Françoise Bourdin : la scandaleuse réussite d’une inconnue

Les vacances sont un moment magique pour s’abandonner à ce vice recommandable qu’est la lecture.

On n’en abuse jamais et, pour ma part, j’avoue m’être plongé avec délice dans cette surabondance où la vie fictive des autres vous détourne de la réalité triste ou joyeuse de la vôtre. Surtout avec la découverte, grâce à mon épouse, de la tablette Kindle qui rend encore plus aisé et naturel l’exercice. Je croyais avoir besoin des pages qu’on tourne et des livres qu’on tient mais je me suis découvert sur le tard, à mon grand étonnement, une aptitude relative au changement.

J’ai profité des mois de juillet et d’août pour lire plusieurs livres de Françoise Bourdin, une romancière dont j’avais entendu parler grâce à un portrait d’elle dans Libération il y a un ou deux ans.

Elle a commencé à écrire très jeune à l’âge de seize ans puis elle a été jockey. Elle a attendu d’avoir élevé ses enfants pour reprendre son activité de raconteuse d’histoires, pour laquelle elle est si évidemment faite et douée. Après Marc Lévy, Guillaume Musso et Katherine Pancol, elle est, en France, la plus importante vendeuse et il est incontestable qu’elle les dépasse de très loin par le talent, la psychologie et la finesse de l’analyse. Et l’humanité complexe et chaleureuse.

Une légère hésitation m’a saisi devant l’aveu de ce plaisir et de cette appétence, tant Françoise Bourdin demeure une inconnue dont la réussite doit apparaître scandaleuse au cénacle intellectuel et littéraire qui dans la presse écrite et l’audiovisuel fabrique nos goûts et nos dégoûts.

D’abord elle est lue. Et beaucoup lue. J’ai conscience que l’importance de ce succès qui après tout pour un roman ne devrait pas être une tare, la dessert pourtant. Cela est suspect, forcément suspect. Le gros mot est lâché : populaire !

Ensuite, un comble, quand on a commencé ses livres, on ne peut plus les abandonner, ils ne vous tombent pas des mains. La limpidité de son style et la maîtrise de sa technique, la compréhension manifeste qu’elle éprouve pour l’être humain et les ressorts sombres ou lumineux qui l’animent et l’absence totale de vulgarité de ses récits lient le lecteur à ce qu’il a appréhendé du bout de l’esprit avant d’être empoigné et d’accepter sans remords l’enchantement simple, accessible et plus profond qu’il n’y paraît de ses oeuvres.

Certes on devine ses « trucs », ses recettes, notamment avec la clarté de chaque exposition qui met en place et en évidence les éléments sur lesquels le récit va suivre son cours et proposer un dénouement assez facilement prévisible d’emblée. Mais peu importe. Quel romancier n’a pas ses obsessions et sa manière de mettre dans l’écrin de son imagination les éléments que son expérience lui a prodigués ?

Pourquoi ce mépris, en tout cas cette dérision sarcastique à l’égard de cette littérature et de cet écrivain noblement populaire ?

Sans doute parce qu’elles ne confrontent pas le lecteur à des mystères inutiles, qu’elles fuient les obscurités artificielles et qu’elles se servent du langage non pas comme objet d’étude mais comme moyen privilégié de communication et d’expression. Elles ne se haussent pas du col et ne prétendent pas être Marcel Proust contrairement à certains qui ne sont pas loin de croire qu’ils l’imitent en le dépassant. Parce qu’elles acceptent de s’offrir avec une modestie non feinte et sont heureuses de la joie qu’elles procurent. Elles préfèrent un lecteur ravi à un lecteur exsangue, épuisé.

Les auteurs qui vendent plus qu’elle ont cette touche de modernité vulgaire, de collusion médiocre avec l’air du temps et de singularité, de provocation narrative qui attirent le chaland plus intrigué par le clinquant et la médiatisation injuste que par la retenue sobre et raffinée.

Jamais Le Monde des livres ne consacrera un article à un roman de Françoise Bourdin. Ce serait déchoir. Jean Birnbaum s’étoufferait à l’idée de devoir traiter d’un auteur aussi stupidement lu et célébré. Libération n’ira jamais au-delà du portrait. Même si Françoise Bourdin s’efforçait d’instiller de l’hermétisme et de glorifier l’homosexualité, cela, je le crains, ne suffirait pas. Télérama, pour sa part, lui reprocherait un manque d’ennui distingué et de n’avoir pas su porter sur ses épaules le monde déshérité et douloureux d’aujourd’hui.

Le drame central, pour elle, est qu’elle soit évidemment trop lue. Elle n’y peut rien. Dur de devenir un écrivain maudit. Elle devrait perdre ses qualités de romancière et s’inventer des défauts sulfureux et un tantinet nauséabonds.

Un jour peut-être, je l’espère pour sa réputation médiatique, Françoise Bourdin connaîtra l’insuccès.

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  1. calamity jane

    Ben alors, Monsieur Bilger on n’a plus peur de son attitude relative au changement !
    Comme adorait dire un distilleur de savoir, « haut les cœurs » donc.
    Mais plus sérieusement, votre billet me rappelle une discussion entre littéraires bien sûr, dont certains responsables de collections dans l’édition.
    Le sujet était la collection Harlequin.
    Les purs et durs prétendaient que la littérature était bafouée quand d’autres pensaient que c’était une ouverture pour
    aborder des œuvres plus conséquentes.
    Ben oui ! n’importe qui ne peut écrire « La symphonie pastorale » mais comme pour le cinéma beaucoup de marmaille pour peu d’adultes.
    Ces jours j’ai rouvert « Le réenchantement du monde » de Michel Maffesoli. Et je fais le contraire des lectrices estivales…
    Va savoir !

  2. Bonjour Philippe Bilger,
    « Une légère hésitation m’a saisi devant l’aveu de ce plaisir et de cette appétence, tant Françoise Bourdin demeure une inconnue dont la réussite doit apparaître scandaleuse au cénacle intellectuel et littéraire qui dans la presse écrite et l’audiovisuel fabrique nos goûts et nos dégoûts. »
    Pour véritablement apprécier à sa juste mesure ce qu’inspire Françoise Bourdin à la « belle société parisienne » le mieux est, je pense, de revoir son passage à l’émission de votre ami Laurent Ruquier en mars 2013 dont voici le lien ci-joint :
    http://infos-tele.fr/francoise-bourdin-dans-on-nest-pas-couche-video-31-mars-2012/
    Passage savoureux : Laurent Ruquier demande à Christophe Barbier pourquoi ne figure jamais aucune critique des romans de Françoise Bourdin dans L’Express. Ce dernier répond avec une franchise presque naïve que ce genre de littérature ne fait pas partie du registre de son journal.
    Manifestement il préfère les livres des politiques qui pour la plupart sont écrits par une autre plume plus talentueuse que ne serait la leur, ou encore les livres de ses confrères dont la plupart sont farcis de copiés-collés d’autres auteurs plus inspirés. Inutile de citer des noms, ils sont connus.
    Vient ensuite Natacha Polony, forte de son auréole d’agrégée de lettres modernes. Elle fait délicatement comprendre à l’invitée qu’elle ne sera jamais Colette ni Rimbaud et encore moins Victor Hugo. Bonne réponse de Françoise Bourdin qui lui répond qu’elle n’a jamais eu cette intention.
    Quant à Audrey Pulvar, elle se contente de propos alambiqués, disant en substance qu’il n’y a pas de raison d’opposer le roman populaire aux belles-lettres et que les deux sont compatibles. Mais on n’en saura pas plus.
    Bref, on sent bien que pour ces gens-là les livres de Françoise Bourdin sont surtout destinés aux rayonnages des kiosques de quai de gare pour un public pas très « raffiné », adepte des belles histoires à l’eau de rose : la ménagère de moins de cinquante ans, par exemple, mais certainement pas à des gens de leur qualité.
    Pauvre Françoise Bourdin qui a dû avoir l’impression amère d’être invitée à un dîner de cons.

  3. Je verrais bien Josyane Savigneau condamnée à dix ans de forteresse avec pour seule lecture la prose de Françoise Bourdin. Ce serait une vraie double peine.
    Toutefois j’avoue avoir déjà raté Guy des Cars et Paul Géraldy et je sens que je vais passer à côté de cette dame, sans problème.

  4. Il faut reconnaître un talent à Marc Lévy: avoir ramené les gens vers la lecture. Et c’est quelque chose de formidable.

  5. Je trouve proprement scandaleuse l’attitude des pseudo-élites intellectuelles qui s’extasient devant la prose navrante de Philippe Sollers et autres gloires littéraires du moment, et qui méprisent ou ignorent la littérature populaire. J’y vois un souci de distinction propre à la bourgeoisie. Il est tellement plus chic de disserter sur le dernier ouvrage d’un auteur bulgare inconnu en France que d’avouer qu’on aime un écrivain populaire tel que Bernard Clavel.
    Mais on lit pour toutes sortes de raisons, par obligation (à l’école), pour s’informer (journaux), pour s’instruire (histoire, philosophie), pour se divertir (aventures, voyages), pour s’amuser (bandes dessinées) ou simplement pour le plaisir de lire une bonne histoire. Ce qui compte c’est de lire.
    Il se trouve que j’apprécie autant les romanciers américains (surtout les polars) que les historiens français (Veyne, Duby, Le Goff). En revanche, j’ai du mal à lire les romanciers français modernes qui préfèrent contempler leur nombril et étaler leurs états d’âme plutôt que d’observer et décrire la société de leur temps (comme le faisaient Balzac, Hugo ou Zola). Quant aux philosophes français, hormis quelques exceptions notables (Bergson, Bouveresse, Dagognet), ils sont souvent incompréhensibles, écrivant dans un jargon qui donne l’illusion de la profondeur alors qu’il s’agit de vide intellectuel.
    Il y a plus de profondeur et de style dans une seule page de La Bruyère ou La Fontaine que dans les œuvres complètes de Sartre ou Sollers !

  6. Ce monde – Monde ? – littéraire est terriblement codifié, lui pourtant composé de créatures si sensibles, à la subjectivité a priori épanouie. Rien de bien nouveau. Les grands auteurs et critiques d’il y a cinquante ans étaient impressionnés par la personnalité de Georges Simenon. Beaucoup moins par son oeuvre policière fournie, un sous-genre littéraire à l’époque, même pour eux, surtout pour eux. Georges le Belge fait partie désormais de la Pléiade, lui. Triple épaisseur.
    A croire que la femme, l’homme à la plume n’échappe jamais à la grégarité d’une coterie. Même quand elle, il, fait un sort avec brio à des centaines de pages blanches. L’éditeur peut toujours pincer les lèvres en petit comité lettré, il monte sur son bureau en faisant l’avion quand il compulse certains chiffres de vente.
    Carte Gold ou carte de club ?

  7. Maître Jean DAMNED

    @Savonarole
    Josyane Savigneau a fait « sa » khâgne au lycée Descartes de Tours.
    Comme elle s’est étalée aux concours des Normale Sup’ (Bd Jourdan et Fontenay-aux-Roses), l’hydre de la vengeance médiatique contre la société l’a prise en possession.
    Une de ses anciennes camarades originaire de 37-Montrichard (Marie-Paule B.) nous rapporta qu’elle recherchait le parrainage « rapproché » (…) d’un certain M. Elkabbach.
    Un jour de 75 ou 76 nous la visitâmes (mais point seul !) en sa location de la rue Daguerre avec vue sur pierres tombales.
    Elle manifesta objectivement être en proie à un trouble quelque peu paranoïde car au plus banal et courtois sourire on ne peut plus neutre, elle vitupéra
    « tu te moques de moi parce que je suis grosse »… hélas : rigoureusement sic.
    En effet en ce temps bien avant son intronisation en la Mondaine des Livres, elle « conçut » un embonpoint corporel trahissant sans doute un violent conflit psychique entre sa réalité et sa représentation spéculaire.
    Depuis, ses souffrances identitaires sont transfigurées en autant de présomptions de talent, et elle peut jouir de l’impression d’avoir retourné les préjugés sociétaux
    ce que Beauvoir, morte alcoolique, n’avait pas eu le temps de le faire.
    Mais jusques à quand ?

  8. Cher Philippe,
    Peut-être que le livre sur la corrida « Mano a Mano » de Françoise Bourdin aurait pu nous séduire en passant à la trappe la partie à l’eau de rose.
    La question posée à ceux qui l’ont lu : combien de pages à sauter et combien de pages à lire.
    Et encore, de l’intérêt des livres pour tuer le temps… le temps est beaucoup trop précieux.
    Pour les amateurs de séries. Chacun ses goûts et ses priorités.
    françoise et karell semtob

  9. Maître Jean DAMNED | 24 août 2013 à 22:13
    By Jove ! Quelle tranche de vie… quel parcours… des catacombes de Denfert-Rochereau au marbre de son quotidien du soir. Sous Staline elle aurait été commissaire du Peuple aux Belles-Lettres.

  10. Véronique Raffeneau

    « Quel romancier n’a pas ses obsessions et sa manière de mettre dans l’écrin de son imagination les éléments que son expérience lui a prodigués ? »
    Le souci est que le romanesque des auteurs des scénarios télé, comme ceux que vous citez dans votre billet, ne décrit que leur univers, petit, avec comme seuls marqueurs de leur imagination un monde lisse, décroché des malheurs et des tragédies humaines, où on est architecte, cardiologue, notaire, etc.
    Le monde des épargnés et des vacances.
    Les romans ou les récits où
    « la compréhension manifeste pour l’être humain et les ressorts sombres ou lumineux qui l’animent »
    sont ceux qui font tenir ensemble de façon énigmatique le noir et le lumineux, les perdants et les heureux.
    Ce sont les écrivains, les authentiques, ceux de la compassion, la vraie.
    Les auteurs américains, à mon sens, réussissent ce tour de force.
    Quant à l’indifférence des pages littéraires du Monde ou de Libération, pourquoi les journalistes devraient-ils adopter cette autre posture, la vôtre, qui consiste à dire qu’ils ont adoré un roman de Françoise Bourdin, ou de Marc Lévy ou de Katherine Pancol ?
    Je sais bien que pour faire preuve d’originalité, dans le monde surfait des médias, on est prêt à tout pour se distinguer.
    Il ne faut tout de même pas exagérer.
    Je me réjouis que Françoise Bourdin ait des lecteurs très nombreux.
    Mais la littérature, non, ce ne sont pas des architectes, des cardiologues, des notaires, et leur maison de famille, évidemment située dans des terroirs sublimés, si pleine à craquer de secrets… évidemment… de famille.
    Marre de cette littérature surabondante et omniprésente à la télé et dans les magazines, avec ses imaginaires sans imagination, ni compassion.

  11. Voilà plusieurs décennies que je ne lis plus de romans, me contentant d’ouvrir les yeux et les oreilles sur le monde. Aucun roman ne pourra rendre la réalité trop réelle pour être crédible dans un livre.
    L’anthropologue amateur que je suis se délecte d’ailleurs à la lecture des commentaires du blog.
    Je découvre donc Françoise Bourdin, et je suis d’autant plus libre pour en parler que j’ignore tout d’elle.
    Si j’ai bien compris, son œuvre ne se rattache pas au nouveau roman et Alain Robbe-Grillet n’a jamais parrainé sa candidature à l’Académie Française.
    Elle est donc populaire. Populaire ou populiste. That is the question ?
    Est populaire, celui qui n’étant pas du monde des bobos se soumet à leurs règles en échange de leur condescendance.
    Est populiste, celui qui se moque de l’opinion de l’intelligentsia de gauche (pléonasme) et parle librement de sentiments.
    J’ai bien peur que F. Bourdin ne soit un tantinet populiste, c’est le sort de ceux qui vont droit au cœur sans passer par les codes intellectuels en vigueur.
    Si elle ouvre les portes de la littérature au plus grand nombre, elle aura bien oeuvré.
    On retrouve le même phénomène, toutes proportions gardées, en musique avec André Rieu.
    N’importe quel mélomane, et j’en suis, ne peut qu’éclater de rire devant le spectacle de cirque qu’il offre. Mais s’il ouvre la porte de la musique classique à ceux qui n’ont pas d’autres moyens d’y entrer, pourquoi pas.
    Petite anecdote personnelle, mais qui va dans le sens de votre billet je crois.
    Je racontais un jour à une jeune femme charmante (bien qu’ayant des responsabilités au PS) que j’aimais Vivaldi. Elle me répondit par un gentil coup de griffe : « Moi aussi, quand j’avais seize ans ».
    Je lui fis remarquer que Bach lui-même s’était inspiré de Vivaldi pour certains de ses concertos pour clavier.
    Elle haussa les épaules, elle bredouilla quelques mots dans lesquels je compris qu’elle considérait Bach comme surfait. Boulez était passé par là probablement.
    Comme elle était charmante, bien que socialiste, je ne lui en ai jamais voulu. Et puis elle avait raison, je n’avais pas à comparer Bach et Vivaldi, Bach est incomparable, la voix de Dieu sur terre.

  12. Ph. Bilger, dans le paragraphe où il loue la clarté d’écriture : « contrairement à certains qui ne sont pas loin de croire qu’ils imitent [Marcel Proust] en le dépassant ».
    Question : Quel est le sens de cette phrase ?
    1° qu’ils font du MP en mieux, et donc le dépassent ? (mais il faudrait : qu’ils dépassent MP en l’imitant)
    2° qu’ils égalent et même dépassent MP ? (mais il faudrait alors un autre verbe qu’ « imiter »)
    3° qu’en dépassant MP, ils l’imitent, puisque lui dépassait X – Flaubert par exemple ? (ça me semble le seul sens compatible avec l’expression, mais l’ellipse est telle, et l’idée si étonnante, que je doute que c’est ainsi qu’il faut comprendre).
    Il semble ne rester alors qu’une seule solution : cette phrase, telle quelle, est dépourvue de sens : il faut au lecteur deviner ce que Ph. Bilger a voulu dire, et comment il se serait exprimé s’il avait bien écrit.

  13. « Eau-de-feu » du defunt Monsieur Nourissier… parce que j’avais completement « zappe » son visage de « Pere Noel » et donc mes prejuges.
    Ce n’est pas la passion du recit d’une decheance dans l’alcoolisme qui me motive mais l’ecriture !
    Monsieur AMETTE du Point :
    Dans « Eau-de-feu », tout est sec, économie de moyens, densité, exigence, clarté.
    http://www.lepoint.fr/actualites-litterature/2008-03-27/francois-nourissier-le-gardien-des-ruines/1038/0/232699
    Je redoutais le pire en me souvenant de la lecture des premieres pages d’un bouquin pondu par un celebre ecrivain, journaliste, cineaste, homme de radio et parolier français. Sa depression m’etait tombee des mains tres rapidement… non sans m’avoir, au prealable, provoque d’irrepressibles hauts-le-coeur !!!
    Par ailleurs, une curiosite me taraude : qui se cache derriere ce « Maudit Maitre Jean ? »

  14. Alex paulista @ Buridan

    « contrairement à certains qui ne sont pas loin de croire qu’ils imitent [Marcel Proust] en le dépassant ».
    Question : Quel est le sens de cette phrase ?
    Buridan | 25 août 2013 à 12:21
    C’est pourtant simple. Suivez bien :
    – J’imite MP et je le dépasse
    – J’imite MP en le dépassant
    – Je crois que j’imite MP en le dépassant
    – Ils ne sont pas loin de croire qu’ils imitent MP en le dépassant

  15. Maître Jean DAMNED

    @Savonarole : quelles catacombes ?
    Depuis des immeubles situés rive sud d’une partie de la rue Froidevaux à partir de l’étage N, on a une vue imprenable sur des tombes du cimetière du Montparnasse.
    J’ai commis une petite erreur : c’était son amie de khâgne Marie-Paule B. qui résidait non loin rue Daguerre, et votre référence était rue Froidevaux aux premières loges.
    Votre ironie aura donc servi à quelque chose.

  16. @Alex paulista
    L’interprétation que vous soutenez est celle de mes interprétations à laquelle j’ai donné le numéro un. Je l’ai rejetée sans développements, croyant que donner la forme correcte suffirait pour faire voir et convaincre.
    Vous n’avez pas vu, ou pas vu comme moi, je développe donc.
    Dans cette phrase l’imitation est l’action par laquelle un résultat, qui est aussi une fin, est atteint : l’auteur imite Proust (en mieux), ce qui fait qu’il le dépasse (ce qui est son but). Ce résultat est exprimé par un verbe de résultat, précisément. Dépasser une voiture est une action, qui prend un certain temps, mais ce qui est une action du sujet, qui prend un certain temps, c’est d’imiter Proust, pas de le dépasser. L’imitation étant faite, le dépassement est fait. C’est ce qui s’exprime en disant qu’ici dépasser est un verbe de résultat.
    Cherchons un équivalent : par l’action de jouer au Loto, j’obtiens un résultat, qui est aussi une fin, gagner de l’argent, et gagner de l’argent est purement un résultat, ça ne dure pas et ça n’est pas une action du sujet.
    Je peux dire : « Je gagne de l’argent en jouant au Loto », ou bien : « En jouant au Loto, je gagne de l’argent ». Mais je ne peux pas dire : « Je joue au Loto en gagnant de l’argent », ou « En gagnant de l’argent, je joue au Loto ».
    Evidemment, il y a des cas où ce rapport de conséquence n’existe pas, si bien que l’on peut aussi bien dire : « Je mange en travaillant » que « Je travaille en mangeant », avec des sens seulement peu différents. Et il existe des cas où le deuxième verbe indique quelque chose comme une action du sujet et non un simple résultat : on peut dire : « Je dépasse la Porsche en rigolant » à peu près aussi bien que « je rigole en dépassant la Porsche », parce que, même si rigoler est la conséquence du dépassement, c’est une action. Dans le cas qui nous intéresse, le rapport de l’action au résultat est moins marqué que dans le cas du jeu et du Loto, si bien que la faute est moins patente et qu’il faut plus de subtilité pour la détecter, mais elle n’en est pas moins là, parce que le verbe est très clairement un verbe de résultat. C’est ce que vous manquez quand vous passez comme si de rien n’était de votre « J’imite ET je dépasse » (rien à redire, la conjonction « et » est extrêmement polysémique) à votre « J’imite EN dépassant ») : non, vous dépassez en imitant, comme je l’ai dit.
    Du moins c’est ce que je perçois toujours, après avoir cherché des exemples pour vous répondre, et je persiste donc à trouver que « [ils croient] qu’ils l’imitent en le dépassant » est non seulement beaucoup moins bon que ne le serait « [ils croient] qu’ils le dépassent en l’imitant », mais je pense même que cela est, à peu près, fautif.

  17. Maître Jean DAMNED | 25 août 2013 à 17:07
    De la rue Daguerre on est à deux pas des catacombes, d’où mon erreur, mais de la rue Froidevaux on peut voir la tombe de Baudelaire ou la deviner, et contre le mur d’enceinte qui longe la rue Froidevaux, il y a une sorte de mausolée en hommage au poète. On n’y voit jamais personne d’ailleurs, les jeunes poètes en herbe préfèrent déposer des mots pliés en quatre sous un caillou, sur la tombe de Baudelaire.
    Enfin, tout cela aurait dû apaiser les sens de notre Josyane…

  18. Alex paulista

    @ Buridan | 25 août 2013 à 18:33
    Intéressant, mais pour autant je ne suis pas convaincu que « je dépasse en imitant » remplace exactement « j’imite en dépassant ».
    La seconde forme colle mieux à ce que notre hôte veut dire. Dans la phrase la pensée se loge dans le for intérieur du mauvais écrivain, qui sait au fond de lui qu’il imite, mais qui ne l’assume pas complètement et a besoin de cette excuse du « dépassement » pour se regarder dans la glace (il n’est pas loin d’y croire mais n’y croit pas tout à fait, comme un Macé-Scaron à ses mensonges).
    Ici l’action principale est imiter, le dépassement n’est qu’un prétexte. L’écrire dans l’autre sens traduirait moins que l’impétrant sait au fond de lui qu’il est un imposteur, et ne renforcerait pas le « pas loin de croire ».
    Si vous lisez du Perec, vous allez trouver beaucoup de phrases similaires avec des « presque » et des inversions aux nuances délicates.

  19. Alex paulista

    @ Savonarole | 25 août 2013 à 18:47
    Les vraies catacombes, on y accède par la rue Bonaparte (si on a la clef), grâce au patron du Cellier ou par le trou sous le tunnel de la ligne désaffectée près de Montsouris.
    À Denfert, c’est une mise en scène.

  20. @Alex paulista
    Il est certain que la présence du « ils croient » rend nettement plus délicat le jugement porté sur la justesse de l’expression. C’est sur lui que s’appuie votre argumentation dans ses paragraphes deux et trois. Je persiste à n’être pas convaincu par votre thèse. Je serais plutôt tenter de soutenir Ph. Bilger avec un argument du genre : l’obscurité, c’est un style ; ce qui, chez le tout-venant, serait une faute, est, chez lui, une beauté ardente et risquée.
    Mais enfin, je me trompe peut-être, et peut-être vois-je ce qui n’est pas, et vous, ce qui est.
    Quoi qu’il en soit, je suis heureux que le ton de cette discussion entre nous soit plus civil que celui de la précédente, qui devait être pénible, et pour moi, et pour vous, et pour nos éventuels lecteurs. Oserais-je dire que vous m’agréeriez encore plus si vous surveilliez plus votre expression : par exemple vous faites subir à « impétrant » une extension de sens que je ne retrouve pas dans le dictionnaire.
    Cordialement.

  21. @ Buridan (12:21)
    Cher Bubu, cherchez pas, on appelle ça de l’ironie. Peut-être pas dans le logiciel du logicien, ce mot ?

  22. Mary Preud'homme

    Pour les initiés, à ne pas confondre avec les touristes du dimanche évoqués par Alex paulista, les catacombes se nomment en réalité les carrières. Et pour avoir accès à ce labyrinthe interdit, le mieux est d’être proche d’un policier affecté à la surveillance des sous-sols de Paris où la descente se fait parfois en rappel. Sauf à vouloir s’égarer et se faire coincer et verbaliser par la brigade spécialisée de la préfecture de police, ce qui arrive le plus souvent aux naïfs qui ont fait confiance (moyennant finance) à un quelconque tôlier, Cellier ou un autre, prétendument détenteur d’un miraculeux sésame !

  23. sbriglia@celui qui hésite entre sa faim et sa soif...

    « Oserais-je dire que vous m’agréeriez encore plus si vous surveilliez plus votre expression » (Buridan)
    Deux « plus » : c’est pour la stéréo de la phrase ?
    (et Christian C qui me traitait de cuistre !)

  24. catherine A pas médiatique mais pas inconnue

    Non vue à la télé n’est pas être inconnue. Avec ses millions de lecteurs, Françoise Bourdin est plus connue que ces visages aperçus sur petit écran et parfois aussitôt passés à la trappe sans laisser la moindre trace. A l’aune d’une fugace célébrité médiatique, les inconnus, grands musiciens, peintres, écrivains sont légion. J’aurais presque envie d’écrire qu’ils ont de la chance.

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