dire par ex. que la «pratique de l’excision ou de l’infibulation » et autre mutilation est morale…toutefois ailleurs que dans les pays où la fécondité prend le pas sur ce qui apparaît de nos jours un asservissement de la femme -mais pourrait, ce dans le cadre de la configuration de certaines structures de parenté, avoir été originellement une forme de contraception -, et où l’on pense depuis Hippocrate, que « les femmes doivent jouir pour concevoir » ce qui, non pas d‘un point de vue strictement organique mais d‘un point de vue psychosomatique, n’est sans doute pas tout à fait faux; Une conception qui a engendré (du moins d’après Wikipédia) des préconisations inattendues de la part des Diafoirus – pas si diafoirus que cela à vrai dire -, au Moyen-âge, préconisations qui auraient sans doute inspiré à ma Mère Grand, pourtant sage-femme de son état, un réprobateur « Oh là là! ». Et cependant, il y a là le fameux secret d’Héra dont la révélation à Zeus par Tirésias a cependant valu à ce dernier d’être puni par une cécité que le maître de l’Olympe dut corriger ensuite en don de ‘double vue’, tous évènements qui nous font envisager la divination sous des aspects assez intéressants ma foi …
    Par conséquent, ‘concevoir ou ne pas concevoir’ (où, quand, comment, pourquoi, pourquoi ne pas et surtout depuis que le géniteur a acquis de l’importance, avec qui), ‘that is THE Question’ que nous pouvons peut-être bien supposer au fondement de la morale et qui nous renvoie à nouveau aux formes de maîtrise du désir (dont l’Eglise a bien entendu sa version pas obligatoirement compatible avec ses propres préconisations relativement à, précisément, la fécondité), ainsi qu’à tout un certain nombre de questions très d’actualité.

  79. Catherine JACOB@JDR

    @Jean-Dominique Reffait | 10 novembre 2009 à 11:09
    « Oui, c’est exactement cela pour ce qui est de la récupération du papier mais moins côté voleur : son intention est bien d’injecter dans l’économie du papier qui n’a aucune contrepartie économique, donc de la fausse monnaie. Grosso modo, pour l’Etat, le manque à gagner est très faible financièrement (prix du papier), mais pour le voleur, il est bien de 9 millions.
    Au-delà de cette mise au point technique, ce qui m’importe est de me rapprocher du cœur du billet et, notamment, de l’approche morale du délit concerné.
    Souvenons-nous de ces distributeurs de billets qui ont dans le passé délivré deux ou trois fois les sommes demandées : je retire 20 € et le distributeur m’en donne 60, sans débiter les 40 € de trop, qui correspondent dès lors à de la fausse monnaie. Les gens se sont tous précipités sur ces distributeurs et il ne me semble pas qu’il y ait eu de poursuites : simplement une mise à jour des comptes concernés. Dans les principes, Musulin n’a pas fait autre chose.
    […]
    « Je crois que nous associons trop vite la transgression à l’immoralité : une règle peut avoir une utilité pratique sans s’appuyer sur un principe moral. Si la règle ne repose pas sur un principe moral, il n’y a pas d’immoralité à la transgresser, ce qui ne signifie qu’il faille le faire pour autant car la règle repose sur d’autres justifications pertinentes »
    Qu’est-ce en vérité que la fausse monnaie ou encore « monnaie de singe » sinon une monnaie dont la valeur n’est qu’imaginaire. A cet égard, toute émission par un état de papier monnaie dont la valeur affichée ne reflèterait pas sa contrepartie relativement aux réalités économiques serait en effet de la fausse monnaie purement et simplement, déjà ou encore à ‘injecter’ dans les circuits de circulation des biens où elle produira un effet inflationniste en dégradant elle-même au fur et à mesure tel un cancer, sa propre valeur.
    A cet égard, je ne peux pas croire que l’état français s’amuse à créer du papier monnaie d’une valeur purement fictionnelle et ne correspondant nullement au moment de sa création/production même, à sa contrepartie économique ou encore valeur or telle que dans les réserves de sa banque centrale (Banque de France).
    Ceci dit, c’est vrai que le remplacement des billets usagés retirés de la circulation notamment, peut avoir tendance à suivre une inflation inverse de celle du remplacement des départs à la retraite désormais à l’ordre du jour dans l’administration d’Etat et de ses regroupements de service…!
    Mais dans ce cas, la citoyenne lambda qui n’est pas une économiste, considère personnellement qu’il s’agirait là de quelque chose de fondamentalement immoral dans tous les sens du terme, puisque profondément déstabilisateur eu égard aux équilibres de forces qui président aux conditions de possibilités d’un ‘vivre ensemble’ tant à l’échelon national qu’international.
    Or donc, toute émission de papier monnaie par une Banque centrale doit être présumée non fausse (terme de logique formelle). Dès lors, ce qui a été soustrait à son stock doit être également présumé recouvrir de la monnaie non fictionnelle aussi bien à son utilisation par son soustracteur qui ne trompera pas son partenaire lors d’un échange commercial en payant un bien ou un service par de la monnaie susceptible d’être reconnue pour fausse par un détecteur de fausse monnaie, que relativement à son émetteur qui comme le l‘émetteur d‘un chèque est censé l‘émettre sur un solde qui est, à sa connaissance, positif au moment de sa création et non pas à la date présumée ou probable de sa présentation, ou encore dans les limites d‘un découvert autorisé. De même, en ce qui concerne le stock d’ores et déjà récupéré ainsi que celui encore à récupérer et au sujet duquel l’étrange soustracteur qui a finit par se rendre de lui-même à la police finira bien peut-être par avouer la cache et le mobile du show dont il nous a gratifié.
    Ceci mis à part, vos deux exemples, celui du dysfonctionnement du distributeur automatique ainsi que celui de la règle édictée sur le base de principes objets d’un détournement par rapport à leur sens moral initial, m’inspirent ceci :
    1) Quelle différence voyez-vous entre un véhicule qui transgresse l’interdit matérialisé par un feu tricolore passé au rouge en l’absence de tout autre véhicule venant de droite ou de gauche, le piéton qui traverse au même endroit malgré l’avertissement de danger matérialisé par le passage au rouge du feu bicolore qui éclaire la petite silhouette, en l’absence de toute survenue de véhicule dont il aura apprécié visuellement le risque, le handicapé qui se risque au même endroit dans sa petite voiture, le parent ou la nounou qui traîne derrière lui (elle ) un ou des gamins ou encore pousse devant lui une poussette, dès lors que ce que le comportement de chacun d’entre met prioritairement en évidence, c’est la substitution de leur propre jugement à la règle ou l’interdit censé régir le comportement considéré comme présentant d’un point de vue général le moins de risques dans la situation considérée, et dans quel autre type de cas admettez-vous que l’on puisse substituer à bon droit, autrement sans être dans la transgression, son jugement personnel à la règle applicable? Honnêtement dit, ça m’intéresse.
    2) L’histoire des distributeurs automatiques me rappelle cette anecdote: «  Il est arrivé qu’entre deux séjours au pays du soleil levant et à une époque où les tarifs des communications téléphoniques fixés par France Télécom dans le cadre d’une situation de monopole ne faisaient l’objet d’aucune sorte d’aménagement forfaitaire, je téléphone au Japon depuis l’une des ces cabines publiques où l’on pouvait obtenir sa communication par le biais d’une formule prépayée consistant à glisser un certain nombre de pièces dans les emplacements prévus à cet effet et qui, munis d’une paroi vitrée, permettaient de les voir disparaître au fur et à mesure, système qui permettait au besoin d’en rajouter, mais en revanche ne permettait pas d’obtenir de remboursement du temps non écoulé, quelque en fut le motif, y compris un dysfonctionnement de la cabine elle-même.
    Voici les faits: Je glisse donc dans la colonne des pièces de cinq francs, un certain nombre de pièces qui devaient me permettre de disposer d’un peu de temps, puis, l’épaule appuyée à l’appareil j’entame une conversation avec mon amie sur un sujet éminemment important ( = les faits et gestes du garçon qui m’occupait l’esprit…) quand tout à coup, elle me dit : « Oh, il est déjà telle heure, tu dois en avoir eu pour une fortune. » Le temps de conversation m’avait en effet à moi aussi paru un peu plus long que d’habitude malgré son sujet passionnant et je jette un œil sur la colonne des pièces de cinq francs où je vois que ma dernière pièce s’était coincée à mi-hauteur, ce dont j’informe aussitôt mon amie avec pour résultat que… nous avons cédé à la tentation de continuer notre conversation, toutefois avec un délicieux sentiment de culpabilité et le cœur battant, supputant les possibilités de remonter jusqu’à nous via le numéro appelé lorsque le dysfonctionnement serait constaté, un débat qui a par ailleurs occupé de fait la majeure partie du temps ‘volé’ à l’opérateur sans nous inciter malgré tout à le limiter, mais temps que contrairement aux billets supplémentaires délivrés par le distributeur automatique, il était difficile d’estimer à sa juste valeur et de restituer, sans compter qu’il n’entrait pas dans mes intentions de départ de surconsommer, que je n’étais pas à l’origine du dysfonctionnement et que donc ma bonne foi a été en somme quelque part surprise même si j’ai cédé à la tentation trop forte pour la commère que je suis tout au fond, d’en profiter un petit peu. De fait, il y a eu une suite à cette histoire, mais j’attends d’abord votre réaction, si réaction il devait y avoir, pour la livrer.

  80. Alex paulista

    Le gars aime assez la France pour revenir de son plein gré :o).
    Il n’était même pas recherché à Monaco.
    Il a dû comprendre que la prison était somme toute plus simple, plus sûre et moins onéreuse qu’une cavale éternelle.
    Surtout à Monaco où, pour deux Meuros, t’as plus rien !
    Espérons qu’en échange de cette reconnaissance de la qualité de ses prisons, la justice française saura se montrer clémente.

  81. Jean-Dominique Reffait@Catherine Jabob

    Vous vivez, comme nous tous, dans une fiction financière : celle issue de millénaires de commerce fondés sur la qualité intrinsèque de la monnaie. Auparavant, la monnaie n’était pas seulement une unité de compte mais bien une valeur en elle-même, représentée par son poids en métal précieux. Lorsque je vous vendais une miche de pain, vous me donniez la contrepartie en bronze, laquelle avait une réelle valeur (et non pas seulement faciale). Nous concevons encore la monnaie sous cet angle et la meilleure preuve en est le soin que l’on apporte à fabriquer des pièces de monnaies métalliques dans des alliages lourds alors que du plastique ou de l’aluminium (comme pendant l’Etat français de Vichy) feraient aussi bien l’affaire. Nous avons besoin de sentir ce poids, comme une réminiscence d’un poids de métal précieux.
    Vous vous représentez ainsi la monnaie comme physique, des billets et des pièces. La monnaie virtuelle de votre compte bancaire n’a de valeur que dans la mesure où vous pouvez la traduire en espèces. Voyez le peu de succès du porte-monnaie électronique : nous tenons à ce qu’on nous laisse une part de représentation physique de l’argent.
    De là cette fiction entretenue qui veut, comme vous le dites, que l’émission de monnaie est la contrepartie de richesses. En vérité il n’en est rien.
    Nos sociétés créent elles-mêmes leur monnaie, chacun de nous le fait. La spéculation boursière est la principale cause de création monétaire, en dehors de toutes les banques centrales, avec les résultats qu’on connaît. Chaque fois que vous créez une valeur ajoutée, vous créez la monnaie qui lui correspond. Pire, lorsque vous utilisez vos tickets-restaurants et que l’on vous rend la monnaie dessus, vous faites de la fausse monnaie : après vous avoir rendu 2 euros, le commerçant dispose d’un ticket qui vaut toujours 10 euros (et non pas 8). Vous avez donc créé 2 euros de fausse monnaie.
    La création de fausse monnaie n’est pas de nature à perturber les équilibres économiques. Les 4/5ème de la réserve de dollars mondiale est fausse, entendons par là qu’elle n’est appuyée sur aucune réalité économique du pays émetteur de cette monnaie. Les Etats-Unis eux-mêmes n’émettent qu’une part minoritaire des dollars qui circulent, la majorité étant le fruit des échanges de matières premières comptabilisés en dollar. 75% de la monnaie mondiale est du dollar : les USA ne représentent pas 75% de l’économie mondiale.
    Votre première question, réponse simple et évidente. Toute transgression qui fait ou risque de faire porter sur autrui les conséquences de son acte relève d’une appréciation morale. Dans le cas Musulin, il n’y a pas de conséquence sur autrui, directement ou indirectement.
    Votre deuxième question : vous coup de fil a eu un coût. Les Japonais ont facturé à l’opérateur français une communication et l’opérateur français n’a pas récupéré cette somme. Il s’ensuit qu’elle s’impute dans les pertes, que de mauvais résultats de l’entreprise induisent, par exemple, des restrictions budgétaires et que vous êtes, ô honte à vous, co-responsable cette année-là de la baisse de la prime de Noël des salariés. Adolescent en Bretagne, je connaissais une cabine à pièce (sans « s » car une pièce suffisait à téléphoner à la planète entière) comme ça qui n’a jamais marché, elle poussait même la délicatesse à rendre la pièce qu’on y introduisait, afin que la communication soit parfaitement gratuite.

  82. « Il n’était même pas recherché à Monaco. »
    Rédigé par: Alex paulista | 17 novembre 2009 à 13:17
    Oui, cher Alex, il eut été là-bas tel un poison dans l’eau, inodore incolore indolore, il avait déjà tous les billets pour se faire une réputation de roi chez ces loufiats, en pour boire, déjà.
    Mais PB a là raison (« Les Matins de … » ce matin) terrifiant de voir la popularité sur le Net d’un type qui au lieu de gagner son pain humblement et honnêtement, décide de stopper la vilaine roue du quotidien pour pouvoir vivre comme les riches avec des goûts de pauvres, ou de très nouveau riche (du soleil, des put.. et des Ferrari, un vrai beau rêve de joueur de foot).
    Je verrais volontiers là-dessous l’abrutissement généralisé que le valeureux Etienne (que défendait presque ici PB, m’a bien déçu en l’instant) a si joliment propagé, relayé par le culte du fric facile des traders, sportifs et autres nouveaux managers*, ceux dont la cupidité sans limite a sapé le sens commun populaire déjà bien fragile. Ce qui se résume dans l’esprit du plus grand nombre (allons bon, je fais mon élitiste à la JDR) à « puisque ils* se l’octroient sans raison, pourquoi pas nous ».
    Nous cheminions, nous y sommes.
    AO

  83. Catherine JACOB

    @Jean-Dominique Reffait@Catherine Jacob
    Vous raisonnez comme si toute monnaie fiduciaire ne pouvait que tourner en fausse monnaie et comme si la monnaie objet dont la valeur étalon a pu prendre des formes très diverses et pas spécialement métalliques, était nécessairement toujours vraie alors que nous avons tout de même bien connu la monnaie rognée par laquelle intervient la fraude constitutive de fausse monnaie tout comme dans le cas de la balance mal tarée ou du dé pipé.
    Fiduciaire ou objet, l’intérêt, du moins pour moi qui ne suis pas économiste, réside dans le phénomène de transfert qui permet à la monnaie sous quelque forme que ce soit, de ‘valoir pour’ et de ‘tenir lieu de‘, avec pour valeur ajoutée l’investissement symbolique qui se produit au-delà de la monnaie vecteur de l’échange et qui n’est cependant nullement de l’ordre de la pure fiction.
    Quelque part, le fondement de la monnaie me paraît être le cadeau, autrement dit par quoi on va rémunérer, par avance en somme, cet objet du désir sans donc le nommer comme tel, par ex. une faveur qu’il va falloir racheter à notre tour par un autre cadeau dès lors qu’on souhaite se dégager du lien instauré et s’y soustraire. Il semble en effet qu’il en aille de la pure gratuité comme de la pure neutralité. Si on fait quelque chose pour rien, ce quelque chose en effet vaut : rien. D’où, notamment, la justification des tarifs prohibitifs des analystes. (Je schématise). Mais bon, c’est loin d’être toujours juste. En tout état de cause, la monnaie crée le lien par lequel s’opère l’échange, si elle est fausse tout ce qui en dépend devient du semblant et si le prix est trop bas ou trop élevé, tout ce qui en dépend est sujet à un déséquilibre générateur de tout un certain nombre d’inconvénients appelés à interagir avec les conditions de possibilité d’un vivre en ensemble plus ou moins pacifique.
    Nonobstant, vous évoquez la miche de pain et son paiement. Mais si vous prenez en compte le fait que la balance du boulanger qui pèse la miche est mal tarée, le fait que vous la payiez en monnaie qui ne fait pas son poids, ne fait que rétablir l’échange dans une certaine vérité, du fait que moins par moins, fait mathématiquement plus!
    De même, si vous prenez en compte le fait que l’opérateur japonais de téléphonie facture sa prestation moitié moins chère que l’opérateur français ne vous la refacture, tout le temps où l’opérateur français a bénéficié de la différence, comme ce qui se passe avec la compagnie pétrolière dans le cas du prix du baril, se voit donc l’objet d’un simple réajustement (terme où se retrouve le mot ’juste’) au bénéfice du consommateur.
    Intervient alors ce me semble, la notion de convention qui permet de dire que le dysfonctionnement de l’appareil par lequel la prestation s’effectue n’étant pas d’ordre conventionnel, s’il vous arrive d’en bénéficier par une sorte de justice immanente, comme dans d’autres circonstances d’en pâtir sans pouvoir en obtenir réparation, vous n’êtes en rien responsable de ses répercussions éventuelles sur le montant du bonus, tant la hausse qu’ à la baisse, du technicien de maintenance; lequel technicien a, pour sa part, peu de chances de venir garnir les petits sabots que disposez devant votre cheminée le soir de Noël avec l’indu dont il a bénéficié sur votre dos.
    Puisque vous évoquez le dollar, intéressons-nous à l’ancêtre qui lui a donné son nom, le thaler et en particulier celui de la célèbre assertion kantienne dont vous n’avez pu manquer d’entendre ouïr par votre épouse, philosophe si je ne m’abuse : « Je suis plus riche avec cent thalers réels qu’avec leur simple concept.»
    « […] le réel ne contient rien de plus que le simple possible. Cent thalers réels ne contiennent rien de plus que cent thalers possibles. Car, comme les thalers possibles expriment le concept et les thalers réels, l’objet et sa position en lui-même, au cas où celui-ci contiendrait plus que celui-là, mon concept n’exprimerait pas l’objet tout entier et, par conséquent, il n’en serait pas, non plus, le concept adéquat. Mais je suis plus riche avec cent thalers réels qu’avec leur simple concept (c’est-à-dire qu’avec leur possibilité). Dans la réalité, en effet, l’objet n’est pas simplement contenu analytiquement dans mon concept, mais il s’ajoute synthétiquement à mon concept (qui est une détermination de mon état), sans que, par cette existence en dehors de mon concept, ces cent thalers conçus soient le moins du monde augmentés. » Emmanuel Kant, Critique de la Raison Pure, dialectique transcendantale, Livre II, P.U.F.chap. 3
    (« L’idéal de la raison pure, 4e section »), p. 429
    Et pourtant le concept du thaler qui en est la possibilité, ne revient pas à de la fausse monnaie mais correspond simplement au solde de votre compte en banque entre deux saisies arrêts, qui n’est pas fictif mais simplement bloqué et susceptible d’être soit l’objet d’une mainlevée soit d’un virement au créancier saisissant. Toutefois, si vous émettez un chèque sur ce compte bloqué dont le solde n’est cependant pas fictif, vous créez de la fausse monnaie! En revanche si dans le même temps vous utilisez votre crédit card dans le cadre d’une réserve telle celle des American express, vous pouvez opérer la même transaction sincère que dans le cas où vous auriez sorti les thalers de votre poche.
    Catherine Jacob, sans bob mais avec chapeau… de paille!

  84. Alex paulista

    Cher JDR
    Votre exemple du ticket restaurant est intéressant:
    dès que quelqu’un aura acheté 2 euros un dessert, la situation finale sera exactement équivalente à si j’avais été gourmand et mangé un dessert pour arriver au prix du ticket et rester dans la règle. Que le dessert soit dans mon estomac ou celui d’un autre, vous m’accorderez que l’effet est strictement nul sur la monnaie (dans ce cas particulier).
    La création de monnaie est proportionnelle à la probabilité que cela arrive par rapport à la probabilité que le dessert soit invendu.
    Donc je dirais qu’il y a eu création d’une fraction de deux euros de monnaie, mais pas de création artificielle de richesse.
    Le cas du convoyeur est bien différent: tant que ces billets ne sont pas récupérés, on ne peut pas les détruire et déclarer qu’ils ne valaient que la valeur du papier: quelqu’un peut les utiliser en échange de biens et de services.
    Si on pouvait « décider » ainsi que la perte est juste la perte du prix du papier, alors ce serait facile: la prochaine « douche » de Nicolas, on pourra imprimer un peu de papier. On trouvera bien quelque artisan qui acceptera un paiement en liquide et prendra bien en considération que cet argent ne doit surtout pas être déclaré. Si, si, ça se trouve.
    Je vous laisse, j’ai du courrier en retard. Il faut que j’écrive à Besson qu’il nous imprime quelques billets pour les Afghans renvoyés à leur pays où on défigure les électeurs. À deux millions le retour, ça devient honnête, même à Kaboul.

  85. Alex paulista

    Au fait, cher JDR, pour considérer ainsi que l’État est une poule aux œufs d’or… vous n’auriez pas des penchants socialistes ? Ou sarkozystes ?
    Au moins vous ne tombez pas autant que d’autres commentateurs dans la démagogie de considérer qu’on peut traîner les traders dans la boue juste parce qu’ils gagnent très bien leur vie.
    Les traders sont des gens honnêtes, on peut juste remarquer qu’ils se font (très) grassement payer pour leurs services parce qu’ils sont proches du flux financier. Mais fondamentalement ce n’est pas différent du petit commerçant qui distribue 20 euros un produit fait en Chine pour 2 euros. Sans les traders et la fluidité qu’ils apportent, nous aurions des prix de produits financiers sur-évalués de plus que les quelques pourcentages qu’ils prennent. Ils n’agissent pas différemment du courtier en assurance qui négocie le meilleur prix et se fait sa marge.
    Ils ne menacent personne avec un couteau, et je connais des banques qui recrutent, si des commentateurs se sentent capables je peux les mettre en contact avec leurs RH.
    Ça y est, c’était mon quart d’heure de droite. C’est une allergie développée à l’adolescence, sous Mitterrand. Ça va passer.
    Par mon travail je suis en contact fréquent avec les traders. Ce sont souvent des gens éduqués et sympathiques, plus proches du personnage joué par Stéphane Rousseau dans les Invasions Barbares, que du nouveau riche plein de fric d’American Psycho.
    Vous me direz, à ce prix-là ils peuvent être charmants.
    Ce n’est pas faux.

  86. Jean-Dominique Reffait

    Catherine Jacob et Alex,
    Il me paraît très hors sujet de traiter ici de la mécanique monétaire afin d’évacuer un certain nombre de confusion (masse monétaire et budget de l’Etat, aucun rapport – fausse monnaie et enrichissement, aucun rapport – la fausse monnaie créée volontairement peut enrichir mais l’essentiel de la fausse monnaie produite n’enrichit parsonne). Je ne reprendrai donc pas les exemples des tickets-restaurant, il suffit de constater que dans mon exemple 10 € se transforment en 12 € sans création de valeur, donc fausse monnaie. Confer les bons ouvrages d’économie.
    Je recentre sur le propos du billet : porter un jugement moral sur un acte suppose d’avoir une connaissance quasi-encyclopédique des conditions et des conséquences de l’acte que l’on apprécie, au regard des principes moraux que l’on défend. Et c’est rarement le cas pour chacun de nous.
    La conséquence en est le jugement moral qui porte sur une connaissance partielle des conditions et des conséquences : ce jugement moral n’est pas seulement invalide, il est nuisible et est lui-même frappé d’immoralité dans la mesure où un tel jugement peut, sur des bases partielles donc erronées, porter atteinte à quelqu’un.
    Mon propos concernant Musulin tenait à cela : pour pouvoir affirmer que Musulin a fait le mal, il faut être en capacité de déterminer la nature de ce mal, ce qui revient à bien connaître les mécanismes monétaires pour identifier la nature même de l’acte. En effet, l’acte de Musulin peut se traduire de deux façons :
    – Il a volé une fortune au détriment de quelqu’un
    – Il a volé du papier au détriment de personne
    La rigueur morale impose d’analyser tous les mécanismes et conséquences pour porter une appéciation morale. Dans la plupart des délits, le dommage à autrui est visible, évident, l’immoralité du délit saute aux yeux. Dans le cas Musulin, c’est loin d’être aussi évident.

  87. M. Bilger, il y a peut-être eu une condescendance admirative de la population envers ce convoyeur, simplement parce qu’il a osé ce que certains rêvent de commettre en riant, mais qui n’osent pas passer à l’action, tout en y pensant, parce que leur conscience les moralise encore…
    Le convoyeur s’est rendu et la naïveté des commentaires : « Il n’a pas rendu les fonds ! »
    Bonsoir, s’il a commis un hold-up ce n’est certainement pas pour restituer un butin (qu’il espérait plus important) qui devrait lui assurer quelques années au chaud à sa sortie de prison ! Si un comparse, impliqué dans la cavale, ne lui a pas « bouffé » d’ici là son pactole !
    Cinq ans ou trois, c’est long !
    Maintenant il peut toujours jouer la carte qu’il a été contraint, enlevé, séquestré et s’est évadé… La suite dans FBI porté disparu !
    @ Alex,
    Vous trouvez que les traders sont sympas. Tant mieux, surtout lorsqu’ils perdent l’argent des contribuables avec leur jeu virtuel : « Jouons en bourse » !
    Le client perd ses fonds et le trader s’octroie une commission, une belle récompense, ça aussi c’est bien moral.
    Certains fonctionnaires des impôts (ne généralisons pas) qui devraient être ravis lorsque les contribuables leur versent leurs impôts, ne démontrent pas envers eux la même sympathie….

  88. oursivi@JDR&CJ
    Rédigé par: Jean-Dominique Reffait@Catherine Jabob | 17 novembre 2009 à 16:54
    D’abord d’accord avec les trois premiers paragraphes, jusqu’à :
    « La spéculation boursière est la principale cause de création monétaire, en dehors de toutes les banques centrales, avec les résultats qu’on connaît. »
    Ensuite cela se gâte.
    « Chaque fois que vous créez une valeur ajoutée, vous créez la monnaie qui lui correspond. »
    Non, c’est faux, ce sont les banques centrales qui ajustent à leur idée la quantité de représentation symbolique-matériel (les pièces les billets, l’autorisation de presser d’autres symboliques comme « vos tickets », en contrepartie) que les échanges matière (un bien) ou symbolique (un service) versus symbolique (une somme d’argent) nécessitent.
    Ce sont elles pas vous, ou alors vous allez bientôt avoir le plaisir de rencontrer PB ou un de ses collègues.
    Si vous créez mille tableaux qui au lieu de rester à croupir dans votre grenier trouvent preneur à des prix astronomiques, vous n’aurez pas créé « la monnaie qui lui correspond », éventuellement aurez si les volumes d’échange induits étaient à ce point importants, suggéré aux responsables des équivalence mat-symb de créer davantage de second (des billets des pièces des tickets resto des bons du trésor) pour permettre les échanges des premiers.
    Votre exemple de ticket resto n’est pas signifiant, c’est quand la banque centrale autorise la mise en circulation de ce symbolique qu’elle crée de la monnaie, et par définition toute celle qu’elle créée ne peut-être de la fausse monnaie (ce qui ne signifie pas qu’elle ne peuvent se tromper dans le processus d’appréciation qui juge de la quantité nécessaire, qu’elle ait raison ou non, il y a trop de paramètres qui plus est mal ficelés dans leur définition et leur rôle, pour qu’un optimum global puisse être trouvé), puisse que ce terme est simplement attaché à une légitimation non économique mais administrative.
    Sur le plan économique, la vraie monnaie peut être de la monnaie fausse ou monnaie de singe, en ce qu’elle ne représente rien, la planche à billets et les inflations calamiteuses qu’elle autorise comme l’émission des titres du trésor comme les Chinois en « bouffent » depuis plus d’une décennie en est l’exemple.
    « La création de fausse monnaie n’est pas de nature à perturber les équilibres économiques. »
    Ânerie complète, l’inflation est un mot qui fait sans doute sens à vos oreilles, les Allemands payant leur baguette avec une brouettée de Marks, cela vous dit quelque chose ?
    « Les 4/5ème de la réserve de dollars mondiale est fausse, entendons par là qu’elle n’est appuyée sur aucune réalité économique du pays émetteur de cette monnaie. »
    Vrai.
    « Les Etats-Unis eux-mêmes n’émettent qu’une part minoritaire des dollars qui circulent, la majorité étant le fruit des échanges de matières premières comptabilisés en dollar. 75% de la monnaie mondiale est du dollar : les USA ne représentent pas 75% de l’économie mondiale. »
    Faux, si vous parlez des vrais dollars, pas des flux financiers virtualisés qui ne signifient rien, auquel cas êtes déjà plus dans le vrai.
    Faux, parce qu’à ma connaissance un pays est seul à frapper sa monnaie, donc les premiers dollars cités le sont de par leur seul fait.
    « Votre première question, réponse simple et évidente. Toute transgression qui fait ou risque de faire porter sur autrui les conséquences de son acte relève d’une appréciation morale. Dans le cas Musulin, il n’y a pas de conséquence sur autrui, directement ou indirectement. »
    Que c’est rapide et peu estimable…
    Musulin va au contraire encourager un paquet d’aigre fins à penser que voler une grosse somme d’argent est facile et rend l’auteur de la grivèlerie sympathique aux yeux sots du plus grand nombre.
    Certes, ce n’est pas un criminel, il n’a pas à être jugé lourdement, mais dans la rapide déliquescence qu’observons des moeurs financières, il est un de ces petits acteurs (rendu bien maladroitement malfaisant par les médias) bien propres à pourrir encore plus le règne du « chacun pour soi et par presque n’importe quel moyen ».
    Les propos de la chanteuse Juliette, ouïs chez Taddeï hier soir me reviennent dans ce contexte.
    Il y était question de cette sordide société publicitaire (beau pléonasme, je vous le concède) prétendant distribuer des billets au hasard d’une rue pour faire parler d’elle.
    Qu’elle ait véritablement provisionné les sommes promises est possible mais pas démontré, mais qu’elle se soit choisi un rôle sordide est assuré. Voir des gens pour la plupart sains, bien portants et en état de travailler aller mendier est à mes yeux choquant. Que ceux-là se mettent à tout casser parce que les sordides montrent en quoi ils les considèrent comme un simple bétail auquel on ne donne pas la piécette « promise » est tout autant à leur propre déshonneur. Que ceux-là aillent saccager les locaux de ces vils apprentis sorciers ne m’eut pas choqué outre mesure, voire réjoui. Mais qu’une chanteuse au demeurant talentueuse comme Juliette nous dise froidement « qu’ils ont raison de tout péter voire d’agresser les simples passants » laisse songeur quant au fait que l’on refile la parole à des simples d’esprit sous prétexte qu’ils sont des chanteurs plus qu’honnêtes (comme si on me demandait de jouer du piano à sa place sous prétexte que je sais plutôt très correctement faire autre chose)…
    Manquer à ce point de discernement que d’appeler presque à la guerre civile où tout le monde tape sur tout le monde parce que tout le monde en a marre et d’autant plus que tout le monde se tape dessus est un assez bon marqueur de la bêtise de cette dame.
    AO

  89. J’en termine temporairement avec les mécanismes économiques liés à la monnaie et plus particulièrement au dollar.
    La raison pour laquelle un pays ne s’en sortait en général pas en frappant toujours plus de ses propres devises était que celles-là servaient uniquement à acheter ce que lui-même produisait en ses propres frontières, si bien qu’en achetant aux autres avec leur propre monnaie, il expérimentait ce que le cours d’échange monétaire traduisait à savoir la comparaison de ce que l’on peut réellement acquérir dans un pays. Ce qu’il mettait en circulation devait être proportionnel à ces biens échangeables. Qu’il ne respectât point cette règle eut entraîné que payant ce qu’il achète à l’étranger avec sa monnaie de singe il eut vu ses vendeurs bientôt fort mécontents qu’ils ne puissent en contrepartie acheter quoi que ce soit d’intéressant ou en quantité suffisante chez lui, ou au mieux viennent bientôt à posséder du fait de leur possibilité d’acquisition tout ou grosse partie de ce qui se vend dans ses propres frontières.
    On intuite dès lors ce qui fait le tour de passe passe américain. Dès qu’une monnaie s’est globalisée dans les échanges au point de ne plus se réduire à être la porte d’entrée vers les biens économiques (échangeables) que sa nation émettrice produit, et devient l’instument d’échange de choses (biens servces) produites n’importe où, le fonctionnement comme la morale sous-jacente à la description ci-dessus, tombe.
    Elle n’a plus à justifier que le volume de ce symbolique soit borné par la pertinence de l’équivalence puisque l’équivalence ne se fait plus avec ce qu’elle produit de réel, mais avec tout ce qui est produit, qu’elle le fasse ou non.
    Ou comment fabriquer de quoi avoir le droit de se payer le monde, en plus de s’en foutre.
    AO

  90. Jean-Dominique Reffait

    Oursivi, il faut savoir conclure. Je m’en veux d’avoir ouvert cette digression monétaire qui ne tendait qu’à montrer que, sans la connaissance de toutes les véritables conséquences d’un acte, il est difficile voire dangereux d’émettre une appréciation morale.
    J’ai donc simplifié à outrance, juste pour montrer un autre éclairage de l’acte de Musulin, et vous me resimplifiez en extrayant quelques phrases, c’est pas loyal, camarade ! Bien sûr que la création de fausse monnaie massivement fout en l’air les équilibres économiques. La titrisation des subprimes en est un exemple. J’évoquais évidemment l’artisanat dans lequel Musulin se range.
    En revanche, l’influence de Musulin sur d’autres amateurs de coups fumants ne peut être porté à son débit. Il n’exerce pas de magistère moral sur la population et s’il fait des émules, cela est dû à la médiatisation de l’acte qui ne lui incombe pas. L’acte de Musulin est amoral en ce sens qu’il n’a pas fait le bien, mais qu’il n’a pas fait le mal non plus. J’ai eu un doute à ce sujet par rapport à ses collègues très embêtés après cette histoire, mais en vérité, ces collègues avaient eux-mêmes commis des fautes règlementaires, ce qui exonère Musulin de leurs soucis. En poussant à bout le raisonnement, Musulin a rendu service à son employeur en mettant en évidence des manquements dans les procédures. Il est évident qu’après lui, il va être difficile de reproduire un vol de même nature.
    Je ne me place pas sur le registre « Musulin sympa ou pas ». Je me moque de ce type.

  91. Alex paulista

    Cher Oursivi
    Je suis bien d’accord avec vous.
    Créer de la représentation monétaire c’est comme émettre des chèques de 100 euros signés et sans ordre et les stocker dans un coffre.
    Que la somme des chèques corresponde à 10% ou 20% de ce qui est dans le compte en banque n’a pas beaucoup d’influence.
    Vous faciliterez les amis en manque de monnaie en recevant leurs virements en échange de paquets de chèques pré-signés.
    Mais si on vous vole le stock de chèques, on vous vole de l’argent car vous ne pouvez pas dire que ce n’est pas votre signature en bas.
    La perte en représentation monétaire est négligeable (vous pouvez re-signer des chèques, c’est juste le prix du papier), mais la perte sur votre compte en banque va faire mal !
    Là c’est pareil en pire: on ne peut pas annuler les billets et l’argent est déjà parti du compte lorsque les billets ont été émis.
    J’aimerais juste ajouter que cette crise marque la fin de cette prédominance du dollar, plus que la fin de la suprématie des USA.
    Car la vraie richesse des USA, c’est son peuple.

  92. Alex paulista

    Chère Marie
    Vous écrivez
    « Vous trouvez que les traders sont sympas. Tant mieux, surtout lorsqu’ils perdent l’argent des contribuables avec leur jeu virtuel : « Jouons en bourse » !
    Le client perd ses fonds et le trader s’octroie une commission, une belle récompense, ça aussi c’est bien moral. »
    Le trader joue l’argent de la banque, pas des clients. La commission du trader est calculée sur son bénéfice. En cas de perte, zéro commission, et potentiellement la porte.
    S’il ne gagne pas assez, il peut aussi être remplacé. Les VRAIS traders compensent leur risque avant de faire toute opération importante. Mais quand un imposteur breton (je mets l’origine moi-aussi) fait n’importe quoi et perd 5 milliards, le grand public est solidaire de ce fou parce qu’il se reconnaît dans un échec scolaire inconséquent aux nerfs de papier. Le public en veut aux autres traders alors que ce sont les organes de contrôle de la banque qui sont lamentables de se faire entourlouper de telles sommes. Pourtant les dirigeants sont maintenus. Je trouve qu’ils volent bien plus leur salaire que ne le fait un trader qui rapporte du cash en France donc des impôts, le tout sans prendre de risque.
    De la crise du crédit immobilier, on retiendra que tout est à cause des traders.
    C’est pourtant la politique économique américaine qui est à blâmer, la titrisation et la main-mise des fonds de pension sur la Bourse. Les traders, eux, existent depuis des années. On peut penser qu’ils sont trop payés, comme on peut penser que les grands patrons sont trop payés, ou que les joueurs de foot sont trop payés.
    La jalousie est forte, notamment des fonctionnaires du trésor…
    Qu’ils publient leur salaire à leur tour. Ce sont les mieux payés des fonctionnaires et pour la même raison: ils sont proches du flux d’argent.
    Au fond, c’est exactement la même chose.

  93. « Car la vraie richesse des USA, c’est son peuple. »
    Rédigé par: Alex paulista | 18 novembre 2009 à 19:36
    Absolument.
    « En poussant à bout le raisonnement, Musulin a rendu service à son employeur en mettant en évidence des manquements dans les procédures. Il est évident qu’après lui, il va être difficile de reproduire un vol de même nature. »
    Oui, certes, mais il ne vont pas lui allouer une prime, non plus, il se l’est déjà mise au chaud.
    BàV2
    AO

  94. Laurent Dingli

    Il y a des héros et des anti-héros. Je pense à Sami Naceri dont j’ai écouté l’interview hier sur TF1, j’ai vu, ou plutôt revu le paria qu’il est devenu, ses yeux égarés de détresse, ses lèvres molles, sa voix que les médicaments font balbutier, son corps épuisé par une vie d’enragé. Et, sans jamais excuser ses actes, j’éprouve beaucoup de compassion pour lui. Il y avait quelque chose de profondément pathétique (au sens réel du terme, c’est-à-dire émouvant) dans le spectacle de cet homme qui erre ainsi et cherche désespérément à comprendre le mal atroce qui le ronge, qui le détruit, lui, et son entourage. Il n’est plus le rebelle ou l’arabe à la mode ; plus qu’une loque, un homme seul, qui croit pouvoir bénéficier d’une dernière chance avant de se faire sauter le caisson… Et les six mois passés à Fresnes ne semblent rien comparés à la prison intérieure dans laquelle la maladie l’a emmuré vivant. L’horreur…

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